L’hepcidine régule le fer mais contrôle également les infections urinaires

Impliquée dans la régulation du fer dans l’organisme, l’hepcidine protège également contre les infections urinaires au niveau rénal. Les chercheurs Inserm à l’origine de cette découverte poursuivent l’étude des mécanismes impliqués pour, à terme, proposer un traitement complémentaire aux antibiotiques dans cette indication.

Une activité bactériostatique

L’hepcidine est un peptide synthétisé essentiellement par le foie et excrété dans les urines. Elle régule la concentration de fer dans le sang. Elle pourrait également aider à lutter contre les infections grâce à son activité bactériostatique découverte dans les années 2000. Selon les observations cliniques, les personnes atteintes d’hémochromatose, déficientes en hepcidine, seraient plus sujettes aux infections. Toutefois, ce rôle a peu été étudié jusque-là, les recherches se concentrant sur l’activité du peptide dans la régulation du métabolisme de fer. 

Les chercheurs ont découvert que le rein secrète également de l’hepcidine, sans que la molécule soit impliquée dans l’homéostasie du fer. Ils se sont donc interrogés sur l’intérêt de cette production locale et ont recherché son éventuelle implication dans le contrôle des infections urinaires. 

Plusieurs voies d’action

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© Inserm, A. Bizet Immunofluorescences sur reins adultes 

Pour cela, les chercheurs ont utilisé des souris totalement déficientes en hepcidine et des souris secrétant normalement le peptide. Une souche d’Escherichia coli, agent bactérien communément impliqué dans les infections urinaires chez ces animaux, a été inoculée aux souris des deux groupes. Les chercheurs ont alors constaté une sévérité accrue des infections chez les animaux mutés, avec une charge bactérienne importante dans les reins.

En étudiant ce phénomène de plus près, les chercheurs ont observé quatre processus favorables à l’infection chez les animaux dépourvus d’hepcidine :

  • une modification de l’acidité de l’urine,
  • une diminution de la réponse inflammatoire locale,
  • la perte d’activité bactériostatique contre l’agent infectieux,
  • une augmentation de la concentration en fer opportune pour la croissance bactérienne.

« L’hepcidine est au cœur de ces processus via différentes voies de signalisation dont certaines restent à clarifier, en particulier une action directe de la bactérie sur l’hepcidine qui provoque une chute rapide de la concentration de cette molécule dans le rein dans les heures qui suivent l’infection », détaille le Dr Zoubida Karim, coauteur des travaux. 

Vers un complément aux antibiotiques

« Ces travaux prouvent l’effet bénéfique de l’hepcidine sur le contrôle des infections urinaires chez la souris. L’idée est maintenant d’exploiter cette piste pour tenter de développer de nouveaux médicaments impliquant l’hepcidine ou ses voies de signalisation pour fournir aux patients un complément aux antibiotiques. Cela permettrait de réduire l’utilisation de ces derniers et le risque d’apparition de résistance », conclut la chercheuse. 

Note

*unité 1149 Inserm/Université Paris Diderot, Centre de recherche sur l’inflammation, Paris et unité 1137 Inserm/Université Paris-Diderot, Sorbonne Paris Cité, Paris 

Source

D. Houamel et coll. J Am Soc Nephro, édition en ligne du 20 août 2015