Dominique Mazier

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Dominique Mazier a démarré son parcours comme médecin « sur le terrain » au Mali et en Ethiopie, puis comme médecin de campagne dans le Gers. Elle s’est ensuite orientée vers une carrière hospitalo-universitaire dans le domaine de la parasitologie-mycologie. Ses recherches portent sur les parasites et les champignons pathogènes pour l’homme, avec une part importante consacrée au parasite du paludisme (ou malaria). En explorant les mécanismes fondamentaux de l’infection qu’ils engendrent, ses travaux visent à développer de nouveaux concepts de recherche, ainsi que leurs applications thérapeutiques. 

Une partie importante de la recherche menée par Dominique Mazier a été consacrée à la phase hépatique du paludisme qui succède immédiatement à la piqûre d’un moustique infecté. Ce n’est qu’après s’être multiplié dans le foie (stade pré-érythrocytaire) que le parasite se propage dans le sang où sa prolifération provoque une maladie potentiellement mortelle. Attaquer le parasite avant l’étape sanguine est à la base de nombreux travaux dans le monde, qu’ils concernent la mise au point d’un vaccin ou de nouvelles molécules thérapeutiques. Dominique Mazier et son équipe ont établi dans les années 1980–1990 de nombreux modèles pour étudier les stades pré-érythrocytaires. Ces modèles ont notamment été très précieux pour analyser la réponse immunitaire de l’hôte infecté et pour identifier les molécules humaines cruciales pour le développement hépatique du Plasmodium. Il s’agit notamment des protéines CD81 et SRB1 ou des gènes codant des protéines parasitaires impliquées dans la pénétration/développement de Plasmodium falciparum et potentiellement utilisables en tant que cibles de vaccins. Des travaux ont également concerné la mise au point de criblages et de modèles mathématiques, pour identifier de nouveaux antimalariques, dont un composé issu d’une plante malgache. Cette plante a la propriété unique, parmi tous les médicaments anti-paludéens courants, d‘avoir une activité inhibitrice spécifique du stade hépatique. Cette propriété a des implications importantes pour lutter contre le développement indésirable de la résistance aux médicaments lors d’une utilisation massive. 

Une fraction des parasites dans le foie, appelés hypnozoïtes, peut rester « dormante » un an ou plus, avant de se réveiller au cours du temps, provoquant une infection sanguine. Cette phase hépatique de développement du parasite, spécifique des espèces vivax et ovale, représente une double difficulté pour éliminer le paludisme : un plus grand nombre de patients à traiter et une transmission accrue. Malheureusement, la primaquine (et son équivalent récemment développé, la tafénoquine), seuls médicaments capables de tuer les hypnozoïtes, ont des effets indésirables, parfois graves pour l’organisme. En utilisant un nouveau modèle d’infection par Plasmodium cynomolgi, un parasite du singe, générant des hypnozoïtes, le laboratoire de Dominique Mazier a identifié une molécule inhibitrice des facteurs épigénétiques qui ciblent des méthyltransférases d’histones et qui, paradoxalement, induit le réveil des hypnozoïtes. Ce résultat inattendu a amené l’équipe à formuler en 2014 une nouvelle stratégie, « Wake & Kill », consistant à associer une molécule capable de réveiller le parasite dormant à un des nombreux médicaments disponibles et efficaces sur le parasite. 

Un deuxième volet important concerne la pathogenèse du paludisme cérébral. L’équipe de Dominique Mazier a fait la démonstration que l’apoptose des cellules endothéliales induite par l’adhésion de Plasmodium falciparum perturbait la perméabilité de la barrière endothéliale, potentiellement au centre de la pathogenèse. Différents gènes de Plasmodium falciparum potentiellement impliqués dans la pathologie cérébrale ont été identifiés. Enfin, des essais chez l’homme sont en préparation, basés sur le fasudil, un inhibiteur de la signalisation de la protéine Rho-kinase, ayant montré sa capacité à protéger la cellule endothéliale.

A l’interface entre recherche fondamentale et recherche clinique, les études pionnières de son laboratoire ont montré l’intérêt de la protéomique dans l’identification directe des champignons et des leishmanies pathogènes pour l’homme, la détermination des concentrations minimales inhibitrices d’antifongiques, ou le diagnostic d’infections profondes au champignon Candida, permettant la mise en place plus rapide d’un traitement approprié. 

Professeur à la faculté de médecine Pierre et Marie-Curie à Paris, Dominique Mazier a dirigé plusieurs unités de recherche Inserm de 1997 à 2014, dont l’unité 945, où ont été développés des projets translationnels couvrant un large éventail d’approches, allant de la recherche fondamentale à la recherche clinique, sur deux pathogènes majeurs, le Plasmodium et le VIH. 

Biographie

Dominique Mazier est née le 16 mars 1949 à Paris. Elle a mené ses études secondaires à Auch (Gers) et ses études supérieures à Paris. 

