Du nouveau sur la nécroptose, plan B de la mort cellulaire programmée

Lorsqu’une cellule doit mourir, plusieurs scénarios sont possibles. Dans certaines conditions, c’est un phénomène nommé nécroptose qui va s’enclencher. Il engendre malheureusement, une inflammation délétère pour les tissus environnants et, parfois, pour le pronostic d’une maladie associée. Or des chercheurs viennent d’identifier un effecteur clé de ce mécanisme grâce auquel il serait possible de juguler cette inflammation.

La mort cellulaire est un événement normal qui fait partie de l’équilibre tissulaire. Elle se déroule classiquement par apoptose, un mécanisme passif et rapide, qui ne fait pas intervenir l’immunité. Il peut toutefois arriver que ce mécanisme ne puisse s’enclencher, par exemple parce que des enzymes nécessaires ne sont pas disponibles. Dans ce cas, la cellule passe au plan B : la nécroptose. « Au contraire de l’apoptose, la nécroptose fait intervenir des médiateurs proinflammatoires qui deviennent délétères pour les tissus environnants, explique Nicolas Bidère*. Il est intéressant de comprendre les mécanismes qui les régissent, afin de pouvoir les contrer ».

Concrètement, la nécroptose engendre des modifications importantes de la membrane cellulaire, la fuite du contenu cytosolique vers le milieu extracellulaire et, in fine la destruction de la cellule. Ce processus se caractérise ainsi par deux vagues d’inflammation : la première, réversible, précède et aboutit à la perméabilité de la membrane. La seconde survient suite à la modification de la membrane plasmique et ne peut être arrêtée. « Nous avons voulu comprendre les mécanismes impliqués durant la première phase : en effet, si certains effecteurs de la nécroptose sont déjà identifiés, l’ensemble des cascades moléculaires impliquées est loin d’être connue dans les détails ».

Un rhéostat de l’inflammation associée à la nécroptose

Tiphaine Douanne, qui a conduit les expérimentations au sein de l’équipe, s’est intéressée au rôle de MLKL (Mixed Lineage Kinase-Like Protein) : « Cette protéine est connue pour être l’effecteur clé de la nécroptose, sans que toutes ses fonctions soient parfaitement décrites ». A partir de travaux menés in vitro sur plusieurs lignées de cellules humaines, les chercheurs ont pu détailler les événements intervenant durant la première phase du phénomène : « MLKL promeut la synthèse de cytokines proinflammatoires et peut parallèlement former un complexe qui s’insère dans la membrane plasmique pour déclencher la mort cellulaire. Nous avons décrit que cette protéine favorisait également l’activation de la pannexine‑1 (PANX‑1), un canal de la membrane cellulaire connu pour permettre le passage d’ions ou de petites molécules comme l’ATP. Celle-ci apparaît ici jouer un rôle de rhéostat de l’inflammation : elle assure un mécanisme de rétrocontrôle initié par la présence de MLKL et qui limite la production de cytokines”.

La nécroptose est impliquée dans certaines maladies comme l’ischémie cardiaque aiguë, des maladies neurodégénératives (Alzheimer, sclérose en plaques) ou encore des cancers. Elle y participe via les effets délétères associés à l’inflammation des tissus environnants. Découvrir comment juguler cette inflammation permettrait d’envisager une amélioration du pronostic lié à ces pathologies. C’est pourquoi il est nécessaire de poursuivre ces travaux et d’accroître la compréhension de l’initiation et de la régulation des mécanismes à l’œuvre dans cette voie de mort cellulaire : cibler la pannexine‑1 pourrait permettre de moduler les conséquences cliniques de l’inflammation liée à la nécroptose, mais des études complémentaires pourraient conduire à l’identification d’autres cibles thérapeutiques. 

Note :
* unité 1232 Inserm/CNRS/Université de Nantes/Université d’Angers, Centre de recherche en cancérologie et immunologie Nantes-Angers (CRCINA), équipe Signalisation en oncogenèse, angiogenèse et perméabilité, Nantes

Source : T Douanne et coll. Pannexin‑1 limits the production of proinflammatory cytokines during necroptosis. EMBO Rep, 14 aout 2019, DOI : 10.15252/embr.201947840