Thomas Baumert, Prix Recherche 2023

À la fois médecin et chercheur, Thomas Baumert n’a de cesse de faire progresser les connaissances sur la fibrose et le cancer du foie pour développer des traitements innovants afin de mieux soigner les malades. Un défi en passe d’être relevé qui lui vaut le prix Recherche.

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Thomas Baumert, Prix Recherche 2023 – Institut de recherche sur les maladies virales et hépatiques (unité 1110 Inserm/Université de Strasbourg) ©Inserm/François Guénet

Les maladies du foie à portée de traitements

Thomas Baumert, directeur de l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatiques à Strasbourg, le répète à l’envi à son équipe : « La recherche est le moteur de l’innovation qui permet d’améliorer les soins des patients. » Cette conviction qu’il acquiert dès son doctorat au Centre allemand pour la recherche sur le cancer à Heidelberg (DKFZ) est le leitmotiv de son parcours de médecin-chercheur.

Ainsi, en 1994, après son diplôme de médecine et deux années d’internat à Munich, il rejoint le laboratoire de T. Jake Liang, chercheur et hépatologue à la Harvard Medical School de Boston, puis au département des maladies hépatiques aux National Institutes of Health à Bethesda, aux États-Unis. « La recherche était vraiment intégrée aux soins et ces quatre années ont confirmé mon intérêt pour la recherche translationnelle que nous appliquions au défi que représentait alors l’hépatite C », souligne-t-il.

Améliorer le sort des patients

À son retour en Allemagne, Thomas Baumert intègre l’hôpital universitaire de Fribourg et crée une équipe de recherche qu’il dirige pendant huit ans. Il a toujours la double casquette de médecin-chercheur, mais « l’activité clinique représentait plus de 80 % de mon temps. Quand en 2006, Christian Bréchot, le directeur général de l’Inserm, m’a proposé de créer et de diriger une unité de recherche à l’université de Strasbourg, j’y ai vu l’opportunité de rééquilibrer mes activités », explique-t-il. Une stratégie qui porte ses fruits.

Thomas Baumert entouré de l’équipe de l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatiques à Strasbourg ©Inserm/François Guénet

Son équipe, forte d’une cinquantaine de personnes aujourd’hui, est à l’origine d’avancées majeures. « Nos travaux sur la réponse immunitaire et l’entrée du virus de l’hépatite C dans les cellules ont contribué aux traitements développés, par la suite, par les laboratoires privés, décrit-t-il. Ça a été une prise de conscience car lorsque j’ai débuté, l’hépatite C tuait les gens d’un cancer du foie. Vingt-ans près, il est possible d’en guérir. J’ai mesuré l’impact de la recherche sur la prise en charge des malades. »

Du médecin-chercheur au startupeur

Puis, grâce à ses connaissances sur ce virus, l’équipe a modélisé la survenue de la fibrose et du cancer du foie à partir de tissus de malades. Ces modèles ont permis d’identifier une cible thérapeutique, la claudine 1. L’équipe a démontré que cette protéine est surexprimée à la surface des cellules du tissu malade et a mis au point des anticorps monoclonaux qui l’inhibent. Cette approche thérapeutique – maintenant développée par Alentis Therapeutics Basel, la start-up que Thomas Baumert a fondée en 2019 avec le soutien de la société d’accélération du transfert de technologies Conectus et d’Inserm Transfert – est évaluée chez des malades.

Émilie Crouchet, Joachim Lupberger, Laura Meiss Heydmann, Catherine Schuster et Eloi Verrier ©Inserm/François Guénet

En collaboration avec des chercheurs du Max-Planck Institute à Fribourg, l’équipe a aussi élaboré un « atlas » qui recense toutes les cellules du foie humain et leurs mécanismes d’action. « Très vite, la communauté scientifique et les industriels l’ont adopté ! », se réjouit Thomas Baumert. Enfin, avec Yujin Hoshida de l’université du Texas à Dallas, aux États-Unis, le chercheur et son équipe ont élaboré une sorte de « mini foie » qui reproduit la signature pronostique de la fibrose et du cancer. Grâce à ce modèle, ils ont identifié des médicaments potentiels, dont un qu’ils souhaitent évaluer sous peu chez les malades. Pas de doute, pour Thomas Baumert, la recherche doit toujours servir au patient. Une démarche saluée par le prix Recherche Inserm, « qui est surtout une reconnaissance pour l’équipe et qui est très gratifiant », conclut-il.

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Thomas Baumert
Marquages sur foie de souris humanisée: ce sont des souris imunodéficientes et hépatodéficientes auxquelles on a gréffé des hépatocytes, cellules de foie, humain. 4 à 8 semaines plus tard, elles sont infectées par le virus de l'hépatite C. Marquage de la cytokératine 18 humaine, marqueur des hépatocytes humains, en immunofluorescence en rouge et contre-coloration des noyaux en bleu. Cette image montre qu'il y a un remplacement d'environ 50% du foie de souris par du foie humain. Grossissement x20.
200 000 personnes concernées en France