Florence Ader, Prix Recherche 2020

Chercheuse au sein d’une unité Inserm*, Florence Ader est également une clinicienne de terrain qui soigne des malades au quotidien. Cette double casquette lui a valu le pilotage du grand essai clinique Discovery… et le Prix Recherche !

Florence Ader © Inserm/François Guénet
Florence Ader © Inserm/François Guénet

Dans le milieu des experts de la Covid-19, Florence Ader est l’une des rares femmes avec la double casquette de chercheuse et de clinicienne… Affiliée depuis les années 2000 au Centre international de recherche en infectiologie (Ciri) à Lyon, codirigé par l’Inserm, elle est également, depuis vingt ans, infectiologue et pneumologue à l’hôpital de la Croix-Rousse – avec en plus, une formation en réanimation médicale. Et pourtant, elle reste largement méconnue du grand public. Cela, malgré son apparition au côté de l’ex-Premier ministre Édouard Philippe en avril 2020, lors d’une conférence télévisée sur la Covid. Et pour cause : discrète et soucieuse de ne pas donner dans l’opinion, celle qui place « la rigueur scientifique et la santé des patients au-dessus de tout », préfère travailler dans l’ombre. « Même en temps de crise, nous devons garder en tête notre but initial : accroître nos connaissances pour mieux soigner les personnes malades », note-t-elle. On l’aura compris : les controverses scientifiques qui ont agité la science au début de la crise sanitaire, ne l’intéressent que « de loin ».

Un essai européen inclus dans un projet mondial

C’est d’ailleurs sûrement en raison de sa rigueur scientifique – en plus, bien sûr, de sa grande expertise en tant que chercheuse et clinicienne – que le consortium Reacting de l’Inserm a fait appel à elle pour mettre en place et diriger l’essai Discovery lancé en mars 2020. Fils de l’essai Solidarity conduit sous l’égide de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en Europe et dans le monde, il vise à tester quatre traitements expérimentaux contre la Covid-19, en association aux soins standards : le remdesivir, un antiviral développé contre Ebola ; l’hydroxychloroquine, utilisée pour traiter le lupus et l’arthrite rhumatoïde ; l’association de lopinavir et de ritonavir, un traitement anti-VIH ; et cette combinaison associée à l’interféron bêta, une substance produite naturellement par le système immunitaire. 

« À ce jour, grâce à la puissance de Solidarity, nous avons pu obtenir des résultats probants prépubliés en ligne en octobre 2020. Lesquels ont permis de conclure à une inefficacité de trois de ces thérapies : l’hydroxychloroquine, lopinavir/ritonavir et lopinavir/ritonavir associé à l’interféron bêta. D’où l’arrêt de ces “bras de traitement” dans l’essai clinique. Désormais, nous nous concentrons sur le remdesivir », fait le point la chercheuse. 

Rien n’aurait été possible sans les cliniciens ni les patients

Les prochaines étapes ? L’infectiologue et ses collègues espèrent des résultats qui permettraient de trancher pour le cas du remdesivir, « début 2021″. À plus long terme – « dans un délai de plusieurs semaines à plusieurs mois » –, l’essai pourrait permettre de tester de nouveaux traitements candidats qui auraient démontré une potentielle efficacité lors d’études précliniques sur l’animal ou de premières administrations (études cliniques de phase II chez l’Homme).

L’infectiologue insiste : jamais Discovery n’aurait pu voir le jour sans la forte implication d’une part de l’Inserm, « qui fédère l’excellence de la recherche médicale en France », mais aussi de ses collègues cliniciens, « qui ont accepté, au début de la crise, un surcroît de travail pour informer les patients sur cet essai et leur proposer d’y participer… alors qu’ils devaient traiter de nombreux malades qui affluaient dans leur service ». Mais a également été décisive l’adhésion des patients « qui ont été nombreux à accepter de participer à ce projet pour faire avancer la recherche ». Et de souligner le caractère « remarquable » de l’engagement des uns et des autres. Preuve, s’il en fallait, qu’en temps de crise, l’intérêt commun prévaut souvent… et rassemble. 

L’unité Covid-19 du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital de la Croix- Rousse, de gauche à droite et de haut en bas : Christine Arcuset, Meyline Jacques, Mélanie Duraes et Anne-Laure Raby © Inserm/François Guénet
L’unité Covid-19 du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital de la Croix- Rousse, de gauche à droite et de haut en bas : Christine Arcuset, Meyline Jacques, Mélanie Duraes et Anne-Laure Raby © Inserm/François Guénet

Note :
*Unité 1111 Inserm/CNRS/ENS de Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1, Lyon