Greffe de poumon : un marqueur pour aider à prévenir le rejet

Un nouveau marqueur pourrait permettre de prévoir le risque de rejet après une greffe de poumon et d’optimiser l’efficacité du traitement immunosuppresseur.

Le dosage de la calcineurine pourrait bien devenir aussi utile aux transplantés pulmonaires que la glycémie pour les diabétiques. Ce dosage permettrait en effet d’ajuster le traitement immunosuppresseur des patients et même, dans certains cas, de prévoir le rejet de la greffe. C’est ce qu’indiquent les travaux d’une équipe de l’Inserm qui s’est essayée à l’exercice pendant deux ans, chez 107 patients ayant bénéficié d’une greffe de poumon. 

Un pronostic souvent défavorable

© Inserm/Alpha Pict

La greffe pulmonaire est le plus souvent de mauvais pronostic : plus de la moitié des patients qui sont encore en vie cinq ans après la transplantation présentent un rejet chronique caractérisé par une bronchiolite oblitérante (qui obstrue les voies respiratoires). Pour limiter ces effets, les médecins tentent d’ajuster au mieux les doses d’immunosuppresseur administrées aux patients, en veillant à ne pas les surdoser pour éviter l’apparition d’infections virales ou de tumeurs. « Actuellement, un dosage sanguin permet de connaitre la quantité de médicament disponible dans l’organisme. Cette mesure a l’avantage d’exister mais ne permet pas d’évaluer réellement l’efficacité du traitement, explique Sylvia Sanquer*, coauteur des travaux. Un bon marqueur de l’état d’immunosuppression permettrait d’adapter au mieux la posologie », reconnaît-elle. 

C’est dans ce contexte que les chercheurs se sont intéressés à la calcineurine. Cette enzyme, cible des deux principaux traitements immunosuppresseurs (la cyclosporine et le tacrolimus), est impliquée dans l’activation précoce des lymphocytes T à l’origine du rejet de greffe. 

Un marqueur fiable prédicteur de rejet

Après 24 mois de dosages réguliers chez les patients inclus dans leur étude, les auteurs ont constaté que le niveau d’activité de l’enzyme est effectivement lié au niveau d’immunosuppression et remplit bien son rôle de marqueur. En cas de faible activité révélant une forte immunosuppression, les patients sont davantage sujets aux infections et à l’apparition de tumeur. A l’inverse, en cas d’activité très élevée, le risque de rejet est particulièrement fort. 

Plus surprenant, les patients présentant au moins une fois une activité anormalement basse au cours de ce suivi avaient eux aussi un risque plus élevé de rejet. Pour tenter de comprendre ce phénomène, les chercheurs ont une piste : « Il se pourrait qu’il y ait une régulation endogène de la calcineurine : quand son activité est trop stimulée, un coup de frein permet de la réduire mais le patient a tout de même été exposé à un risque accru de rejet », suggère la chercheuse. En attendant de vérifier cette hypothèse, ces résultats ont permis aux auteurs de fixer deux seuils, un très bas et un très haut, en dessous et au dessus duquel le risque de rejet est considérable. 

Vers une utilisation clinique

Le dosage en routine de l’activité de la calcineurine chez les patients transplantés est tout à fait possible. Reste néanmoins à vérifier l’intérêt clinique de cette surveillance. Une étude devra pour cela montrer que ce monitoring permet réellement de réduire le risque de rejet de greffe. 

Note :
*Unité 747 Inserm/Université Paris Descartes-Paris 5, Centre Universitaire des Saints-Pères, Paris 

Source :
S. Sanquer et coll. Expression of Calcineurin Activity after Lung Transplantation : A 2‑Year Follow-Up. PLoS One, édition en ligne du 25 mars 2013