DMLA : quelles sont les ondes lumineuses responsables de la perte de la vision ?

Une fourchette de quelques longueurs d’onde au sein de la couleur bleue s’avère particulièrement toxique pour les cellules de la rétine des personnes atteintes de dégénérescence maculaire liée à l’âge. En identifiant précisément ces longueurs d’onde*, des chercheurs de l’Institut de la vision ont aidé à la mise au point de lunettes protectrices, permettant de prévenir la progression de la maladie.

Fini les verres jaunes privant de couleur bleue les personnes atteintes de dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Désormais, elles peuvent porter des lunettes avec un simple reflet bleuté qui altèrent beaucoup moins la qualité de leur vision. Ce progrès, les patients le doivent à une équipe de l’Inserm qui travaille au sein de l’Institut de la Vision**. Les chercheurs ont en effet réussi à identifier avec une grande précision la composante de la lumière du jour responsable de la mort des cellules pigmentaires de la rétine chez ces malades. 

Strict respect du spectre solaire

« Nous savions déjà que la lumière bleue est toxique pour la rétine en cas de DMLA. Cela s’explique par l’accumulation d’un composé qui absorbe la lumière bleue, la lipofuscine, qui provoque la mort des cellules de l’épithélium pigmentaire. Jusqu’à récemment, les lunettes protectrices privaient les malades de toute la couleur bleue, perturbant ainsi leur vision des couleurs. Nous avons donc cherché à identifier plus précisément les longueurs d’onde responsables de cette toxicité, pour affiner le niveau de protection nécessaire », explique Emilie Arnault, co-auteur des travaux. Pour cela, les chercheurs ont exposé des cellules de l’épithélium pigmentaire rétinien de porc à différentes longueurs d’onde en présence d’un des composants de la lipofuscine. 

« Nous avons découpé le faisceau lumineux en tranches de 10nm de longueurs d’ondes, en veillant à respecter leur amplitude dans le spectre solaire. Il était très important de simuler l’exposition réelle de la rétine à la lumière du jour. Par exemple, les UV parviennent faiblement jusqu’à la rétine », explique la chercheuse. « Quant au composant de la lipofuscine, nous l’avons administré à différentes concentrations comparables à celles retrouvées chez les malades afin de modéliser au mieux les conditions de la maladie ».

Quelques ondes lumineuses toxiques

Les chercheurs ont ainsi confirmé que plus la quantité de lipofuscine est importante, plus les cellules rétiniennes sont sensibles à la lumière, émettant davantage de signaux de mort cellulaire (apoptose). Mais ils ont surtout constaté que cette dégénérescence intervient préférentiellement pour des longueurs d’onde situées entre 415 nm et 455 nm, avec un pic à 430 nm. Fort de ces résultats, un partenariat avec un fabriquant de verres de lunettes a permis la mise au point des verres capables de réfléchir une fraction de ces longueurs d’ondes toxiques. « Ces lunettes préservent mieux la vision des couleurs et ne sont pas stigmatisantes pour les porteurs, contrairement aux lunettes à verres jaunes. Elles sont beaucoup plus esthétiques que les modèles actuellement disponibles », se réjouit Emilie Arnault. Par ailleurs, les chercheurs ont constaté que ces mêmes longueurs d’onde présentent une légère toxicité pour les cellules pigmentaires, même en l’absence du composant de la lipofuscine : ceci suggère une sensibilité de la rétine à ces ondes, y compris chez des personnes qui ne sont pas atteintes de DMLA. « Un point intéressant, à prendre en compte à l’avenir pour la prévention et la recommandation de verres filtrants », conclut la chercheuse. 

Notes :
*La lumière est composée d’un ensemble d’ondes électromagnétiques visibles par l’œil humain, dont les longueurs d’onde sont comprises entre 380 nm (violet) et 780 nm (rouge).
** Unité 968 Inserm/Université Pierre et Marie Curie, Institut de la Vision, Paris 

Source :
E. Arnault et coll. Phototoxic Action Spectrum on a Retinal Pigment Epithelium Model of Age-Related Macular Degeneration Exposed to Sunlight Normalized Conditions. PloS One du 23 août 2013, 8(8): e71398. doi:10.1371/journal.pone.0071398