Philippe Bousso observe la danse du système immunitaire

Philippe Bousso utilise des techniques d’imagerie très poussées pour observer les réactions du système immunitaire, en direct sur des animaux vivants. Un financement du Conseil européen de la recherche (ERC Starting Grant) lui a permis de décrire de nombreux mécanismes associés à des processus tels que ceux mis en jeu lors de traitements anticancéreux, de greffes ou encore d’infections cutanées.

Philippe Bousso en 2010 © Inserm/Begouen, Etienne

Observer en direct et in vivo la valse du système immunitaire en cas d’infection ou de cancer : telle est la performance de Philippe Bousso. Tout à commencer au cours de son post-doc à l’université de Berkeley, aux Etats-Unis. Ce diplômé de l’école Polytechnique, docteur en immunologie, a alors l’idée originale de filmer les réponses immunitaires en direct, sur des modèles vivants, pour mieux les étudier. « Jusque-là, les chercheurs avaient le choix entre l’observation in vitro, ou alors in vivo mais de façon ponctuelle, après avoir euthanasié l’animal pour récupérer l’organe à étudier. Dans tous les cas, le milieu naturel était sacrifié. Or, on sait bien que le comportement des cellules change selon leur environnement », rappelle le chercheur. Avec l’équipe du laboratoire, il se met donc au travail pour mettre au point des protocoles d’imagerie biphotonique permettant de visualiser en temps réel les réponses immunitaires dans les organes d’animaux simplement endormis. 

À son retour en France, en 2005, le jeune chercheur remporte un appel d’offre lui permettant de monter sa propre équipe autour de cette nouvelle technique d’observation, à l’Institut Pasteur. Sur la base de premiers résultats, il monte une demande de financement auprès du Conseil européen de la recherche (ERC). En 2010, il obtient un Starting Grant de près d’un million cinq cent mille euros sur cinq ans : son projet vise à étudier les lymphocytes T et les cellules Natural Killers impliquées dans les réponses aux infections et aux cancers. Il utilise des modèles animaux de leishmaniose, maladie causée par une infection parasitaire, et d’autres modèles de tumeurs solides et de lymphomes.

Des travaux très productifs et un second financement pour les poursuivre

Philippe Bousso et son équipe décrivent alors les mouvements et les interactions de ces cellules, mais également leurs moyens de communication dans ces différentes situations. En cinq ans, les travaux sont très productifs, avec une vingtaine de publications à la clé. Ils ont par exemple permis de : 

  • découvrir le mode d’action d’une immunothérapie (anti-CD20) dirigée contre le lymphome,
  • comprendre pourquoi des greffes de cellules souches hématopoïétiques pouvaient entrainer une maladie du greffon contre l’hôte dans certains organes,
  • identifier un mécanisme responsable du rejet de greffe,
  • décrire comment les cytokines se propagent pour contrôler une infection parasitaire dans la peau.

Mais cinq années sont vite écoulées et le chercheur souhaite aller plus loin. En 2016, il décide donc de soumettre un nouveau dossier à l’ERC. Cette fois, il entend provoquer des situations immunitaires non naturelles pour observer leurs effets en cas d’infection ou de cancer. « Nous allons manipuler les cellules immunitaires en même temps qu’on les observe grâce à la combinaison de techniques d’optogénétique et d’imagerie. L’optogénétique permet de modifier génétiquement des cellules, pour pouvoir commander certaines fonctions en les exposant à la lumière, précise-t-il. Cela permettra de progresser dans la compréhension des mécanismes immunitaires, et aussi peut être, dans un second temps, de découvrir des nouvelles pistes thérapeutiques ». L’ERC vient de donner son accord pour ce second projet. 

« Les financements de l’ERC offrent une réactivité unique qui permet de recruter rapidement des jeunes chercheurs de qualité pour travailler ensemble pendant plusieurs années. C’est vraiment un luxe ! La garantie financière qu’ils offrent permet par ailleurs de se consacrer pleinement au laboratoire et d’être proche des résultats au lieu de courir après d’autres sources de financement. Cela offre un avantage compétitif pour publier rapidement. Ces financements sont donc profitables non seulement pour celui qui en fait la demande, mais aussi pour les jeunes chercheurs. Dans mon équipe, deux d’entre eux ont pu ensuite monter leur propre laboratoire », illustre Philippe Bousso. 

Pour en savoir plus sur Philippe Bousso et ses travaux

Philippe Bousso dirige l’équipe Dynamique des réponses immunes au sein de l’unité 1223 Inserm/Institut Pasteur.

Le système immunitaire – Interview – 2 min 54 – vidéo extraite de la série Ils font avancer la recherche SupBiotech/Institut Pasteur (2011)

À lire aussi