La thérapie anti-VIH augmente le risque d’ostéoporose

Des inhibiteurs de protéases intégrés dans les trithérapies anti-VIH accélèrent le vieillissement des cellules souches de la moelle osseuse et perturbent leur différenciation en ostéoblastes, les cellules responsables de la formation de l’os. Un phénomène qui explique en partie le risque accru d’ostéoporose chez les patients.

Les inhibiteurs de protéases présents dans les trithérapies anti-VIH favorisent bien la perte de densité osseuse chez les patients. C’est ce que vient de montrer une équipe Inserm* qui s’est penchée sur l’impact de ces molécules sur des cellules souches osseuses. 

De manière générale, les personnes sous thérapies anti-VIH présentent de plus en plus souvent et de façon pus précoce des complications cardiaques, hépatiques, cérébrales ou encore osseuses classiquement associées à l’âge. Au niveau de l’os, cela se manifeste par une perte précoce de la densité osseuse avec un risque accru d’ostéoporose, et donc de fractures du poignet, de la hanche ou encore des vertèbres comme cela s’observe généralement chez les personnes âgées. Cette complication concerne 15 % des patients alors qu’ils ont le plus souvent moins de 50 ans ! 

La preuve in vitro

Les inhibiteurs de protéases intégrés dans la trithérapie sont montrés du doigt. De précédents travaux ont permis de constater une association entre le mise en route de ce traitement et la perte de densité osseuse, sans que les mécanismes en soient connus. Pour clarifier ce lien, les chercheurs d’une équipe Inserm ont travaillé sur des cellules souches de la moelle osseuse. Ces cellules souches, dites mésenchymateuses, sont les précurseurs des ostéoblastes qui assurent le renouvellement de l’os. Les chercheurs les ont cultivées en les exposant à des inhibiteurs de protéases tels que retrouvés dans les trithérapies : atazanavir ou lopinavir avec ou sans ritonavir. 

Après 30 jours de culture, les chercheurs ont constaté une série d’événements associés à un vieillissement accéléré et une moindre différenciation des cellules souches en ostéoblastes. Ces cellules perdent leur capacité de prolifération et de différenciation et présentent également un stress oxydant et une accumulation d’une protéine, la prélamine A farnésylée, toxiques pour la cellule et associés au vieillissement cellulaire. 

Des antidotes disponibles

Les chercheurs sont parvenus à bloquer ce phénomène en utilisant une molécule qui empêche l’accumulation de prélamine A farnésylée. Il s’agit d’une statine (pravastatine) couramment utilisée par les patients qui présentent par ailleurs certains facteurs de risque cardiovasculaire. Les biphosphonates pourraient également permettre d’obtenir le même effet compte tenu de leur capacité à éliminer la prélamine A farnésylée. « Des pistes à envisager sur le plan thérapeutique », conclut Claire Lagathu, coauteur des travaux. 

Note :
* Unité 938 Inserm, Centre de Recherche Saint Antoine, Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Paris 

Source : 
Hernandez-Vallejo et coll. HIV protease inhibitors induce senescence and alter osteoblastic potential of human bone marrow mesenchymal stem cells : beneficial effect of pravastatin. Aging Cell, édition en ligne du 25 juin