VIH : démarrer le traitement antirétroviral au plus tôt

Une étude récente confirme l’intérêt de démarrer le plus tôt possible une multithérapie après une contamination par le VIH : Plus ce délai est court, plus le réservoir viral est faible à court, à moyen et à long terme, gageant d’un meilleur pronostic pour le patient.

Les médecins le disent et le répètent, plus un traitement antirétroviral contre l’infection par le VIH est précoce, plus il est efficace. En voilà une nouvelle preuve, grâce à l’étude d’une équipe Inserm*, menée chez 327 patients de la cohorte ANRS CO6 PRIMO. Les auteurs viennent de confirmer que plus la mise en œuvre du traitement est rapide après la contamination, y compris dans la fenêtre de trois mois suivant la primo-infection, plus le réservoir viral mesuré dans les cellules de type lymphocyte T CD4 est faible, à court, moyen et long terme. 

Calculer la date d’initiation du traitement

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© Inserm, Institut Curie, R. Gaudin, P/ Bernaroch Macrophages infectés par le VIH. Les protéines virales sont en vert, les microbules en rouge et les noyaux en bleu. Taille des noyaux : 5µm. Photographie réalisée dans l’unité 932 

La multithérapie antirétrovirale empêche efficacement la réplication du virus, mais elle ne permet pas de déloger le virus des cellules hôtes. En effet, le VIH persiste dans l’organisme, intégré dans l’ADN de certaines cellules. Il peut se maintenir ainsi sous forme latente pendant des années, notamment dans les lymphocytes T CD4, puis se remettre à proliférer, par exemple lors d’une interruption de traitement, explique Laurence Meyer, coauteure de ces travaux. La taille de ce réservoir viral est corrélée au risque de complications et au pronostic de la maladie : il est donc important de la réduire au maximum ».

Pour évaluer l’impact de la précocité d’une multithérapie sur la taille de ces réservoirs, les auteurs ont calculé le délai de mise en œuvre du traitement chez des patients inclus dans la cohorte ANRS CO6 PRIMO, une des plus grandes cohortes au monde de sujets infectés par le VIH depuis moins de trois mois (primo-infection). Pour cela, ils ont estimé la date de l’infection par rapport au moment d’apparition des premiers symptômes cliniques (en général des signes de type pseudo-grippaux), ou par rapport aux résultats des tests de confirmation de l’infection chez les personnes asymptomatiques. Ils ont ainsi identifié les patients mis sous trithérapie 15 jours après l’infection, un mois après, un mois et demi après, deux mois après et enfin trois mois après. 

Des réservoirs sensibles à la précocité du traitement

La quantité de réservoir viral présent dans l’organisme de ces patients a été régulièrement évaluée pendant toute la durée de leur traitement (jusqu’à plus de 16 ans pour certains patients). Pour ce faire, les auteurs ont mesuré leur taux de cellules hébergeant le VIH à partir d’échantillons sanguins. Enfin, ils ont corrélé les résultats selon le délai d’initiation du traitement. 

En confrontant ces données au délai de mise en œuvre du traitement, les chercheurs ont obtenu un résultat sans équivoque : le réservoir viral décroit d’autant plus vite au cours des premiers mois de traitement que celui-ci a été démarré tôt après la contamination. De plus, il reste ensuite d’autant plus bas (tant que le traitement est poursuivi). « Ce résultat est très important. Plus le réservoir est faible, et plus nous pouvons nous attendre à une moindre inflammation systémique et à des risques de complications plus faibles. C’est ce que nous sommes en train de vérifier », précise Laurence Meyer. Les chercheurs explorent en outre, dans des cadres expérimentaux très précis, la possibilité de réduire le traitement, voire de l’interrompre, chez certains patients présentant des marqueurs très favorables (taux de CD4 très élevé, durée de traitement longue ou encore de réservoir faible). Mais à ce jour, le mot d’ordre reste : « Pas d’interruption de traitement en dehors d’essais cliniques très cadrés, sous peine de réactivation de la maladie », prévient la chercheuse. 

Quoi qu’il en soit, les résultats de cette étude fournissent des arguments supplémentaires pour un diagnostic de l’infection le plus précoce possible après la contamination et une prise en charge thérapeutique très rapide.

Note

* Unité 1018 Inserm/Université Paris sud, Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations, Villejuif 

Source

M. Laanani et coll. Impact of the earliness of antiretroviral therapy initiation during primary HIV‑1 infection on the decay of cell-associated HIV DNA. Clin Infect Dis, édition en ligne du 3 mars 2015