Suivi des cas graves de Covid-19 : une clé pour comprendre la maladie

Une cohorte de patients infectés par SARS-CoV‑2, hospitalisés en raison de symptômes graves, a été constituée. Les données issues de ces patients permettront d’améliorer la connaissance de cette maladie, notamment concernant ses facteurs de risque, pour une meilleure prise en charge des futurs patients.

Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, les données internationales, comme celles recueillies en France, montrent la même tendance : environ 20% des cas sont des formes graves qui nécessitent une hospitalisation. Afin d’améliorer la prise en charge de ces malades, il est indispensable d’en détailler le plus possible les caractéristiques. Un enjeu de taille face à un nouvel agent infectieux comme le SARS-CoV‑2.

C’est précisément le projet de l’équipe de recherche parisienne Infection, antimicrobiens, modélisation, évolution (IAME)*. Ces chercheurs ont constitué une large cohorte de patients infectés par SARS-CoV‑2 avec plusieurs objectifs : en premier lieu, étudier la présentation clinique de la maladie, en décrivant les symptômes initiaux, leur évolution, l’aggravation clinique, ainsi que les facteurs de risque de complication et de mortalité. Il s’agit également de collecter des prélèvements nasopharyngés, obtenus à différents moments de la maladie, afin de déterminer la contagiosité du virus en identifiant sur quelle période il reste significativement présent. Des prélèvements sanguins réguliers permettront quant à eux de mesurer la réponse immunitaire et son intensité, ainsi que la durée de protection conférée par les anticorps produits durant l’infection. Des analyses seront conduites, afin d’identifier d’éventuelles susceptibilités génétiques à développer une forme grave ou des complications (mortelles ou non) de la maladie. Enfin, l’effet des traitements administrés aux patients sera évalué, qu’ils aient été ou non délivrés dans le cadre d’un essai clinique, afin de mieux cerner les approches thérapeutiques les plus prometteuses. 

France Mentré et Cédric Laouénan, statisticiens, coordonnent le déploiement de l’étude dans les centres hospitaliers français. Ils ont d’ores et déjà pu fédérer une centaine de services participants, répartis partout en France. Ces services sont invités à inclure tous les patients hospitalisés pour Covid-19, qu’ils fassent ou non partie d’un essai clinique comparant différentes pistes de traitement. 

Une méthodologie partagée à l’international

La mise en place en urgence d’une cohorte observationnelle n’est jamais un travail facile à mener, mais l’équipe s’est appuyée sur un consortium international pour faciliter les choses : « ISARIC** est un réseau international dédié aux infections respiratoires sévères émergentes. Il dispose d’un protocole d’évaluation standardisé pour ces maladies qu’il a transposé au cas du Covid-19 il y a plusieurs semaines. Nous avons donc pu l’utiliser rapidement pour le suivi de cette cohorte », explique France Mentré. Tous les échantillons sanguins seront transférés pour analyse dans des laboratoires de référence, afin de disposer de résultats de la plus haute pertinence. Grâce à ce protocole, « nous aurons une même base d’évaluation que les autres pays participants, ce qui permettra à terme de fusionner toutes ces données. Nous pourrons ainsi disposer d’une cohorte internationale dont la puissance statistique sera précieuse », poursuit-elle. 

Le recrutement des patients est aujourd’hui en cours et se poursuivra tant que durera l’épidémie : « Sur le terrain, les malades acceptent volontiers de participer à l’étude, ils comprennent la nécessité de tels travaux », ajoute la statisticienne. La durée de participation, de la visite d’inclusion à la dernière visite, sera de 6 mois. Mais les conclusions de certaines analyses seront connues au fil de l’eau, à partir des premiers cas déjà inclus. De premiers résultats pourraient être obtenus d’ici quelques semaines…

Le consortium REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases), coordonné par l’Inserm, promeut la recherche contre les maladies infectieuses émergente. Mi-mars, ce consortium a retenu 20 initiatives scientifiques visant à améliorer les connaissances et la lutte contre le Covid-19. Le projet décrit dans cet article en fait partie. 

Pour en savoir plus sur les projets retenus (en anglais)

Notes :
* unité 1137 Inserm/Université Paris 13/Université Paris Diderot et CIC-EC 1425 Hôpital Bichat, AP-HP
** pour International Severe Acute Respiratory and Emerging Infection Consortium