Séries illimitées – C’est quoi les anticorps monoclonaux ? 🏭🇾🇾🇾🇾

Quand on a façonné un outil qui fonctionne à merveille, on a forcément envie de le reproduire à l’infini pour qu’il puisse servir au plus grand nombre ! C’est l’idée des chercheurs qui ont développé la production des anticorps monoclonaux, des anticorps sélectionnés pour leur efficacité à cibler un intrus spécifique, reproduits en laboratoire en grande quantité pour pouvoir être administrés à ceux qui en ont besoin.

Soigner grâce aux anticorps de personnes immunisées contre un agent infectieux ou une substance toxique n’est pas une idée nouvelle : la sérothérapie, c’est-à-dire l’administration thérapeutique de sérum sanguin prélevé à des personnes guéries d’une maladie, s’est développée dès la fin du 19e siècle. Mais avec cette approche, on a recours à un mélange d’anticorps : ceux dont on attend un bénéfice, et beaucoup d’autres qui sont également présents dans le sérum... Pour améliorer l’efficacité de cette stratégie, l’idéal est de pouvoir disposer uniquement des anticorps les plus efficaces et, tant qu’à faire, en quantité illimitée ! C’est précisément ce à quoi nous sommes finalement parvenus avec la mise au point de la production d’anticorps monoclonaux, une avancée scientifique récompensée en 1984 par le prix Nobel de médecine.

Si l’ensemble des étapes nécessaires à l’obtention de ces biomédicaments n’est pas simple à mettre en œuvre, la technique est aujourd’hui bien maîtrisée. Pour commencer, il faut identifier l’anticorps que l’on souhaite fabriquer. Confronté à un intrus à éliminer, notre organisme en produit en effet un grand nombre : ils vont tous s’attaquer au problème, mais pas de la même façon. Certains seront très efficaces, d’autres moins. La production d’anticorps monoclonaux thérapeutiques nécessite donc en premier lieu d’isoler le meilleur anticorps pour lutter contre la maladie à soigner. La deuxième étape consiste ensuite à trouver les cellules immunitaires qui produisent cet anticorps performant. Il s’agit de lymphocytes B tous rigoureusement identiques entre eux sur le plan génétique, autrement dit, un clone de lymphocytes B [Eh oui ! En biologie, un clone est un ensemble d’individus parfaitement identiques, et non pas un individu identique à un autre comme c’est le cas dans le langage courant 🤓]. Le gène qui code pour l’anticorps d’intérêt est alors isolé du génome des lymphocytes B et intégré dans celui de cellules « usines », spécialement cultivées en laboratoire pour permettre la production massive de protéines à visée thérapeutique. 

Une trentaine d’anticorps monoclonaux – que l’on nomme donc ainsi car ils sont au départ synthétisés par un clone unique de lymphocytes B – sont actuellement autorisés en France. Ils sont utilisés pour le traitement de cancers, du rejet de greffe ou encore de maladies inflammatoires chroniques comme la maladie de Crohn ou la polyarthrite rhumatoïde. Mais cette approche est en cours de développement pour de nombreuses autres maladies, parmi lesquelles la Covid-19. Depuis le printemps 2020, de nombreuses équipes scrutent les anticorps de patients guéris d’une infection par le SARS-CoV‑2, à la recherche d’anticorps neutralisants, capables d’empêcher le virus d’infecter nos cellules. Plusieurs ont été identifiés et ont donné lieu à la production d’anticorps monoclonaux qui font désormais l’objet d’essais cliniques, en prévention ou en traitement de la Covid-19. l’Inserm coordonne un de ces essais : l’efficacité d’une combinaison de deux anticorps monoclonaux – qui reconnaissent chacun une partie de la protéine Spike, porte d’entrée du SARS-CoV‑2 dans nos cellules – est évaluée pour limiter la sévérité de l’infection chez des patients qui présentent un risque d’évolution vers une forme grave de la Covid-19. Pour en savoir plus sur cet essai clinique

A lire aussi : 

🔹 L’espoir des anticorps antiviraux dans la lutte contre le Covid-19 (The Conversation, août 2020)

🔹 Un numéro spécial de la revue médecine/sciences (décembre 2019), consacré aux anticorps monoclonaux en thérapeutique