  • Soins médicaux et chirurgicaux au dispensaire de Diré au Mali. Participation au dépistage et au traitement de la lèpre dans l’ensemble de la 6ème région, enquête sur la brucellose en zone sahélienne (travail de thèse), Mali (1973–1974).
  • Docteure en médecine, dont la thèse s’intitule « Contribution à l’étude de la Brucellose en zone sahélienne », université Paris VI (1975).
  • Soins médicaux et chirurgicaux en dispensaire, Debré Zeit en Ethiopie (1975–1976). Médecin de campagne dans le Gers (1977–1978).
  • Attachée-assistante en parasitologie, faculté de médecine de Rennes (1979–1981).
  • Diplôme d’études approfondies de biologie cellulaire et moléculaire, dont le mémoire s’intitulait « Isolation de cellules de Küpffer de souris et de Clethreionomis glareolus », université de Rennes (1980).
  • Attachée-assistante de parasitologie-mycologie, faculté de médecine Pitié-Salpêtrière, université Paris VI (1981–1983).
  • Assistante des universités-assistante des hôpitaux de Paris, parasitologie-mycologie, faculté de médecine Pitié-Salpêtrière (1983–1985).
  • Certificats d’études spéciales de diagnostic biologique parasitaire (1981), de cytologie et d’histologie (1979), de parasitologie générale (1981), d’immunologie et de pathologie parasitaire (1982).
  • Diplôme de mycologie médicale de l’Institut Pasteur, Paris (1984) ; certificat de mycologie médicale approfondie, Institut Pasteur, Paris (1985) ; diplôme d’enseignement et de recherche en biologie humaine « Culture des stades hépatiques des plasmodies animales et humaines », Lyon (1985).
  • Maître de conférences des universités (1986), professeure des universités de 2ème classe (2001), de 1ère classe (2007), de classe exceptionnelle (2012) à la faculté de médecine Pierre et Marie-Curie. 
  • Habilitation à diriger des recherches, université Paris VI (1987).
  • Directrice de l’unité Inserm 313 « Immunobiologie cellulaire et moléculaire des infections parasitaires » (1997–1998), succédant à Marc Gentilini, puis de l’unité 511 « Immunobiologie cellulaire et moléculaire des infections parasitaires », hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris (1999–2009).
  • Directrice du diplôme d’études approfondies « Biologie, génétique et immunologie des infections parasitaires », université Pierre et Marie-Curie (UPMC), Paris (2000–2004).
  • Création et direction du master 2 « Parasitologie/mycologie fondamentale et médicale » (master européen sciences & technologies), université Pierre et Marie-Curie depuis 2004.
  • Chef du service de parasitologie-mycologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière depuis 2007.
  • Responsable de l’équipe » Biologie et immunité, interactions cellulaires et moléculaires des infections parasitaires et fongique » au sein de l’unité mixte de recherche Inserm 945/université Pierre et Marie-Curie « Immunité et infection », dirigée par Patrice Debré, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris (2009–2010).
  • Co-directrice, avec Laurent Rénia, de l’International Associated Laboratory, associant l’unité Inserm 945 et le Biomedical Sciences Institute, Singapour (2009–2013).
  • Directrice de l’unité mixte de recherche Inserm 945/ université Pierre et Marie-Curie « Immunité et infection », hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris (2011–2014).
  • Co-responsable, avec Georges Snounou, de l’équipe « Paludisme : identification et validation pré-clinique de nouvelles cibles thérapeutiques » au sein du centre d’immunologie et des maladies Infectieuses (unité mixte Inserm 1135/UPMC UMRS CR7/équipe CNRS 8255), dirigé par Christophe Combadière, hôpital de la Salpêtrière, Paris, depuis 2014. 

Instances scientifiques et de gestion de la recherche

  • Membre de la commission scientifique spécialisée (CSS) de l’Inserm « Maladies transmissibles : recherche biologiques et physiopathologiques, recherches clinique, thérapeutique et préventive, innovation technologique » (1995–1998).
  • Experte pour la Research Initiative on Traditional Anti-Malarials depuis 1999. 
  • Experte pour le groupe protéomique et spectrométrie de masse de l’AP-HP, l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé – AFSSAPS (2001–2009).
  • Membre du comité d’interface Inserm/Société de pathologie infectieuse de langue française « Pathologie infectieuse » depuis 2003. 
  • Responsable de la plateforme de spectrométrie de masse du site de la Pitié-Salpêtrière de l’université Pierre et Marie-Curie (2005–2014).
  • Membre de la commission Inserm de recherche clinique, membre expert Inserm « Réseaux de recherche clinique et en santé des populations » depuis 2006.
  • Membre du Group of Coordination, Rationalisation, and Integration of Antimalarial Drug Discovery and Development Initiatives depuis 2009.
  • Membre du comité d’experts pour la maladie de Chagas, Institut national de veille sanitaire (InVS), depuis 2009, et pour le paludisme, compagnie Sigma Tau depuis 2010.
  • Membre du conseil national des universités, section microbiologie, maladies transmissibles et hygiène (2010–2012).
  • Membre expert en parasitologie du groupe biologie de la commission médicale d’établissement (2010–2014).
  • Membre du comité de direction du centre national de référence du paludisme, depuis 2012.
  • Membre expert pour les 5ème, 6ème et 7ème programmes-cadre de recherche et de développement (PCRD) de la communauté européenne.
  • Membre expert pour les Centers of Excellence in Translational Research du National Institute of Infectious diseases, National Institutes of Health, Bethesda, Etats-Unis.
  • Correspondant France métropole-OMS pour la maladie de Chagas.
  • Représentante de l’Inserm (paludisme) dans la mise en place du projet européen « Establishment of an European Developping Countries Clinical Trials Programme for Poverty Reated Diseases » (HIV/AIDS, Malaria, tuberculose).
  • Représentante de l’Inserm dans les réunions de l’Alliance franco-britannique pour la médecine tropicale.