Marc Jeannerod

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Homme de cœur, autant que savant rigoureux et de très grand talent, Marc Jeannerod s’est illustré par ses recherches innovantes dans le champ de la neurophysiologie et de la neuropsychologie. 

Il entame sa carrière de recherche dans le laboratoire de Michel Jouvet où, selon ce dernier, “il s’est trouvé confronté aux mystères du rêve, cet état conscient caractérisé par une représentation de l’action sans contrepartie motrice réelle”. Il va ainsi mener avec celui-ci des recherches sur le sommeil paradoxal et les mouvements oculaires. Il s’attache à clarifier comment le cerveau transforme en mouvement les informations sensorielles et postule que « l’action est une modalité d’existence de la représentation et, inversement, la représentation d’une modalité de l’action ». 

En étudiant les rapports entre vision et action, Marc Jeannerod montre que les mouvements des yeux, déclenchés par des stimulations visuelles, influencent en retour l’activité du système visuel, le préparant ainsi aux modifications de la scène visuelle que ceux-ci provoquent. Cette action anticipatrice de la commande d’un mouvement sur un système sensoriel constitue un modèle extrêmement intéressant du traitement cérébral de l’information : ainsi, le cerveau distingue les modifications sensorielles auto-produites de celles dues à des événements du monde extérieur. Partant de cette régulation anticipatrice, Marc Jeannerod énonce le principe selon lequel nos mouvements obéissent à une commande construite à partir d’une représentation du but à atteindre. 

Il démontre ensuite que l’action imaginée et/ou l’action exécutée active des réseaux corticaux semblables. Ainsi, l’activité cognitive repose sur la simulation, par le système nerveux, de l’exécution d’une action, mécanisme qui rend également compte de la reproduction du mouvement observé chez un tiers. 

En précurseur, Marc Jeannerod applique ce principe à la description des mouvements de la main chez l’homme. Il démontre que les mouvements des doigts, lors de la formation de la pince avant la prise, présentent une organisation particulière : la pince digitale s’ouvre jusqu’à une amplitude strictement corrélée à la taille de l’objet à saisir, avant de se refermer sur celui-ci. Ainsi, par sa représentation dans le système visuel, la taille de l’objet guide le mouvement dès son début de manière “pro-active”.

Cet intérêt pour la notion de représentation conduit Marc Jeannerod à étudier “l’action non exécutée”, dont l’action imaginée constitue un exemple paradigmatique, qui permet de tester l’activité du système moteur en l’absence de tout mouvement. Il montre que l’action imaginée et l’action exécutée activent un réseau semblable d’aires corticales et que cette activité cognitive repose sur la simulation, par le système nerveux, de l’exécution d’une action. Il établit que ce concept s’étend à l’observation d’une action exécutée par un tiers. Ce phénomène d’empathie est majoré chez des patients porteurs de lésions frontales. Inversement, l’attribution de l’action à sa véritable source (soi ou autrui) est perturbée dans certaines pathologies (autisme, schizophrénie, par exemple). 

Marc Jeannerod a entièrement renouvelé la conception de l’activité mentale de l’époque.

Biographie

Marc Jeannerod est né le 12 décembre 1935 à Lyon. Il a mené ses études secondaires au lycée à l’Externat Sainte-Marie et ses études supérieures aux universités de médecine et des sciences de Lyon. 

  • Interne des hôpitaux de Lyon (1961).
  • Docteur en médecine (1965).
  • Attaché-assistant de sciences fondamentales, laboratoire de médecine expérimentale, faculté de médecine de Lyon (1966–1968), assistant d’électro-encéphalographie, hôpital neurologique à Lyon (1967–1968).
  • Diplôme d’études approfondies de physiologie animale, faculté des sciences de Lyon (1968).
  • Attaché de recherches Inserm (1968), chargé de recherches Inserm (1969).
  • Maître de conférences agrégé à l’université Claude-Bernard de Lyon (1970).
  • Créateur et directeur de l’unité de recherche Inserm 94 “Neuropsychologie expérimentale” (1975–1989) devenue “Vision et motricité”, Centre hospitalier Le Vinatier, Bron, Lyon (1990–1997). Claude Prabang lui succède en 1998, l’intitulé de l’unité étant alors “Espace et action”. 
  • Directeur de l’Institut des sciences cognitives, unité mixte de recherche 5015 du CNRS (1997–2003).
  • Professeur émérite de l‘université Claude-Bernard de Lyon. 

Marc Jeannerod est décédé à Lyon, le 1er juillet 2011. 

Instances scientifiques

  • Membre de la commission scientifique spécialisée (CSS) de l’Inserm « Neurologie, neurophysiologie, psychologie et psychiatrie » (1968–1974).
  • Vice-président de la CSS » Système nerveux central et organes des sens, système musculaire, squelettique, pathologie mentale : physiologie, physiopathologie, pharmacologie, recherche clinique » (1983–1986).

Sociétés savantes – Académies

  • Membre de la Société de biologie de Lyon, de l’Association des physiologistes de langue française, de la Société d’électro-encéphalographie et de neurophysiologie clinique, de l’Association des psychologues de langue française. 
  • Membre de l’European Brain and Behavior Society, de l’International Brain Research Organization.
  • Correspondant (1996) puis membre (2002) de l’Académie des sciences – Institut de France. 

Prix – Distinctions

  • Prix Montyon de l’Académie des sciences – Institut de France (1984).
  • Membre de l’Academia Europaea (1989).
  • Docteur honoris causa des universités de Lausanne (1993), de Buenos-Aires (1996) et de l’université catholique de Louvain (2009).
  • Chevalier de la Légion d’honneur.