La trisomie 21 affecte directement la fonction musculaire

Une région du chromosome 21 est associée au tonus musculaire, expliquant en partie la faiblesse observée chez les personnes atteintes de trisomie 21. Les chercheurs à l’origine de cette découverte tentent maintenant d’identifier les gènes impliqués. Leur objectif à terme : proposer une solution thérapeutique.

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© Inserm/Alpha Pict/D. Caro Caryotype humain 

Une équipe Inserm* vient d’identifier une région du chromosome 21 impliquée dans la fonction musculaire. Des souris présentant trois copies de cette région, comme en cas de trisomie 21, présentent une faiblesse musculaire, ou hypotonie. Ne porter qu’une seule copie est au contraire associé à un gain des performances.

Des souris monosomiques et trisomiques

C’est en étudiant les liens entre génétique et phénotype (les caractères observables) en cas de trisomie 21, qu’une équipe Inserm, en collaboration avec des chercheurs de Lyon, Barcelone et Genève, a découvert l’impact du nombre de copies d’une région du chromosome 21 sur la fonction musculaire. Jusque là, les cliniciens pensaient que la faiblesse musculaire des personnes atteintes de trisomie 21 était plutôt d’origine cérébrale, notamment en raison d’un cervelet de taille réduite affectant des fonctions locomotrices. 

Pour arriver à ces nouvelles conclusions, les chercheurs ont travaillé chez la souris. Ils ont fractionné le chromosome 21 en cinq fragments contenant 15 à 50 gènes chacun, et développé des modèles animaux possédant une seule copie (monosomie), deux copies (situation normale) ou trois copies (trisomie) de chacun de ces fragments. Ces modèles leur ont permis d’observer les conséquences d’une variation du nombre de copies des différents fragments sur les fonctions, cognitives et autres, des souris.

Avec l’un des cinq fragments (Hspa13-App), et avec lui seul, les chercheurs ont constaté une modification significative de la fonction musculaire des animaux. Trois copies du fragment étaient associées à une perte du tonus, alors qu’une seule copie décuplait la force des souris. Les scientifiques ont constaté que ce phénomène était lié à la modification des fibres musculaires et des mitochondries (les centrales énergétiques des cellules). « De précédents travaux ont d’ailleurs montré qu’un certain polymorphisme de cette région est associé à de meilleures performances chez les athlètes », confie Yann Hérault, coauteur de ces travaux. 

Peut être trois gènes responsables

Les chercheurs mettent ce phénomène sur le compte des gènes portés par ce fragment d’ADN. Au moins trois de ces gènes sont visés, sans que les auteurs sachent pour le moment si l’un d’entre eux est seul responsable ou s’ils agissent en synergie. « Ces gènes, Gabpa, Nrip1 et Atp5j, sont en effet impliqués dans la genèse et le fonctionnement des fibres musculaires et des mitochondries », détaille Yann Hérault. 

Les chercheurs vont maintenant tenter de clarifier le rôle de ces gènes sur la fonction musculaire. Il pourrait en découler, à terme, des traitements visant à améliorer les performances physiques chez les personnes atteintes de trisomie 21, et plus largement celles des patients souffrant de faiblesses musculaires. « En cas de monosomie, les performances physiques sont améliorées, rappelle Yann Hérault. Cela peut être un point de départ pour tenter de renforcer le tonus musculaire en cas de déficiences », suggère-t-il.

Note

*unité 964 Inserm/CNRS/Université de Strasbourg, Institut de Génétique et de Biologie Moléculaire et Cellulaire, Illkirch 

Source

V Brault et coll. Opposite Phenotypes of Muscle Strength and Locomotor Function in Mouse Models of Partial Trisomy and Monosomy 21 for the Proximal Hspa13-App Region. PLoS Genetics, édition en ligne du 24 mars 2015