Tests génétiques

A quoi servent-ils ?

De nombreux tests génétiques apportent des informations relatives à la santé des individus ou à celle de leur famille. Ces tests consistent à rechercher des anomalies sur la molécule d’ADN elle-même, ou à dépister des anomalies concernant le nombre ou la forme des chromosomes. Il faut distinguer les tests qui apportent des informations sur le patrimoine génétique transmissible, présent dans toutes les cellules de l’organisme (génétique constitutionnelle), et les tests qui informent sur l’état du génome de cellules tumorales (génétique somatique). En outre, d’autres tests permettent d’obtenir des informations sur la réponse à un traitement ou sur les risques d’effets secondaires (pharmacogénomique).

Dossier réalisé en collaboration avec le Pr François Eisinger, onco-généticien et membre du comité d’éthique Inserm 

Comprendre les différents test génétiques

Les tests de génétique constitutionnelle

Les tests de génétique constitutionnelle (ou héréditaire) reposent sur l’étude du patrimoine génétique d’une personne, le plus souvent à partir d’une prise de sang. Ils peuvent être réalisés avant la naissance (test prénatal) ou après, à n’importe quel âge (test postnatal).

En 2013, des tests concernant plus de 1 500 maladies génétiques étaient disponibles et plus de 500 000 tests postnataux de génétique constitutionnelle ont été réalisés (incluant les tests de pharmacogénomique). Toutefois, une part importante des analyses étaient consacrées à deux maladies : l’hémochromatose et la thrombophilie non rare. 


Une pratique encadrée par la loi de bioéthique

Des règles de bonne pratique concernant l’utilisation de ces tests et l’information à délivrer aux patients et à leur famille sont prévues par la loi de bioéthique et recommandées par l’Agence de biomédecine et la Haute autorité de santé.

En France, ces tests sont toujours effectués dans un cadre médical, avec une consultation en génétique permettant d’éclairer le patient et sa famille sur l’intérêt du test et sur les conséquences éventuelles de son résultat (risque pour la descendance, pronostic vital menacé, suivi thérapeutique à mettre en place, interruption médicale de grossesse...). 


Ces tests sont envisagés dans trois situations : 

Le diagnostic de maladies génétiques

Un test génétique diagnostic est effectué en cas de symptôme pouvant évoquer une maladie génétique. Le test est alors associé à des examens complémentaires et permet souvent de mettre fin à l’errance diagnostique. La rapidité et les chances de succès du test varient en fonction du nombre de modifications génétiques, et surtout de gènes associés à la maladie : ces tests sont utilisés pour le diagnostic de maladies monogéniques (liées à des anomalies affectant un seul gène), dont le gène causal est identifié (mucoviscidose, hémochromatose héréditaire ou encore polypose colique familiale).

Les tests génétiques diagnostics peuvent être pratiqués chez des enfants et des adultes, mais également chez des fœtus si l’anomalie recherchée a déjà été identifiée chez un parent ou si une symptomatologie évoquant un trouble génétique a été dépistée au cours du développement fœtal, comme en cas de trisomie 21. En 2012, des tests génétiques prénataux ont été réalisés chez plus de 41 000 fœtus. 


Génétique prénatal : l’analyse de l’ADN fœtal circulant dans le sang maternel change la donne

Il est désormais possible d’analyser des fragments d’ADN fœtal présents dans le sang de la mère et récoltés à partir d’une simple prise de sang chez cette dernière. Cette pratique constitue un progrès important car elle évite des prélèvements invasifs et leurs risques. 

Deux tests sont déjà proposés en routine avec cette méthode : 

  • la détermination du sexe de l’enfant dans le cadre d’un diagnostic prénatal de maladies associées au chromosome X
  • la détermination du rhésus fœtal lorsque la mère est rhésus négatif

Le dépistage de la trisomie 21 par cette technique commence également à être proposé à certaines femmes et le nombre d’indications devrait rapidement progresser. Toutefois, l’Agence de biomédecine se dit vigilante sur le plan éthique, compte tenu des dérives possibles à venir, liées à la facilité d’analyse de l’ADN fœtal par cette méthode. 


Des tests génétiques peuvent également être effectués chez des personnes ne présentant aucun symptôme, mais ayant un risque d’être porteurs d’une mutation associée à une maladie grave et désirant concevoir un enfant. Le résultat du test permet alors d’évaluer le risque de transmettre la maladie à sa descendance. 


Le diagnostic préimplantatoire

Un couple susceptible de transmettre une maladie génétique grave à sa descendance peut demander un test génétique préimplantatoire. Ce test consiste à rechercher l’anomalie génétique dans le génome d’embryons conçus par fécondation in vitro, avant implantation dans l’utérus de la mère. 

La maladie recherchée doit présenter un risque élevé de transmission (25 à 50% de risque), être grave et incurable. Des dizaines de maladies répondent à ces critères. 

