Bernard Halpern

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Dès 1934–1935, en étudiant les venins de serpents, Bernard Halpern s’intéresse aux médiateurs chimiques produits par l’organisme (endogènes). Il suggère que le venin de vipère agit par libération de l’histamine endogène. Ainsi, dès 1935, il pressent que certains processus pathologiques relevaient d’un mécanisme indirect impliquant la mise en liberté de substances toxiques contenues normalement dans les cellules. Par des manipulations in vitro, il étudiera, plus tard le mécanisme de l’anaphylaxie (phénomène d’hypersensibilité). 

Dans les laboratoires de Rhône-Poulenc, Bernard Halpern se consacre essentiellement à l’étude des applications thérapeutiques des anti-histaminiques. En 1937, Bovet et son assistant Staub, travaillant à l’Institut Pasteur, avait rapporté l’action de dérivés de la diéthylamine, préalablement synthétisés par Fourneau, qui s’opposait à certaines actions de l’histamine. En raison de leur très mauvaise tolérance à faible dose, tant chez l’homme que chez l’animal, les recherches avaient alors été abandonnées. 

En 1942, il démontre l’utilité anti-allergique de l’Antergan®, premier anti-histaminique utilisé en clinique humaine. Il en étudie le rôle dans le traitement de diverses formes d’allergie.

En 1942, Rhône-Poulenc développe l’Antergan®, dont Bernard Halpern en étudie, notamment sur le plan clinique, les propriétés anti-histaminiques et anti-anaphylactiques et le rôle des anti-histaminiques dans le traitement de diverses formes d’allergie. En 1945–1946, il décrit les propriétés physiologiques et les effets thérapeutiques des dérivés de la phénothiazine et, en particulier, ceux du Phénergan®. Par ailleurs, il montre que ces substances ont une action sédative sur le système nerveux central, en relation avec leur action adrénolytique et anti-histaminique centrale. 

C’est l’époque des débuts de la pharmacologie où la France est alors au plus haut. Dans cette période bouillonnante, au début de l’ère thérapeutique, Bernard Halpern sera un acteur majeur qui contribuera largement au succès et à la place de son pays dans cette compétition en voie d’émergence.

Dans le laboratoire de Pasteur-Vallery-Radot, il travaille ensuite sur l’anaphylaxie et les problèmes d’hypersensibilité, ce qui le conduit à étudier des mécanismes généraux de l’immunité. Il montre ainsi que les phénomènes immunitaires et les phénomènes d’hypersensibilité relèvent du même mécanisme fondamental : “Dans un premier stade, il y a reconnaissance, par certaines cellules spécialisées, de la nature hétérologue (étrangère à l’organisme) de la substance ou de la cellule (greffe). Cette information est transmise à d’autres populations cellulaires qui réagissent par l’élaboration de globulines spéciales appelées anticorps”.

En 1950, Bernard Halpern fait des recherches expérimentales sur l’équilibre hydrique avec Jean Hamburger. Son activité clinique et ses travaux de recherche se déroulent alors à l’hôpital Broussais où il accueille, dans son service de clinique des maladies allergiques, des élèves du monde entier et diversifie ses travaux de recherche. Parmi ses proches collaborateurs, on peut citer Alain Zweibaum, Guido Biozzi, Claude Stiffel et Baruj Benacerraf, futur prix Nobel, qui retournera aux États-Unis après avoir passé huit ans chez Bernard Halpern. 

Entre 1951 et 1959, c’est avec eux que Bernard Halpern travaille sur le système réticulo-endothélial. Ce dernier a comme activité essentielle la phagocytose qui aide à la lutte de l’organisme contre l’invasion microbienne, mais qui contribue également à débarrasser l’organisme des déchets cellulaires. Il tente de mieux comprendre ce phénomène, de façon expérimentale, afin de connaître les lois qui le régissent ainsi que ses réactions et ses responsabilités dans certaines maladies. 

Le rôle de l’histamine dans les réactions d’hypersensibilité a été le fondement de ses recherches au cours des années 1950–1965. Bernard Halpern remet en cause les théories de Franck Burnet, co-lauréat du prix Medawar pour le prix Nobel, selon lesquelles la définition individuelle de tolérance immunitaire (reconnaissance du soi et rejet du non-soi) est due au fait que les populations cellulaires compétentes, capables d’induire la formation 

d’anticorps contre les éléments propres de l’organisme, s’éteignent au moment de la naissance, en ne laissant que des clones cellulaires qui sont capables de reconnaître les éléments antigéniques. 

De 1960 à 1976, une des lignes de recherche les plus importantes de Bernard Halpern concerne le sérum anti-lymphocytaire, destiné à pallier le problème de rejet des greffes. En 1964, il découvre la tendance des cellules cancéreuses à s’agglomérer en tumeur dans un organisme en mouvement. 

Bernard Halpern fut un grand savant et un grand médecin. Homme d’une générosité exceptionnelle, ses travaux eurent toujours pour objectif premier de soulager les souffrances humaines. Malgré les drames historiques dont il fut le témoin et la victime, depuis les persécutions tsaristes jusqu’à l’occupation nazie, il ne se départit jamais de son idéal scientifique et médical et d’un profond humanisme. 

