Sophie Lanone : Influencer le cours des maladies respiratoires

Sophie Lanone travaille sur les maladies respiratoires depuis son doctorat, il y a plus de 20 ans. Elle entend découvrir quels facteurs, externes ou internes, ont un impact sur le développement de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) ou de la mucoviscidose. Sa carrière vient de prendre un nouveau tournant grâce à l’obtention d’un contrat européen lui octroyant 11 millions d’euros pour explorer ces interactions pendant les cinq prochaines années.

Sophie Lanone
Sophie Lanone

Sophie Lanone est trop modeste : elle estime faire un travail de fond, mais cette directrice de recherche Inserm qui gère une équipe de 40 personnes à l’Institut Mondor de recherche biomédicale* à Créteil (équipe GEIC2O, pour Interactions génétique/environnement dans la BPCO, la mucoviscidose et autres pathologies rares respiratoires) soulève des montagnes ! Elle vient de décrocher un contrat européen de plus de onze millions d’euros pour progresser dans la connaissance des maladies respiratoires. En plus des projets en cours dans son laboratoire, elle et son équipe vont étudier l’impact de facteurs externes et internes sur le cours de maladies respiratoires : la pollution, le bruit, la composition du foyer, le niveau et les habitudes de vie... mais aussi l’épigénétique et la lipidomique (i.e. l’étude de la composition en lipides de l’organisme). Un projet sur cinq ans qui s’inscrit dans la volonté de l’Europe d’explorer les conséquences sur la santé humaine de ce que les scientifiques nomment l’exoposome.

La chercheuse a construit ce projet, baptisé REMEDIA, après plusieurs années dédiées à l’étude de l’impact de l’environnement sur les maladies respiratoires. « Suite à un post-doctorat l’emphysème (une composante de la BPCO) à l’université de Yale (États-Unis), je suis arrivée à l’Inserm en 2002, dans l’unité Physiopathologie et épidémiologie de l’insuffisance respiratoire (Paris). J’ai rejoint Créteil sept ans plus tard, et j’ai codirigé l’équipe « Effets respiratoires des contaminants environnementaux » à partir de 2015. Depuis janvier 2020, je dirige l’équipe GEIC2O », retrace la chercheuse. « Grâce au projet REMEDIA, j’espère résoudre une question très importante : pourquoi deux individus qui développent une BPCO liée au tabagisme, ou deux malades de la mucoviscidose qui portent la même mutation génétique, présentent des symptômes variables et auront une évolution différente de leur maladie ? Les raisons de cette variabilité restent un mystère. Nous devons découvrir quels facteurs modifient le cours de ces maladies. J’aimerais qu’un jour, face à un patient, selon sa génétique, son milieu et ses habitudes de vie, un médecin puisse, prédire le devenir de sa maladie grâce à nos travaux », explique Sophie Lanone. 

Le projet est conçu comme une boite à outils, avec différents sous-projets complémentaires : des travaux d’ingénierie pour développer des capteurs, des études précliniques, un suivi de cinq cohortes d’individus, mères-enfants, enfants ou adultes... Pour cela, Sophie Lanone s’est entourée des meilleurs : « J’avais besoin d’une très grande pluridisciplinarité, alors j’ai « recruté » plusieurs laboratoires à l’étranger, qui apporteront leurs compétences spécifiques pour enrichir ces travaux ». Au final, elle a donné naissance à un consortium réunissant 13 équipes issues de neuf pays européens. 

La chercheuse ne fait pas mystère du potentiel de ce projet pour nouer de nouvelles collaborations et enrichir son parcours : « Le projet REMEDIA aboutira probablement à de nombreuses découvertes et retombées. Mais ce financement ouvre bien d’autres opportunités et sera certainement un tournant dans ma carrière. La Commission européenne a par exemple demandé à tous les porteurs de projet qui ont obtenu un tel contrat dans le cadre d’H2020 − nous sommes neuf au total − de se réunir et de travailler ensemble sur les façons de promouvoir et de progresser dans les techniques et outils d’étude de l’exposome. Cela présage de rencontres et de progrès formidables », se réjouit-elle. 

Le projet REMEDIA coordonné par Sophie Lanone bénéficie d’un contrat européen attribué dans le cadre du Défi sociétal Santé, bien-être, vieillissement d’Horizon 2020, le programme de financement de la recherche et de l’innovation de l’Union européenne. 

Note :
*unité 955 Inserm/UPEC, Institut Mondor de recherche biomédicale, Créteil