L’Agence de biomédecine suit l’activité des laboratoires effectuant des diagnostics préimplantatoires en France, à Paris, Montpellier, Strasbourg ou encore Nantes. En 2012, 464 couples ont été éligibles à un diagnostic préimplantatoire et 91 enfants sont nés après sélection d’embryons sains.


Le diagnostic de maladies pré-symptomatique (tests prédictifs)

Pour les maladies monogéniques

Les tests génétiques prédictifs sont effectués chez des personnes qui ne présentent aucun symptôme, afin de prédire le risque de développer ultérieurement une maladie. Ces tests peuvent être hautement prédictifs : dans le cas de la maladie de Huntington, par exemple, la mutation cherchée est une condition nécessaire et suffisante pour développer la maladie. 

Pour les maladies multifactorielles

Il existe des tests prédictifs en cancérologie, notamment proposés lorsqu’une mutation a déjà été identifiée dans la famille. Ces tests apportent une indication concernant le risque de développer la maladie, mais en aucun cas une certitude : les facteurs environnementaux et personnels contribuent largement à la survenue d’un cancer, et les mutations génétiques recherchées lors de ces tests ne sont ni nécessaires, ni suffisantes à l’apparition d’un cancer. 

Ainsi, lorsqu’une personne est porteuse d’une mutation sur le gène BRCA1 ou le gène BRCA2, son risque de développer un cancer du sein avant 70 ans est de 40 à 85%, alors qu’il est de 10% dans la population générale. Concernant le cancer de l’ovaire, le risque est de 10 à 60%, contre 1% dans le reste de la population. L’identification de cette susceptibilité permet une surveillance plus précoce et plus rigoureuse des sujets à risque (l’ablation des seins est parfois choisie par les patientes et l’ablation des ovaires recommandée en fonction de l’âge et du projet parental). De même, un test de susceptibilité aux cancers colorectaux héréditaires sans polypose (HNPCC ou syndrome de Lynch) est également disponible. Les personnes présentant une mutation de l’un des gènes de la famille MMR ont 40 à 70% de risque de développer un cancer colorectal avant l’âge de 70 ans. 

D’autres tests sont disponibles pour des cancers du rein, des cancers plus rares comme le rétinoblastome, ou encore des néoplasies endocriniennes… Le nombre de tests prédictifs en cancérologie devrait progresser dans les années à venir, en raison de la découverte permanente de nouveaux gènes de susceptibilité associés aux différents cancers. A terme, la possibilité d’effectuer ces tests devrait s’ouvrir au plus grand nombre compte tenu des progrès techniques et de la baisse des coûts. Mais ils devront toujours être réalisés dans le cadre d’un conseil médical et d’une information préalable sur les conséquences possibles en fonction des résultats. 

Pour d’autres maladies multifactorielles ayant une composante génétique, comme l’asthme, le diabète ou bien d’autres, aucun test génétique prédictif n’est disponible à ce jour. Plusieurs gènes de susceptibilité à ces maladies ont pourtant été découverts au cours des dernières années. Mais la valeur prédictive des variants identifiés est beaucoup trop faible pour avoir une signification clinique sur le risque de développer la maladie. Cette situation pourrait néanmoins évoluer dans le futur, par exemple en associant plusieurs variants génétiques et en intégrant des données biologiques pour augmenter la valeur prédictive du test. 


Quand un test prédictif peut-il être considéré pertinent ?

Le centre de contrôle et de prévention des maladies américain (CDC) a proposé des règles, réunies au sein d’un modèle ACCE (validité Analytique, validité Clinique, utilité Clinique et respect de l’Ethique), qui permettent d’évaluer la pertinence de développer un nouveau test génétique. 

Les critères fixés assurent que le test est réellement prédictif d’une maladie et que la valeur prédictive est satisfaisante. Le doublement du risque d’apparition de la maladie dans les années qui suivent est souvent considéré comme une valeur acceptable, mais ce seuil peut varier selon la gravité de la maladie et les conséquences pour le patient. En outre, le test doit être utile : un diagnostic positif doit pouvoir déclencher une prise en charge adaptée. En cancérologie, les tests permettent par exemple de renforcer la prévention ou le dépistage. Il existe toutefois des exceptions à cette règle : dans le cas de la maladie de Huntington un test génétique prédictif est disponible alors qu’il n’existe actuellement aucun moyen de prévenir le développement de la maladie ou de la traiter. Mais dans ce cas particulier et quelques autres, les patients évoquent le droit de savoir. 

La pertinence d’un test génétique prend également en compte le respect de la dimension éthique, avec par exemple la nécessité d’une fin médicale (et non eugénique). 


Les tests de pharmacogénétique

La pharmacogénomique consiste à étudier les caractéristiques génétiques d’un individu pour prédire la réponse de son organisme à un médicament : effets secondaires, risques de surdosages, ou encore inefficacité. 

