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La règle des 3 R : réduire, raffiner, remplacer

Élaborée en 1959, elle constitue le fondement de la démarche éthique appliquée à l’expérimentation animale en Europe et en Amérique du Nord.

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Après avoir gradué les souffrances subies par les animaux en expérimentation dans les laboratoires anglais, W.M.S. Russell et R.L. Burch ont développé un programme de mise en place et de développement de lignes directrices dites « humaines « , appelé la « règle des 3 R » et comprenant les points suivants : 

  • Reduce (Réduire) le nombre d’animaux en expérimentation
  • Refine (Raffiner) la méthodologie utilisée, ce qui implique la notion de points limites (critères d’interruption, ou « end-points » )
  • Replace (Remplacer) les modèles animaux.

Ce concept a été progressivement adopté par diverses institutions pour fixer des lignes de conduite pour l’expérimentation animale : le Conseil Canadien de Protection des Animaux, le Département américain chargé de l’agriculture (Animal Welfare Act), et le gouvernement britannique (Home Office). Il a été introduit dans la réglementation par : 

  • le Conseil de l’Europe (convention STE N° 123)
  • l’Union européenne (directive n° 2010/63/UE)
  • et la France (décret n° 2013-118 ; les arrêtés du 1er février 2013) ; 10 mesures visant à mettre en place une véritable politique de l’expérimentation animale dans les organismes publics de recherche (décret n° 2001 – 464 ; décret n° 2001 – 486).

Références : J. Richmond. The 3Rs-Past, present and future. Scand J Lab Anim Sci 2000, 27, 84- 92 – Veissier I. Expérimentation animale : biologie, éthique, réglementation. Prod Anim 1999, 12, 365 – 375

Réduire

Cet objectif, initialement de bonnes pratiques en expérimentation animale, a, depuis Russell et Burch, été introduit dans la réglementation. Il figure à titre de recommandation dans le préambule de la convention STE123 et de la directive 2010/63/UE ainsi que dans leur traduction en droit français. 

Utiliser moins d’animaux en expérimentation peut être réalisé par différentes voies : 

  • limitation aux seules expériences considérées comme absolument indispensables,
  • réduction des répétitions inutiles. Il ne s’agit pas ici d’aller à l’encontre d’un des principes fondamentaux de la méthode expérimentale qui exige la confirmation de résultats originaux par des pairs indépendants, mais d’éviter la répétition d’études antérieures, faites dans un autre pays et destinées à répondre à des exigences législatives/réglementaires nationales ou communautaires (directive n° 86/609/CEE) en vue d’une autorisation de mise sur le marché ou d’une vérification d’innocuité/toxicité. Des efforts d’harmonisation au plan européen/international des réglementations de sécurité (ex. essais toxicologiques, .…), de rapprochement des normes en vigueur (protection de la santé humaine et animale et de l’environnement) et de reconnaissance mutuelle de la validité des protocoles et des données scientifiques permettent de diminuer le nombre d’études exigées par les diverses autorités étatiques et donc le nombre d’animaux utilisés.
  • rédaction d’un protocole expérimental avant toute expérimentation, dans l’idée qu’une étude bien préparée a de fortes chances de fournir des résultats concluants, qu’il sera inutile de vérifier par d’autres essais portant sur de nouvelles séries d’animaux. Ce qui peut permettre d’aboutir au : 

S’il est essentiel d’organiser les expérimentations indispensables de telle façon qu’elles permettent l’obtention de résultats exploitables avec le plus petit nombre d’animaux possibles, il faut néanmoins éviter que cet effort de réduction ne se traduise par l’obtention de résultats moins fiables. 

Références : M.F.W. Festing. Reducing the use of laboratory animals in biomedical research : problems and possible solutions. ATLA. 1998, 26, 283 – 301
M.F.W. Festing. Reduction of animal use : experimental design and quality of experiments. Lab Anim 1994, 28, 212 – 221
M.D. Mann, D.A. Crouse E.D. Prentice. Appropriate animal numbers in biomedical research in light of animal welfare considerations. Lab Anim Sci 1991, 41, 6 – 14

Raffiner

Le concept de raffiner, autrement dit optimiser l’expérimentation, concerne la méthodologie appliquée aux animaux dans l’optique : 

  • de réduire, supprimer ou soulager l’inconfort, la douleur, la détresse ou l’angoisse subie par les animaux,
  • d’obtenir plus d’informations pertinentes à moindre coût en terme de « mal être » animal.

Ce souci de raffinement doit être une préoccupation permanente tout au long de la vie des animaux et pendant les différentes étapes du protocole expérimental. 

