Patrick Collombat:La guérison du diabète de type 1 à portée de main ?

Voilà près de 20 ans que Patrick Collombat se consacre à l’étude du pancréas. Dans son viseur : le diabète de type 1, une forme de diabète dans laquelle les cellules qui produisent l’insuline sont détruites. Aujourd’hui, le chercheur et son équipe suivent une piste prometteuse : celle du GABA. Ce composé naturel permettrait de régénérer sans danger les cellules absentes. La perspective d’un traitement curatif se dessine...

Patrick Collombat

Votre intérêt pour la physiopathologie du diabète ne vous a pas quitté depuis le début de votre carrière ?

En effet ! J’ai commencé à me pencher sur le fonctionnement du pancréas et sur la maladie diabétique en 1999, dans le cadre de mes travaux de thèse, à l’Institut Max Planck de Goettingen (Allemagne). En 2009, j’ai pu rejoindre l’Institut de biologie Valrose, à Nice, pour y établir une équipe de recherche dédiée. Mon objectif : trouver un moyen de régénérer les cellules pancréatiques bêta, ces cellules qui produisent l’insuline, permettant de réduire le taux de sucre dans le sang, mais qui sont détruites chez les patients atteints de diabète de type 1. Et c’est ce que nous avons réussi à obtenir dès 2009. 

Quel est le mécanisme permettant au pancréas de s’autorégénérer ?

L’organe comporte des cellules bêta mais aussi des cellules alpha. Ces dernières produisent le glucagon qui augmente quant à lui le taux de sucre dans le sang en cas de besoin. Ces deux types de cellules sont structurellement assez proches, mais nous avons identifié un élément clé les distinguant : l’expression d’un gène maître, Pax4, dans les cellules bêta. Or, lorsqu’on induit l’expression de Pax4 dans les cellules alpha, elles se transforment en cellules bêta et se mettent à produire de l’insuline. 

Après avoir observé cet effet chez la souris, nous voulions étudier la faisabilité de cette stratégie chez l’homme. Bien sûr, il n’était pas possible de passer par une modification génétique comme nous l’avions fait chez la souris. Nous avons donc recherché une molécule qui mimerait l’effet de l’activation de Pax4. En collaborant avec plusieurs équipes internationales, nous avons criblé des milliers de molécules et finalement identifié le GABA, un neurotransmetteur parfois utilisé comme complément alimentaire. Chez la souris, il favorise effectivement la transformation des cellules alpha en cellules bêta. Parallèlement, pour pallier le manque en cellules alpha, l’organisme en produit de nouvelles qui sont à nouveau converties en cellules bêta. Au global, la production de nouvelles cellules bêta est continue mais contrôlable, sans effet d’emballement.

Les perspectives sont-elles prometteuses à court terme pour l’homme ?

Oui : nous allons démarrer un premier essai thérapeutique. Il évaluera la capacité du GABA à régénérer les cellules pancréatiques chez 80 adultes souffrant de diabète de type 1. Cet essai nous permettra en outre de nous assurer de l’innocuité de la molécule et de déterminer, le cas échéant, la posologie la plus efficace. 

Les conclusions de cette étude seront disponibles fin 2019. Elles constitueront l’aboutissement de près de 10 années de recherche dans lesquelles le financement du Conseil européen de la recherche (ERC Starting Grant) a été déterminant. Grâce au 1,5 millions d’euros que nous avons obtenu en 2011, nous avons en effet pu renforcer notre équipe. L’ERC est aussi un label d’excellence qui nous a permis d’être reconnu sur le plan international, d’initier des collaborations importantes et de décrocher de nouveaux financements. Un cercle vertueux qui accélère le rythme des découvertes et apporte in fine un espoir pour tous les patients souffrant de diabète de type 1… 

En savoir plus sur Patrick Collombat et ses travaux

Patrick Collombat dirige l’équipe Génétique du diabète au sein de l’unité 1091 Inserm/CNRS/Université de Nice, à l’Institut de biologie Valrose (Nice).

Patrick Collombat – interview – 2 min 41 – vidéo extraite de la série Rêves de recherche, rêve de chercheurs (2009–2010)

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