Les prébiotiques préviennent les allergies alimentaires

La consommation prébiotiques, des sucres qui favorisent la croissance des bactéries, permet de modifier la composition de la flore intestinale et d’améliorer la tolérance du système immunitaire vis-à-vis d’allergènes. Chez la souris, cette approche a permis de réduire le risque d’allergie au blé. Les chercheurs à l’origine de ce travail veulent maintenant tenter l’expérience chez l’Homme, pour réduire celui de dermatite atopique

La flore intestinale est une pièce maîtresse de l’immunité : sa composition influe sur la qualité du système immunitaire, sur son efficacité, et donc sur le contrôle des allergies. Mais jusque-là, les études visant à modifier le microbiote intestinal en utilisant des probiotiques n’ont pas permis de lutter contre la progression des allergies… C’est pourquoi une autre idée fait son chemin : utiliser des prébiotiques, des « aliments pour bactéries » qui favorisent leur croissance. 

L’objectif est de modifier la flore intestinale plus subtilement que par l’introduction de telle ou telle souche, et cela de façon très précoce. L’idéal est d’intervenir avant la naissance et pendant les premiers mois de la vie pour réussir à prévenir le risque d’allergies survenant généralement lors des toutes premières années. 

Rééquilibrer le microbiote

« L’évolution de nos modes de vie a modifié en profondeur notre rapport global aux microbes ‑alimentation pasteurisée, hygiène importante, enfants très protégés...- de sorte que notre microbiote, c’est-à-dire l’ensemble des bactéries qui colonisent notre corps (nos intestins, notre peau...) a également évolué. Et cette évolution s’est accompagnée d’une recrudescence des cas d’allergies depuis la fin du 20e siècle. Aujourd’hui, 8% des enfants et 2% des adultes présentent des allergies alimentaires. Cette progression s’explique par une baisse de la capacité du système immunitaire à tolérer des aliments théoriquement inoffensifs. En intervenant sur la composition du microbiote, nous aimerions corriger cela », clarifie Antoine Magnan*, coauteur de ces travaux. 

Des sucres pour les bactéries

Pour tester l’efficacité des prébiotiques, les chercheurs ont quotidiennement administré un complément en sucres (galacto-oligosaccharides et inuline) à des souris en gestation, puis pendant la phase d’allaitement des souriceaux. Trois semaines après le sevrage des petits, ces derniers ont été exposés à des protéines de blé potentiellement allergisantes. Les chercheurs ont alors constaté que les souriceaux nés de mères qui avaient reçu les prébiotiques réagissaient moins que les autres aux allergènes.

Chez les animaux allergiques, les symptômes étaient minimes, associés à des taux bas d’histamine et d’IgE typiques de l’allergie. Par ailleurs, les auteurs ont constaté un rétablissement de la fonction immunitaire en faveur de l’expression de lymphocytes T régulateurs impliqués dans la tolérance aux substances exogènes. « L’ajout de prébiotiques a donc considérablement réduit la sévérité des allergies », résume Antoine Magnan. 

Bientôt chez l’homme

Les auteurs entendent maintenant aller plus loin : L’équipe a soumis une demande de projet hospitalier de recherche clinique (PHRC) afin de mener l’expérience chez 500 à 1 000 femmes présentant un risque de transmission d’allergie à leur enfant en raison d’antécédents personnels ou familiaux. Elles recevront des prébiotiques en gélules pendant toute leur grossesse puis pendant l’allaitement. Et si l’enfant n’est pas allaité, le complément sera ajouté dans son lait de substitution. Les auteurs évalueront l’incidence et la sévérité des dermatites atopiques chez ces enfants. L’essai devrait démarrer en 2016, avec des résultats attendus deux ans plus tard. 

Note

*unité 1087 Inserm/CNRS/Université de Nantes, Institut du thorax, Nantes 

Source

G. Bouchaud et coll. Maternal exposure to GOS/Inulin mixture prevents food allergies and promotes tolerance in offspring in mice. Allergy, édition en ligne du 1er octobre 2015