Raffiner avant l’expérimentation consiste à : 

  • choisir avec soin le modèle animal utilisé en prenant en compte l’état actuel des connaissances, ceci concerne aussi bien la pertinence du choix de l’espèce que le protocole lui-même,
  • améliorer les conditions de transport, d’élevage et d’hébergement (soins, enrichissement du milieu) des animaux dans le but d’augmenter autant que possible leur bien-être,
  • planifier correctement le protocole de façon à éviter des perturbations susceptibles 
  • entraîner les animaux à coopérer (renforcement positif) pour certaines procédures de manière à diminuer le stress de l’animal et éviter le recours à l’anesthésie pour des actes non invasifs et non douloureux
  • établir des points limites les plus précoces possible en fonction de l’objectif de l’expérimentation. Dans ce domaine un des rôles les plus positifs des comités d’éthique en expérimentation animale sera de conseiller sur l’évaluation de la balance « coût/bénéfice » du projet.

Raffiner pendant l’expérimentation elle-même concerne les méthodes choisies et les procédures opératoires utilisées. Il faut envisager, chaque fois que possible : 

  • d’accorder la préférence à des procédures non invasives (imagerie, in vivo, télémétrie),
  • de donner les soins pré‑, per- et postopératoires adéquats,
  • de recourir à l’anesthésie/analgésie,
  • d’éviter les tests douloureux (test de Draize, test d’irritation de la peau, emploi d’adjuvants) chaque fois que des méthodes substitutives existent,
  • réduire la durée de certaines études surtout toxicologiques,
  • d’étudier des situations aiguës plutôt que chroniques,
  • d’appliquer les points limites établis préalablement,
  • d’utiliser les procédures d’euthanasie appropriées. 

Raffiner après l’expérimentation revient à exploiter au mieux les résultats obtenus lors de l’expérimentation (ex. études statistiques). 

Références : Flecknell P.A. Refinement of animal use – assessment and alleviation of pain and distress. Laboratory Animals, 1994, 28, 222 – 231
Morton, D.B. The importance of non-statistical design in refining animal experiments. Australian and New Zealand Council for the Care of Animals in Research and Teaching News Facts Sheet 1998, 1 – 12.
Michaels Balls. Replacement of animal procedures : alternatives in research, education and testing, Lab Anim 1994, 28, 193 – 211

Remplacer

Cette pétition de principe encourage le chercheur à remplacer chaque fois que cela est possible le modèle in vivo par des modèles in vitro ou « in silico » (modèles mathématiques, bio-informatique). Elle peut être applicable dans de nombreux domaines, en particulier dans les études de sécurité au sens large, à condition que le modèle utilisé ait été dûment validé et soit utilisé dans le champ d’application de sa validation. 

Cependant il est clair que dans l’état actuel des connaissances, ces méthodes sont la plupart du temps des méthodes complémentaires d’un projet global quand elles ne constituent pas en soi un objet de recherche. 

Il existe une forte pression du législateur comme l’opinion publique pour encourager le développement de ces méthodes dites « alternatives » qui peuvent constituer de réelles voies de substitution dans certains segments de la recherche fondamentale et en recherche appliquée. 

Les points limites

Définition

Raffiner, selon W.M.S. Russell et R.L. Burch, consiste, entre autres, à tout faire pour éviter/limiter la douleur/souffrance subie par les animaux. Dans ce sens, il revient à l’expérimentateur de fixer des points limites (critères d’interruption, end-points). 

Selon le CCPA (Conseil canadien de protection des animaux), le point limite est défini « comme étant le moment auquel la souffrance et/ou la détresse d’un animal d’expérimentation est arrêtée, minimisée ou diminuée en prenant des mesures comme celles d’euthanasier de façon humanitaire l’animal, de mettre fin à une procédure qui le fait souffrir, ou en le traitant de manière à soulager sa souffrance et/ou sa détresse ». 

Objectif des points limites

La fixation de critères d’interruption a pour objectif d’éviter : 

  • la mort ou un état morbide comme critère d’interruption, comme cela a parfois été le cas précédemment (toxicologie, maladies infectieuses, cancérologie),
  • la douleur/souffrance inutile ; lorsque celle-ci dépasse un seuil fixé par avance, il est décidé d’y mettre fin,
  • les données incorrectes obtenues à partir d’animaux stressés ou souffrants.

Fixation des points limites

Avant d’expérimenter, il est essentiel de fixer des points limites, ce qui revient successivement à : 

  • prévoir l’apparition de la douleur quel que soit le protocole expérimental envisagé, mais à plus fortes raisons quand celle-ci est prévisible (production d’anticorps monoclonaux, études en toxicologie ou en cancérologie, procédures invasives, etc.)
  • fixer les points limites consiste à : 
  • fixer la conduite à tenir : 

Application des points limites

En cours d’expérimentation, il faudra : 

  • reconnaître la douleur,
  • la quantifier via une échelle,
  • agir lorsque les critères d’interruption prédéfinis sont atteints,
  • noter dans le registre des animaux les observations faites et les actions entreprises.