La rage au ventre : C’est quoi le syndrome de l’intestin irritable ? 😖

Encore une maladie que l’on pensait psychosomatique, parce qu’on ne savait pas l’expliquer et qu’elle peut se déclencher ou s’aggraver lorsqu’on traverse un stress ou une période d’anxiété. Pourtant le syndrome de l’intestin irritable, également nommé colopathie fonctionnelle (mais plus du tout « côlon irritable » car l’intestin grêle est également concerné), correspond bien à un trouble du fonctionnement de notre appareil digestif.

Des maux de ventre, parfois terribles. Des spasmes, des brûlures, des ballonnements, des diarrhées et/ou de la constipation... Parfois aussi des symptômes extradigestifs, comme des maux de tête, des douleurs musculaires ou une grande fatigue... Bien que bénin, le syndrome de l’intestin irritable (SII) peut avoir un retentissement très important sur la qualité de vie des personnes qui en sont atteintes. La maladie n’est pas rare puisqu’elle affecte au moins 5 % de la population française. Et l’ennui, c’est qu’il n’existe pas encore de traitement spécifique pour en guérir : son origine reste aujourd’hui mal comprise.

C'est quoi le syndrome de l'intestin irritable et comment le soulager ?

Il est cependant bien établi que le syndrome est associé à des troubles de la motricité des intestins, qui conduisent à l’accélération ou au ralentissement du transit, ainsi qu’à une sensibilité intestinale accrue : les patients ressentent un inconfort et des douleurs en réponse à des stimulations locales qui sont souvent à peine perçues chez des personnes non affectées. Une augmentation de la perméabilité intestinale existerait chez une partie des malades : en permettant à des molécules pro-inflammatoires présentes dans le tube digestif de pénétrer dans l’organisme, elle participerait à la création d’une réaction inflammatoire diffuse, elle-même à l’origine de l’hypersensibilité intestinale.

Mais comment expliquer ces phénomènes ? Une piste sérieuse est celle des protéases, des enzymes dont la principale fonction est de digérer les protéines. L’activité de certaines d’entre elles s’avère anormalement élevée dans le côlon des patients : elle contribue vraisemblablement à augmenter la perméabilité de la paroi intestinale, et conduirait en outre à l’excitation de neurones du système digestif. Autre piste, celle du microbiote, l’ensemble des micro-organismes qui peuplent nos intestins et participent notamment à leur bon fonctionnement. Un déséquilibre dans la composition de cette flore intestinale, potentiellement à l’origine de troubles de la digestion, de modification de la perméabilité intestinale et de réactions inflammatoires, est en effet observé chez de nombreuses personnes qui souffrent d’un SII.

L’exploration de ces pistes pourrait conduire, on l’espère, à la mise au point de traitements spécifiques contre le SII : antiprotéases, pré/probiotiques pour rééquilibrer la flore intestinale... Mais pour l’heure, la prise en charge de la maladie repose uniquement sur des solutions qui visent à diminuer la douleur et l’inconfort. Côté médicaments, des antispasmodiques permettent de réduire les contractions, des régulateurs de transit aident à lutter contre les diarrhées et la constipation, des antidépresseurs à visée antalgique peuvent être prescrits en cas de douleurs rebelles et sévères. Des approches telles que l’hypnose sont également utiles pour mieux gérer les crises. Une amélioration peut en outre être obtenue en identifiant puis en réduisant la consommation d’aliments mal supportés, en évitant les repas trop gras et les quantités excessives de fibres.

Certains patients optent pour un régime sans gluten car, en éliminant cette protéine de leur alimentation, ils réduisent de fait leurs apports en FODMAPs. Cet acronyme (fermentable oligo‑, di‑, mono- saccharides and polyols) englobe des édulcorants, comme le sorbitol, mais surtout des sucres notamment contenus dans les céréales (fructanes), les fruits (fructose), des légumes (galactanes) et certains produits laitiers (lactose). Ces composés, difficiles à digérer, fermentent dans le côlon et contribuent aux symptômes de la maladie. Les éliminer de l’alimentation peut donc soulager certains malades du SII. Cependant un régime sans FODMAPs n’est pas toujours efficace. Par ailleurs, il est très restrictif, difficile à suivre et doit donc être encadré par un diététicien !

Pour en savoir plus :
🔬 sur la piste des protéases
🔬 sur celle du microbiote
🔬 au sujet du rôle des FODMAPs (sur le site d’INRAE)

📖 Et pour un tour d’horizon sur les recherches conduites au sujet des maladies du ventre, découvrez le Grand angle du dernier numéro du magazine de l’Inserm.

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Low-temperature electron micrograph of a cluster of E. coli bacteria, magnified 10,000 times. Each individual bacterium is oblong shaped © Photo by Eric Erbe, digital colorization by Christopher Pooley, both of USDA, ARS, EMU. - This image was released by the Agricultural Research Service, the research agency of the United States Department of Agriculture, with the ID K11077-1
Nathalie Vergnolle