Nouvelles mesures de confinement : quelle efficacité ?

Dans un contexte de crise sanitaire, les autorités françaises ont annoncé le 12 mars la fermeture des établissements scolaires, effective depuis lundi 16 mars. Cette mesure, qui fait écho à des décisions similaires prises en Italie, en Espagne, en Belgique ou encore au Portugal, s’inscrit dans un effort coordonné pour limiter la propagation du virus SARS-CoV‑2, responsable de la maladie infectieuse Covid-19, désormais qualifiée de pandémie par l’Organisation mondiale de la santé. Afin d’augmenter au maximum le nombre de personnes confinées au sein de leur foyer, le président de la République Emmanuel Macron a également demandé aux entreprises de recourir au télétravail dans tous les cas où cela s’avère possible. Quel effet à court terme peut-on attendre de ces mesures sanitaires contraignantes, qu’une partie de la population a reçues avec inquiétude ? Peut-on être assurés qu’elles seront efficaces, ce qui nous aiderait à nous acclimater au niveau de confinement supérieur, appliqué aujourd’hui à toute la population ?

C’est la question à laquelle ont répondu Vittoria Colizza*, directrice de recherche Inserm, et ses collègues de l’EPIcx lab à Paris, mobilisés pour étudier en temps réel l’évolution de l’épidémie sous l’effet de différents événements, notamment des prises de décisions politiques. Les chercheurs ont étudié les trois régions françaises qui enregistraient plus de 300 cas de Covid-19 confirmés à la date du 13 mars 2020, et montraient également une incidence inhabituellement élevée de syndrome grippal, qui constitue un indicateur de cas Covid-19 réels non détectés : l’Île-de-France, les Hauts-de-France et le Grand Est. 

À partir d’un modèle épidémiologique utilisant des données existantes sur les caractéristiques démographiques de la population, et les types de contact observés entre enfants et adultes au sein de chacune de ces régions, les chercheurs ont simulé l’effet de la fermeture des écoles et de l’augmentation de la pratique du télétravail. Leurs résultats, exposés dans un rapport préliminaire publié le 14 mars, sont très encourageants. « Il suffit que 25% des adultes travaillent de chez eux et que les écoles soient fermées pendant 8 semaines pour que le pic épidémique de Covid-19 puisse être retardé de deux mois, explique la chercheuse. Cette combinaison de mesures permettrait également de réduire de 40% le nombre de cas au moment du pic, par rapport à une situation où ces mesures n’auraient pas été prises. »

Réduire au maximum le nombre de cas pendant le pic épidémique

Or, ces résultats reflètent parfaitement le but poursuivi par les autorités sanitaires : réduire au maximum le nombre de cas pendant le pic épidémique, afin que les structures sanitaires ne soient pas submergées par le nombre de patients à prendre en charge simultanément, au risque que les capacités de soin soient dépassées. Dans ce cas-là, les effets sur le taux de mortalité des patients pourraient être dramatiques. 

« Retarder le pic épidémique de deux mois permettrait également aux structures hospitalières d’avoir davantage de temps pour se réorganiser en vue d’absorber au mieux l’afflux de malades, précise Vittoria Colizza. La probabilité de disposer, à ce moment-là, de traitements permettant de mieux soulager les symptômes de certains types de patients serait également augmentée. » Les résultats de l’équipe étant assez uniformes sur les régions étudiées, on peut s’attendre à ce que la fermeture des écoles et l’augmentation du télétravail soient efficaces sur l’ensemble du territoire. Combinées avec le confinement général appliqué aujourd’hui, l’efficacité de ces mesures sera probablement décuplée : nous pourrons la mesurer avec précision dans quelques semaines. 

Note :
* Unité 1136 Inserm/Sorbonne université, Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique, Paris