Un nouveau facteur pourrait faciliter l’obtention de cellules productrices d’insuline in vitro

En étudiant le développement du pancréas, une équipe Inserm a identifié un gène clé dans la différenciation des cellules productrices d’insuline. Cette découverte devrait faciliter l’obtention in vitro de cellules thérapeutiques destinées aux patients diabétiques.

Une équipe* de l’Institut de Biologie Paris-Seine pourrait bien avoir identifié un facteur permettant d’intensifier la production in vitro de cellules bêta pancréatiques productrices d’insuline. Une découverte très intéressante à l’heure où plusieurs équipes s’intéressent à la thérapie cellulaire du diabète. Cette approche consiste à remplacer les cellules déficientes des patients diabétiques par des cellules fonctionnelles, produites in vitro à partir de cellules souches. 

Actuellement, certains patients atteints de diabète de type 1 peuvent bénéficier d’une greffe de pancréas. Mais cette intervention est très lourde et nécessite de prélever les pancréas de plusieurs donneurs pour satisfaire les besoins d’un receveur, ce qui limite considérablement son utilisation. Avec la thérapie cellulaire, l’idée est d’utiliser des cellules productrices d’insuline générée en laboratoire en quantité quasi illimitée. Mais pour y parvenir, il est nécessaire de connaître la « recette » permettant de différencier massivement les cellules souches pluripotentes en cellules bêta.

Sans Hnf1b, un pancréas totalement désorganisé

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© IBPS, UPMC, CNRS, Inserm/C. Hautmaitre Coupe de pancréas d’un embryon de souris à 16,5 jours après délétion du gène Hnf1b dans les cellules progénitrices pancréatiques. Marquage des cellules canalaires et acinaires, désorganisées en absence d’Hnf1b (beta-catenin en rouge, dystroglycan en vert, noyaux des cellules en bleu). 

Les chercheurs à l’origine cette nouvelle découverte étudient le développement du pancréas et se sont intéressés à un gène muté chez des patients atteints d’une forme rare de diabète (diabète MODY5), le gène Hnf1b. « Des mutations affectant ce gène entrainent des malformations du pancréas et sont associées à ces cas de diabète. Pourtant, Hnf1b ne s’exprime pas directement dans les cellules bêta, productrices d’insuline. Nous voulions donc comprendre le lien de cause à effet », explique Cécile Haumaitre, chercheuse Inserm qui a dirigé cette étude. Pour cela, les chercheurs ont étudié le rôle du gène en inactivant son expression à différents stades du développement fœtal. 

Une malformation majeure du pancréas se produit alors : « Nous avons observé l’absence des précurseurs des cellules endocrines qui sécrètent les hormones de régulation de la glycémie, dont les cellules bêta, mais également une désorganisation totale associée à un dysfonctionnement des cellules exocrines qui sécrètent les enzymes digestives », décrit Cécile Haumaitre. En poussant plus loin leurs investigations, les chercheurs ont découvert que le gène Hnf1b régule l’expression d’un autre gène (Ngn3) dans les cellules destinées à devenir endocrines : ceci explique pourquoi le dysfonctionnement de Hnf1b affecte la production d’insuline.

Un facteur de différenciation possible

« Chez l’homme, nous supposons que ce mécanisme n’entraine pas une absence totale des cellules endocrines comme chez la souris, mais plutôt une réduction de leur nombre. L’altération de Hnf1b contribue ainsi à l’apparition d’un diabète chez le jeune ou l’adulte », précise la chercheuse. L’équipe va maintenant vérifier cette hypothèse grâce à un autre modèle de souris dont le gène Hnf1b porte une mutation identifiée chez l’homme. Si les résultats se confirment, cette découverte permettra d’envisager d’utiliser Hnf1b pour optimiser les protocoles de différenciation des cellules souches en cellules bêta. « L’objectif serait de sélectionner les cellules qui expriment des niveaux élevés de Hnf1b afin d’obtenir une forte activation de Ngn3, et par conséquent davantage de différenciation en cellules endocrines », clarifie Cécile Haumaitre. Un pas de plus vers la thérapie cellulaire pour traiter le diabète. 

Note

*unité 1156 Inserm/CNRS/Université Pierre et Marie Curie, Institut de Biologie Paris-Seine, Paris 

Source

M.G. de Vas et coll. Hnf1b controls pancreas morphogenesis and generation of Ngn3+ endocrine progenitors. Development, édition en ligne du 23 février 2015