En image – À fleur de peau

Un indice sur cet organe observé au microscope ? Première barrière de protection de l’organisme, sa surface peut atteindre deux mètres carrés et son épaisseur trois millimètres. Oui, il s’agit bien d’une peau humaine, et notamment de quelques centimètres d’une peau humaine reconstruite en 3D en laboratoire et confrontée à une condition d’hyperglycémie, c’est-à-dire un excès de glucose.

Un article à retrouver dans le magazine de l’Inserm n°66

© Inserm
Peau humaine reconstruite en 3D en laboratoire et confrontée à une condition d’hyperglycémie © Inserm

Ici, une protéine colorée en rose délimite l’épiderme au-dessus et le derme en dessous. Point de départ de ces travaux : l’hyperglycémie chronique et ponctuelle altère la qualité de la peau, accélère son vieillissement et compromet sa capacité à cicatriser. Supervisée par Rodrigue Rossignol, directeur de recherche Inserm à Bordeaux, et Anne-Laure Bulteau, coordinatrice scientifique à LVMH Recherche, l’équipe a cherché à comprendre comment une concentration élevée de glucose, similaire à celle retrouvée dans le sang de patients diabétiques, fragilisait l’intégrité de la peau.

Ainsi, au sein des fibroblastes, des cellules impliquées dans le soutien et dans la cicatrisation de la peau et dont les noyaux sont ici colorés en bleu dans le derme, l’excès de glucose inhibe les mitochondries, centrales énergétiques de la cellule. Une diminution de la protéine GDF15 dans ces mitochondries freine leur respiration. Autrement dit, leur capacité à produire de l’énergie à partir de l’oxygène. « Dans ces conditions, une mitochondrie va générer des radicaux libres, des molécules toxiques pour la peau qui induisent un vieillissement accéléré. Ainsi, les fibroblastes affaiblis sur le plan énergétique ne peuvent plus produire un réseau de collagène [en gris, ndlr.] dense et organisé, une condition nécessaire pour qu’ils puissent migrer au niveau des zones abîmées et procéder à la reconstruction cutanée », souligne Rodrigue Rossignol.

Autre observation clé : un apport supplémentaire en GDF15 rétablit à la normale la respiration mitochondriale. Cependant, avant d’envisager des solutions cosmétiques ou thérapeutiques qui restaurerait l’expression de GDF15, d’autres études sont nécessaires. « Sur de la peau reconstruite, nous ne prenons pas en compte le système immunitaire dans lequel GDF15 pourrait favoriser l’inflammation et compromettre les mécanismes de préservation et de réparation de la peau. Une question demeure : est-ce que la toxicité de l’hyperglycémie stoppée par un apport en GDF15 sera éradiquée sur une véritable peau humaine ? Nous devons examiner l’effet de GDF15 sur des modèles de peau reconstruite plus complexes, qui incorporent des cellules immunitaires et nerveuses », conclut Rodrigue Rossignol.


Rodrigue Rossignol est codirecteur de l’unité de recherche Maladies rares : génétique et métabolisme (unité 1211 Inserm/Université de Bordeaux) à Bordeaux.


Source : S. Ley-Ngardigal et coll. Repression of oxidative phosphorylation by NR2F2, MTERF3 and GDF15 in human skin under high-glucose stress. Redox Biol., 27 mars 2025 ; doi :10.1016/j.redox.2025.103613 

Autrice : J. P.

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