Pierre Ronco : un expert mondial des maladies rénales

Pierre Ronco, membre de l’Académie nationale de médecine et de l’Institut Universitaire de France, dirige une équipe de recherche qui s’intéresse à la glomérulopathie extramembraneuse, une maladie auto-immune qui peut entraîner l’insuffisance rénale. En 2012, il a reçu un important financement du Conseil européen de la recherche (ERC Advanced Grant) pour faire progresser les connaissances sur cette maladie.

Pierre Ronco © Inserm/Begouen, Etienne

Quel a été votre parcours, et quelles sont vos thématiques de recherche aujourd’hui ?

J’ai eu un parcours relativement classique en médecine. Durant mon internat, j’ai rencontré deux grands maîtres, qui ont été mes modèles. Il s’agit de Gabriel Richet, qui a développé la néphrologie à Necker puis à Tenon, et Maxime Seligmann, un très grand immunopathologiste. Parallèlement j’ai été initié à la recherche par Pierre Verroust, un médecin immunologiste. C’était au début des années 1980. 

Je suis aujourd’hui directeur de la plus ancienne unité de recherche Inserm. Nous travaillons sur la glomérulopathie extramembraneuse, et faisons partie des experts mondiaux sur le sujet. Une autre équipe dirigée par Christos Chatziantoniou, a pour objectif d’identifier des biomarqueurs permettant de prédire la progression des maladies rénales afin de trouver de nouvelles thérapies. Les 2 équipes sont très complémentaires dans la recherche translationnelle.

Pour quel projet avez-vous obtenu une ERC Advanced Grant en 2012 ?

Il s’agit d’un projet centré sur la glomérulopathie extramembraneuse, pour laquelle nous avions identifié en 2002 le premier antigène impliqué chez l’homme, l’endopeptidase neutre. En 2011, nous avions identifié des gènes de prédisposition, les gènes du complexe HLA, et le gène PLA2R qui code pour l’antigène majoritaire impliqué. 

Nous avons donc cherché à mieux comprendre les facteurs génétiques qui prédisposent à la glomérulopathie extramembraneuse, et à identifier des biomarqueurs de progression ou de rémission de la maladie. Le troisième objectif était de trouver de nouvelles thérapeutiques. 

Quelles découvertes avez-vous fait à ce sujet ?

Nous avons identifié un grand nombre de variants génétiques, au niveau des loci HLA et PLA2R, qui représentent des facteurs de prédisposition à la maladie. Avec Hanna Debiec, nous venons notamment de faire une découverte assez significative du point de vue clinique : les risques de récidive de la maladie après transplantation sont en fait conditionnés par les variants génétiques du donneur, et non du receveur. On pourra ainsi faire le choix du « meilleur donneur » pour les patients atteints de glomérulopathie extramembraneuse. 

Il nous reste aujourd’hui à identifier les facteurs déclenchants de la maladie (pourquoi certains patients, un jour, développent cette pathologie ?), et à développer de nouveaux médicaments à partir des molécules que nous avons sélectionnées. 

En quoi la bourse ERC vous a permis de faire avancer votre projet ?

L’ERC a été pour nous un changement de paradigme ! Nous sommes passés d’un financement d’environ 300 000 Euros, à un budget de 2 500 000 Euros. L’ERC a permis à mon groupe d’entreprendre des recherches qui n’auraient pas été possibles auparavant, car nécessitant de très gros moyens. Cela nous a conduit à développer des programmes beaucoup plus innovants. 

Vous venez d’être choisi comme éditeur en chef de Kidney International, c’est exact ?

Oui, c’est pour moi une merveilleuse opportunité. Kidney International est l’un des deux premiers journaux de néphrologie, et c’est la première fois que cette revue choisit un éditeur en chef non-américain. C’est extrêmement stimulant pour la néphrologie francophone et européenne !