Sarah Zohar : Des statistiques à la santé numérique

Prix Innovation 2025 – Passionnée, Sarah Zohar s’impose comme l’une des figures de proue de la recherche en santé numérique. Son credo : utiliser les données, la modélisation et les simulations pour mieux évaluer médicaments et dispositifs médicaux numériques, au bénéfice direct des patients.

Volubile, intarissable ? Ou tout simplement passionnée par ce qu’elle fait ? Sarah Zohar, directrice de l’unité Health data- and model-driven knowledge acquisition (HeKa), est certainement tout cela à la fois ! « Je suis consciente que mon domaine de recherche n’est pas habituel, j’essaie de le présenter au mieux », explique en préambule la directrice de recherche, lauréate du prix Inserm Innovation. Son domaine ? La santé numérique. Ses outils ? Les biomathématiques et les biostatistiques.

Au lycée, la jeune fille se rêve plutôt en « généticienne, à la paillasse. Mais à l’université, à Paris, j’ai redécouvert les mathématiques et les statistiques ». Elle décide de se réinvestir dans ces disciplines en DEA (master 2 maintenant) en 2001, puis en thèse.

Intégrer et évaluer l’IA en santé

De façon originale, en 2005, elle intègre un centre d’investigation clinique en tant qu’ingénieure de recherche Inserm, tout en préparant le concours de chargée de recherche. « La santé numérique, ce sont des données : comment les représenter, comment les modéliser ? », simplifie Sarah Zohar. Avec en ligne de mire : améliorer la santé et la prise en charge du patient. L’apparente simplicité de sa présentation cache de nombreux défis technologiques et numériques. Ainsi, les dispositifs médicaux numériques qui embarquent de l’intelligence artificielle sont en premier évalués analytiquement, c’est-à-dire en s’appuyant sur les données, puis ils doivent l’être cliniquement, en vie réelle : cette dernière partie est complexe. « Comment garantir aux patients et aux professionnels de santé l’efficacité et la sécurité des dispositifs apprenants dans le temps ? » : c’est l’objectif du projet Smatch qu’elle coordonne avec Rodolphe Thiébaut, directeur du Bordeaux population health research center, dans le cadre du programme et équipement prioritaire de recherche Santé Numérique que l’Inserm copilote avec Inria et financé par le plan d’investissement France 2030.

Exploiter les données au mieux

Ce dont Sarah Zohar est très fière concerne le programme européen Invents qu’elle pilote : avoir convaincu les groupes pharmaceutiques de partager la plus grande quantité de données d’essais cliniques qui ne l’a jamais été dans le cadre d’un projet de recherche avec des académiques en Europe, d’une part, et de faire travailler dans le même consortium des acteurs majeurs dans l’accès au marché européen du médicament, d’autre part. « Dans les maladies rares, en particulier en pédiatrie, il y a peu de patients : les essais cliniques classiques de petite taille laissent la place à l’incertitude dans la généralisation de leurs résultats. L’idée est donc de développer des essais cliniques in silico en se fondant sur des modèles et des simulations », explique-t-elle. L’objectif final ? Proposer des méthodes qui permettent d’étendre les résultats issus d’essais cliniques de petits effectifs tout en respectant les contraintes des agences règlementaires afin de garantir aux patients un accès à des traitements innovants. Tout aussi enthousiaste qu’elle soit, Sarah Zohar s’interroge : « Je ne me serais peut-être pas lancée dans ce projet si j’avais su tout ce qu’il y avait à faire. » Gageons que si !

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