Transmission de pensée – C’est quoi une neuroprothèse ?

Certains rêvent d’un futur dans lequel il suffira d’y penser pour envoyer un courriel, lancer sa musique préférée... ou jouer aux échecs. Mais pour cela, il faudra tout de même être équipé d’une neuroprothèse – on parle aussi d’implant neuronal ou d’interface cerveau-machine. À ce jour, ces dispositifs sont développés à destination de patients qui souffrent de handicaps majeurs. Et les risques liés à leur utilisation sont encore loin d’être contrebalancés par les bénéfices que l’on peut en retirer en dehors de situations médicales très spécifiques.

Les neuroprothèses sont des dispositifs électroniques conçus pour être directement reliés au système nerveux et permettre le fonctionnement de prothèses ou d’appareils destinés à remplacer un organe défectueux ou une fonction perdue. Elles peuvent être utilisées pour palier des déficiences sensorielles, comme certaines formes de cécité ou de surdité. Dans ce cas, elles fonctionnent en transmettant au cerveau de l’information captée dans l’environnement (grâce à une caméra ou à un micro), comme le feraient les cellules sensorielles de la rétine ou de l’oreille interne. Mais les neuroprothèses peuvent également fonctionner dans le sens inverse, en captant des signaux neuronaux, par exemple dans les aires cérébrales impliquées dans la motricité ou dans la parole : une fois décodés, ces signaux permettront de commander un fauteuil ou un bras motorisé, une prothèse de membre ou un exosquelette, un vocalisateur…

Concrètement, une neuroprothèse comprend un réseau d’électrodes placées au contact du tissu nerveux, pour stimuler ou enregistrer l’activité de neurones impliqués dans la fonction ciblée (vue, vision, motricité, langage…). S’y ajoutent un système de communication qui envoie des informations vers les électrodes ou reçoit celles enregistrées au niveau des neurones, ainsi qu’un dispositif de traitement (codage/décodage) des données collectées. On l’imagine aisément, le développement de ces implants est loin d’être simple ! Dans l’idéal, une neuroprothèse doit comporter le plus grand nombre d’électrodes possible, afin d’enregistrer ou de stimuler un maximum de neurones. Mais l’implant doit rester petit et souple pour être inséré sans léser les tissus neuronaux. Il ne doit évidemment pas provoquer son rejet et a tout intérêt à avoir une durée de vie aussi longue que possible. Autre point important, son fonctionnement ne doit pas provoquer d’élévation nocive de la température locale, au risque de nous griller les neurones…

Néanmoins la recherche progresse, aussi bien du côté des neuroprothèses sensorielles avec les implants cochléaires et les rétines artificielles, que de celui des interfaces cerveau-machine en particulier à destination de personnes qui souffrent de tétraplégie ou d’un syndrome d’enfermement (locked-in syndrome). Récemment, dans le cadre d’une collaboration franco-suisse, une équipe Inserm a participé au développement d’une neuroprothèse destinée à corriger les troubles de la marche associés à la maladie de Parkinson. Testé chez un premier patient, le dispositif a permis la restauration d’une marche fluide, confiante et sans chute. Si ces travaux sont tous très prometteurs, la possibilité de recourir à cette technologie en dehors de situations cliniques très spécifiques – et a fortiori pour des applications non médicales – est encore très lointaine. Sans parler des questions éthiques associées, il reste beaucoup de problèmes techniques et technologiques à régler.

Pour en savoir plus, notamment sur l’implant cérébral développé l’entreprise d’Elon Musk, consultez Comment fonctionnent l’implant Neuralink et les autres interfaces cerveau-machine, un article paru sur le site de The Conversation, cosigné par Clément Hébert et Blaise Yvert, chercheurs Inserm au Grenoble Institut des neurosciences (unité 1216 Inserm/Université Grenoble-Alpes).

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