Une hormone maternelle pourrait prédisposer les enfants au diabète

Les enfants exposés à des taux élevés de leptine lors de leur développement prénatal pourraient avoir un sur-risque de diabète de type 2. C’est ce que suggèrent les résultats de récents travaux conduits dans un modèle de souris.

Bien que de nombreuses données épidémiologiques indiquent que les enfants nés de mères en surpoids ou obèses ont plus de risque d’être atteints de diabète de type 2 que les autres, les mécanismes incriminés ne sont pas bien compris. De nouvelles données obtenues chez la souris suggèrent qu’une hormone sécrétée par les cellules adipeuses de la mère, la leptine, pourraient être impliquée dans ce phénomène. 

Le contrôle de la glycémie, qui est défaillant en cas de diabète, est notamment placé sous un double contrôle : celui du système nerveux autonome qui innerve les îlots bêta du pancréas chargés de produire l’insuline, et celui de la leptine sécrétée par les cellules adipeuses. Les chercheurs d’un laboratoire international associé, fruit de la collaboration entre une équipe Inserm* et une équipe américaine, viennent de démontrer, chez la souris, qu’il existe une interaction entre ces deux systèmes : le développement prénatal de l’innervation du pancréas est influencé par la leptine. Ainsi, lorsque le fœtus est exposé à des niveaux élevés de leptine pendant la période où se développent les fibres nerveuses concernées (fibres parasympathiques), la qualité du réseau nerveux formé est moins bonne et le contrôle de la glycémie perturbé. 

Le taux circulant de leptine étant d’autant plus élevé que la masse grasse est importante, cette découverte pourrait expliquer le sur-risque de diabète des enfants nés de mères en surpoids ou obèses. Pour confirmer cette hypothèse il faudra toutefois transposer ces données chez l’homme. 

Le moment crucial de la formation des fibres nerveuses

Ces données sont issues d’un travail visant à comprendre la façon dont se développe le système nerveux reliant le cerveau au pancréas chez la souris. Les chercheurs ont observé que ce processus se déroule autour du 12e jour de gestation. Ils ont aussi relevé que la densité de l’innervation était supérieure à la normale chez des souris génétiquement déficientes en leptine. 

Les chercheurs ont alors poursuivi leur étude en injectant une dose supraphysiologique de leptine au 12e jour de gestation, directement dans le cerveau des fœtus : « Cette unique injection centrale a un effet permanent sur le pancréas, que la souris soit normale ou génétiquement modifiée, rapporte Sébastien Bouret qui a dirigé l’étude. La leptine provoque une altération de la croissance des neurones dans le tronc cérébral qui relie le pancréas au système nerveux central. En conséquence, le nombre de fibres nerveuses formées et la qualité de régulation de la glycémie sont insuffisants. Cet effet apparait permanent : il n’existe pas de mécanisme compensatoire ultérieur. La leptine a donc un impact fort au moment du développement embryonnaire ».

Si de telles données sont retrouvées chez l’humain, « les femmes pourraient être sensibilisés à ce facteur de risque, comme elles le sont aujourd’hui pour le tabac et l’alcool. Des recommandations pourraient inciter celles souffrant d’obésité, ou en fort surpoids, à perdre du poids avant d’entreprendre une grossesse, pour favoriser la qualité du métabolisme chez leurs futurs enfants ».

Dans un premier temps, les chercheurs souhaitent vérifier ces résultats en les reproduisant chez des souris obèses. 

Note

* l’équipe de Vincent Prévot (unité 1172 Inserm/université de Lille) et l’équipe de Richard Simerly (Hôpital pour enfants de Los Angeles) 

Source

S Croizier et coll. Leptin Controls Parasympathetic Wiring of the Pancreas during Embryonic Life. 2016, Cell Reports 15, 1–9.