Ces tests permettent de détecter des variants génétiques associés à l’assimilation ou au contraire à la transformation/dégradation du médicament. En 2013, une trentaine de tests étaient disponibles. L’un d’eux permet par exemple de prédire la toxicité au traitement par 5‑FU (chimiothérapie) en cas de cancers colorectaux ou du sein. Plus de 3 500 personnes en ont bénéficié en 2013. Autre exemple, un polymorphisme du gène HLA est associé à une hypersensibilité à l’abacavir, un antirétroviral utilisé contre le VIH. 

La pharmacogénétique n’en est qu’à ses débuts : grâce à l’analyse des données génétiques des patients inclus dans les essais cliniques, les laboratoires pharmaceutiques développent de plus en plus souvent des tests génétiques associés à la réponse ou à la toxicité d’un traitement. 

Les tests de génétique somatique

Les tests de génétique somatique (non héréditaire) consistent à analyser le génome des cellules cancéreuses pour détecter des mutations survenues spécifiquement dans la tumeur et prédire la réponse à un traitement ciblé. On parle de « test compagnon ». Ils sont réalisés à partir d’une biopsie (ou d’une prise de sang pour les cancers hématopoïétiques), dans l’une des 28 plateformes de génétique moléculaire réparties sur tout le territoire français et rattachées à des établissements hospitaliers.

En 2011, 55 000 patients atteints de cancer ont bénéficié d’un de ces tests en vue d’utiliser l’un des 14 traitements spécifiques d’une anomalie génétique disponibles. Parmi ces patients, 20 000 étaient atteints d’un cancer du poumon et ont bénéficié de la recherche des mutations du gène EGFR, biomarqueurs de la sensibilité au gefitinib. 

Compte tenu de l’arrivée massive de traitements ciblés en cancérologie, ces tests sont amenés à largement se développer. Plusieurs programmes de recherche clinique sont en cours en France, comme SHIVA à l’Institut Curie, MOSCATO à l’Institut Gustave Roussy, ou encore le programme AcSé coordonné par l’Institut national du cancer pour tester la faisabilité d’un séquençage du génome tumoral en routine, afin de permettre au plus grand nombre de patients possible de bénéficier de traitements ciblés. 

Comment ça marche ?

Deux principales approches d’analyses du génome sont utilisées dans le cadre des tests génétiques : 

  • La génétique moléculaire, qui consiste à analyser la molécule d’ADN pour détecter des mutations ou autres anomalies de façon ciblée sur le génome. Elle fait appel à des techniques de biologie moléculaire.
  • La cytogénétique, qui consiste à étudier le nombre et la forme des chromosomes pour détecter des remaniements affectant des fragments chromosomiques ou des chromosomes entiers. Le plus souvent, cette étude s’appuie sur l’observation du caryotype du patient, correspondant à la photographie de l’ensemble de ses chromosomes. C’est l’analyse la plus répandue chez les fœtus, avec près de 41 000 caryotypes réalisés en 2012.

Ces deux approches sont de plus en plus perméables, notamment de part l’utilisation croissante d’outils communs tels que les puces à ADN. Environ 14 000 tests ont été effectués avec puces à ADN en 2013 en France, et l’utilisation de cet outil devrait croître dans les années à venir. Cette technique associe l’aspect global du caryotype et la haute résolution de l’hybridation ciblée de la génétique moléculaire. Les puces à ADN permettent de détecter des remaniements chromosomiques cent fois plus petits que ne le permettait jusque-là le caryotype. Dès lors, le risque devient celui de découvrir une autre maladie que celle recherchée… Le comité d’éthique de l’Inserm se penche actuellement sur cette question : que faire d’une information importante pour la santé découverte de façon fortuite, que l’individu n’a pas demandé à savoir et n’est pas forcément désireux d’entendre ?


Les tests en vente sur internet et leurs dangers

Des tests génétiques sont vendus directement par internet par des sociétés extérieures au système de santé. Les tests proposés ne sont pas forcément validés et ces services sont souvent proposés sans aucune intervention de professionnels de santé. Ce manque constitue un risque de désinformation majeure sur les conséquences possibles des résultats, dans un sens ou dans l’autre.

Un conseil en génétique est absolument fondamental pour encadrer toute réalisation de test génétique.


Il existe 229 laboratoires de génétique constitutionnelle postnatale en France. Leur activité est suivie par l’Agence de biomédecine, en collaboration avec Orphanet (portail de référence sur les maladies rares et les médicaments orphelins, coordonné par l’Inserm). Parmi eux, 200 pratiquent des tests de génétique moléculaire et 111 des tests de cytogénétique. Pour 60% des maladies qui bénéficient d’un test génétique (environ 880 sur 1 500), le diagnostic génétique est complexe et nécessite l’expertise d’un laboratoire particulier en France. 

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