Biographie

Bernard Halpern est né en 1904 à Tarnos-Ruda, en Ukraine, dans une famille juive de huit enfants. Il apprend, dans sa famille, le polonais, le russe, le yiddish et l’hébreu. Un prêtre de l’église uniate enseigne, en cachette, à cet élève surdoué le latin, l’allemand, le français et les mathématiques. En 1915, il est déporté avec les siens en Sibérie dans un camp de travaux forcés. Libérée par les bolchéviques, la famille Halpern rentre en Ukraine en 1917. En 1920, lors d’un pogrom, leur village est alors dévasté par une bande de cosaques auxquels le jeune Halpern parvient à échapper. Il monte dans un train de prisonniers allemands qui rentrent chez eux et rejoint seul, à 16 ans, la Pologne où il s’installe sans papiers ni argent. Il achève ses études secondaires, vivant de leçons données à ses camarades. Après son baccalauréat, un visa pour la France en poche, il s’installe d’abord à Nancy, en 1925, où il s’inscrit à la faculté de médecine. En 1928, il vient poursuivre ses études à Paris. 

  • Externe des hôpitaux de Paris (1929), il travaille en parallèle dans le laboratoire de biologie expérimentale du professeur Jean Gautrelet à la faculté de médecine de Paris, dont il en devient rapidement un des principaux collaborateurs.
  • Certificat de physiologie générale à la faculté des sciences de Paris, chargé de cours à l’École pratique des hautes études (1932).
  • Docteur en médecine de la faculté de médecine de Paris, sa thèse porte sur le venin de vipère, médaille d’argent (1936).

Ne pouvant prétendre à une carrière académique au sein de l’université, du fait d’une réglementation qui requiert cinq années de résidence après la naturalisation, il débute sa carrière dans les laboratoires de recherche de la société Rhône-Poulenc comme directeur de recherche en pharmacologie, sous la direction du professeur Marcel Delépine (1937).

En 1940, Bernard Halpern doit quitter Paris et se réfugier en zone sud, où il exerce la médecine générale dans un village de l’Ardèche jusqu’à ce que la législation de Vichy le lui interdise. En 1942, il trouve à nouveau refuge dans les laboratoires de Rhône-Poulenc nouvellement installés à Lyon, en zone libre. Il démontre l’utilité anti-allergique de l’Antergan®, découverte qui attire l’attention des autorités allemandes, car ces substances permettent également de prolonger la durée de vie des poches de transfusion sanguine. Bernard Halpern parvient cependant à leur échapper en se réfugiant en Suisse avec sa femme et ses enfants. Maître de recherche au CNRS dans le laboratoire de Pasteur-Vallery-Radot à l’hôpital Broussais à Paris (1945).

  • Chef de laboratoire à la faculté de médecine de Paris (1947).
  • Directeur de recherche au CNRS (1948), puis directeur d’études à l’École pratique des hautes études.
  • Directeur à l’École pratique des hautes études (1959).
  • Directeur du groupe de recherches allergiques et immunologiques INH/Association Claude-Bernard à l’hôpital Broussais, Paris (1960–1964).
  • Directeur de l’unité Inserm 20 de recherches en immunobiologie à la création de l’Institut (1965–1976).
  • Elu à la chaire de médecine expérimentale au Collège de France, occupée précédemment par François Magendie, Claude Bernard, Charles Nicolle et René Leriche (1961).

Bernard Halpern est décédé à Paris, le 23 septembre 1978. 

Instances scientifiques et de gestion de la recherche

  • Membre de la commission de médecine du CNRS (1959).
  • Membre du secrétariat général de la recherche scientifique et technique à la Délégation générale à la recherche scientifique et technique (DGRST).
  • Membre de la commission scientifique spécialisée (CSS) de l’Inserm “Génétique, immunologie et pathologie moléculaire” (1964–1967), du conseil scientifique de l’Inserm (1964–1967), de la CSS “Génétique, immunologie et pathologie moléculaire” (1968–1974).

Sociétés savantes – Académies 

Membre de l’Académie de médecine et de l’Académie des sciences – Institut de France (1964).

Distinction – Prix 

  • Médaille d’argent de la faculté de médecine de Paris(1936).
  • Prix Louis (1945) et Prix Jansen (1946) de l’Académie de médecine.
  • Prix Montyon de physiologie (1945), Prix Roy Vaucouloux de l’Académie des sciences – Institut de France (1956).
  • Médaille d’argent du CNRS (1956), médaille d’or du CNRS (1971).
  • Chevalier de l’ordre de la santé publique (1959). Officier dans l’Ordre national du mérite, commandeur de la Légion d’honneur. 

Hommages à Bernard Halpern

  • Tous les deux ans, un symposium d’immunologie Bernard Halpern rend hommage à cette immense personnalité (Collège de France symposium 2008).
  • Le prix Bernard-Halpern, créé par Renée Halpern, son épouse, a été décerné annuellement entre 1979 et 2000.
  • Un timbre-poste à l’effigie de Bernard Halpern a été frappé en 1987, qui fait partie d’une série sur les savants français.
  • Une place à Paris, dans le 5e arrondissement, porte son nom, ainsi qu’une avenue à Créteil, sans compter une rue au Mesnil-Théribus (dans l’Oise) où est située la maison de campagne à laquelle il était très attachée.