Brigitte Kieffer

Remarque : ces contenus ont été récupérés automatiquement depuis l’ancien site « Histoire de l’Inserm » (http://histoire.inserm.fr) et n’ont pas été modifiés depuis.

Les travaux de Brigitte Kieffer concernent les mécanismes du cerveau intervenant dans le contrôle de la douleur et des processus de récompense. Elle a exploré les récepteur aux opiacés qui, dans le cerveau, permettent à des drogues comme la morphine, l’héroïne et d’autres composés, d’exercer un effet antalgique, mais aussi de créer une addiction. Ses travaux ont des implications dans les domaines de la douleur, des addictions, des troubles de l’humeur et d’autres maladies mentales, dont l’autisme.

Dans les années 1990, elle a allié ses connaissances en pharmacologie et en biologie moléculaire pour isoler le premier gène d’un récepteur aux opiacés. Ce résultat ouvrait voie à un pan entier de recherche en neurosciences et pharmacologie moléculaire. Elle a ensuite développé des approches génétiques pour comprendre le rôle de ces récepteurs dans le cerveau. Des lignées de souris mutantes déficientes en récepteurs opiacés (les récepteurs mu, delta et kappa) ont été générées. Ce type de modèle murin permet d’établir un lien causal direct entre le dysfonctionnement d’un gène et un dysfonctionnement physiologique dans l’organisme entier. Avec ses collaborateurs, elle a analysé le comportement de ces souris et obtenu des résultats majeurs sur le rôle de ces récepteurs. Ainsi, les trois récepteurs aux opiacés diminuent la douleur et chacun d’une manière différente. Le récepteur mu est responsable à la fois des actions analgésique et euphorisante de la morphine, qui sont donc indissociables. Ce récepteur, également appelé le récepteur de la récompense, est également responsable des effets euphorisants de la plupart des drogues d’abus, licites ou illicites, ainsi que de stimulations euphorisantes naturelles comme celles produites par l’interaction sociale. Cette observation aura une incidence sur la compréhension de certaines formes d’autisme. Enfin, le récepteur delta contrôle les réponses émotionnelles et son activation a des effets anxiolytiques et antidépresseurs. La découverte de cette fonction nouvelle pour un récepteur aux opiacés est à l’origine de plusieurs programmes menant à des essais cliniques. 

Il est maintenant établi que les récepteurs aux opiacés font partie de la grande famille des récepteurs couplés aux protéines G (RCPG), qui comporte environ 400 gènes dans le génome humain, sans compter les récepteurs olfactifs. Cette famille de récepteurs est essentielle dans le domaine de la santé, puisque la moitié des médicaments commercialisés à ce jour sont des activateurs ou inhibiteurs de RCPG. Au cours des 20 années passées, son équipe a également utilisé les récepteurs aux opiacés comme système modèle pour l’étude des RCPG. En particulier, un modèle murin a été créé, dans lequel le récepteur delta est remplacé par un récepteur delta fluorescent parfaitement fonctionnel, qui permet donc de visualiser directement ce récepteur chez l’animal. Cet outil a permis d’identifier précisément les neurones qui portent les récepteurs, de voir en temps réel le récepteur se déplacer et se cacher à l’intérieur de la cellule après qu’il ait été activé par la drogue ou le ligand endogène. Ces travaux ont permis d’expliquer certaines formes de tolérance et, enfin, de démontrer à quel point l’activation naturelle par un neurotransmetteur diffère de l’activation artificielle par un médicament. 

Aujourd’hui, toujours à l’aide de manipulation du génome de la souris, elle explore également la fonctionnalité de gènes non annotés du génome, codant pour des récepteurs orphelins dont la fonction reste inconnue à ce jour. Elle espère établir un lien de causalité entre la fonction des gènes codant pour les récepteurs aux opiacés ou certains récepteurs orphelins et leur activité sur la connectivité fonctionnelle du cerveau en activité. 

Brigitte Kieffer est actuellement directrice du centre de recherche de l’Institut Douglas, à l’université McGil, Montréal, Canada. Elle a reçu plusieurs prix prestigieux, dont le prix international « Pour les femmes et la science » l’Oréal-Unesco en 2014. 

Biographie

Brigitte Kieffer est née le 26 février 1958 à Clichy-La-Garenne (Hauts-de-Seine). Elle a mené ses études secondaires à Saint-Louis (Haut-Rhin) et ses études supérieures à l’université de Strasbourg. 

  • Étudiante en thèse, université Louis-Pasteur, Strasbourg (1981).
  • Post-doctorat, Institut Friedrich-Miescher, Bâle, Suisse (1986).
  • Maître de conférences, école supérieure de biotechnologie, université Louis-Pasteur, Strasbourg (1989). Professeur des universités de 2ème classe, spécialité Sciences du médicament (1994), de 1ère classe (2003), à la faculté de pharmacie, université Louis-Pasteur, Strasbourg.
  • Membre junior de l’Institut universitaire de France (1994).
  • Directrice de recherche de 1ère classe (détachement, 2006, intégration, 2008), directrice de recherche de classe exceptionnelle (2011) à l’Inserm.
  • Professeure invitée à l’université de Californie de Los Angeles, Etats-Unis depuis 1998.
  • Directrice de l’unité Inserm 964, Institut de génétique et de biologie moléculaire (IGBMC), Strasbourg (2013).
  • Professeure, département de psychiatrie et titulaire de la chaire Monique H Bourgeois de recherche sur les troubles envahissants du développement, faculté de médecine de l’université McGill, Montréal, Québec, Canada depuis 2014. 
  • Directrice du centre de recherche de l’Institut Douglas (institut universitaire en santé mentale), université McGill, Montréal, Québec, Canada depuis 2014. 

Sociétés savantes – Académies 

  • Membre de l’Organisation européenne de biologie moléculaire – EMBO (2009).
  • Membre de l’Académie des sciences (2013).

Prix et distinctions 

  • Prix Jules-Martin de l’Académie des sciences, Institut de France (2001).
  • Prix Lounsbery décerné conjointement par les Académies des sciences des Etats-Unis et de France (2004).
  • Grand Prix Lamonica de neurologie de l’Académie des sciences, Institut de France (2012).
  • Chevalier de la Légion d’honneur (2012).
  • Prix international « Pour les femmes et la science » l’Oréal-Unesco (2014).