Un marqueur de chronicité des infections ostéo-articulaires à staphylocoque doré

Une équipe Inserm a identifié un marqueur de chronicité des infections ostéo-articulaires à Staphylococcus aureus : un outil précieux pour adapter la prise en charge des patients, dont la pertinence reste toutefois à confirmer.

Comment savoir si une infection ostéo-articulaires par Staphylococcus aureus est chronique ou aiguë ? Une équipe Inserm* pourrait bien avoir trouvé la clé du problème en étudiant différents facteurs susceptibles d’être associés à la persistance de cette bactérie dans les os. 

Les infections des os et des articulations par Staphylococcus aureusfréquentes au niveau des prothèses articulaires, sont difficiles à traiter. Mais surtout, la prise en charge diffère selon que l’infection est aiguë ou chronique. Dans le premier cas, un simple lavage chirurgical du site infectieux et une antibiothérapie sont la plupart du temps suffisants. Dans le second cas, il faut enlever la prothèse, effectuer l’antibiothérapie puis replacer la prothèse, avec tous les inconvénients que cela entraine pour les patients. Seulement, au moment d’un premier épisode occasionnant douleur ou gêne, comment savoir si le germe sera facilement éradiqué par le traitement ou s’il risque de s’installer plusieurs mois dans les os ? 

C’est ce que voulaient savoir des chercheurs de l’Inserm qui ont étudié différents facteurs associés à la chronicité des infections impliquant 95 souches de S. aureus sensibles à la méticilline prélevées chez des patients. Parmi ces derniers, 67,5% présentaient un premier épisode infectieux aigu et 32% étaient touchés de façon chronique. 

Les chercheurs se sont intéressés à plusieurs facteurs associés à la survie de la bactérie : 

  • la présence du germe à l’intérieur des cellules osseuses, alors qu’il est normalement extracellulaire (internalisation),
  • la formation de biofilm par les bactéries, qui les protège de l’action des antibiotiques et du système immunitaire,
  • l’apparition de petites colonies composées de souches variantes au métabolisme ralenti,
  • ou encore la perte de fonctionnalité du « système agr », qui régule la production des facteurs de virulence de la bactérie et la synthèse d’une protéine nommée delta-hémolysine.

« Jusque-là, d’après des études conduites in vitro, ces facteurs étaient supposés être associés à la chronicité de l’infection. Mais ces hypothèses n’avaient jamais été vérifiées en clinique. C’est ce que nous avons fait », explique Florent Valour, co-auteur des travaux. 

Le gène agr, un marqueur facile à détecter

Cette nouvelle étude a permis aux chercheurs de constater qu’en réalité, deux facteurs semblent associés à la chronicité chez les patients : l’internalisation des bactéries dans les cellules hôtes et, surtout, le dysfonctionnement du gène agr, révélé par l’absence de la delta-hémolysine. Or, cette protéine peut facilement être recherchée en routine au moment du diagnostic de l’infection. « Le fait de connaître le statut en cette protéine pourrait donc permettre d’évaluer d’emblée le risque de chronicité, se réjouit le chercheur. C’est un système On-Off Si la delta-hémolysine est présente, il y a de fortes chances pour que l’infection soit aiguë. A l’inverse, si elle est absente, l’infection a un gros risque d’être chronique ».

Reste à confirmer la pertinence de ce marqueur par des travaux complémentaires. « Une étude prospective est en cours. Tous les patients traités comme si leur infection était aiguë sont inclus. Cette étude permettra de vérifier si les cas de rechutes sont bien associés à la présence de bactéries déficientes en delta-hémolysine. Si tel est le cas, il faudra ensuite regarder si le fait d’adapter le traitement en fonction du statut en delta-hémolysine facilite l’éradication du germe », conclut le chercheur. 

Note

*unité 1111 Inserm/CNRS/ENS/Université Claude Bernard Lyon 1, Centre international de recherche en infectiologie, Lyon 

Source

F. Valour et coll. Delta-toxin production deficiency in Staphylococcus aureus : a diagnostic marker of bone and joint infection chronicity linked with osteoblast invasion and biofilm formation. Clin Microbiol Infect, édition en ligne du 9 février 2015