Pollution atmosphérique et rhinite ne font pas bon ménage

La pollution atmosphérique accroît le risque de sévérité de la rhinite. Si cette association dépend de la nature des polluants considérés ou encore du type de rhinite, elle est significative à l’échelle de deux cohortes européennes. C’est ce que viennent de montrer, deux équipes Inserm, de Villejuif et de Rennes.

Souvent considérée comme bénigne, la rhinite peut affecter de façon importante la qualité de vie et réduire les performances scolaires ou professionnelles. Elle se manifeste par des éternuements, un nez bouché ou qui coule ou encore des démangeaisons, indépendamment d’un rhume. Des symptômes qui peuvent altérer le sommeil, l’humeur... La maladie peut être d’origine allergique et/ou associée à l’asthme, mais elle peut aussi être indépendante des deux. Selon les études épidémiologiques et en fonction des pays, entre 20 à 50% des individus sont sujets à la rhinite. 

Pour en savoir plus au sujet de l’impact à long terme de la pollution atmosphérique sur cette maladie, deux équipes Inserm (à l’hôpital Paul Brousse de Villejuif* et à l’Institut de recherche en santé, environnement et travail**) ont étudié leur association. Pour cela, les chercheurs ont utilisé les données de deux cohortes destinées à l’étude des maladies respiratoires, de façon à disposer d’informations bien documentées relatives à la rhinite. Il s’agit de l’Etude épidémiologique des facteurs génétiques et environnementaux de l’asthme (EGEA), une cohorte française incluant des sujets asthmatiques, leur famille et des témoins de la population générale, et de l’European Community Respiratory Health Survey (ECRHS) une cohorte européenne associant 28 pays, composée de jeunes adultes issus de la population générale. Au total, ce travail a inclus 1 408 adultes âgés de 52 ans en moyenne, vivant dans 17 villes européennes, qui déclaraient avoir présenté une rhinite au cours des douze derniers mois (entre 2011 et 2013). 

Un score associé à la sévérité de la rhinite a été défini pour chaque participant, compris entre 0 à 12 selon l’intensité de la gêne pour réaliser ses activités quotidiennes causée par les symptômes : peu sévère (0–2), légèrement sévère (3–4), modérément sévère (5–6) et très sévère à partir de 7. Le score de sévérité médian observé était de 4. En parallèle, les auteurs ont utilisé les niveaux de pollution sur les lieux de résidence des participants, obtenus grâce au projet ESCAPE (European Study of Cohorts for Air Pollution Effects). Au cours de cette étude, les taux d’azote (NO2), de particules fines de diamètre inférieur à 10 et inférieur à 2,5 µm (PM10 et PM2,5), ainsi que la densité et l’importance de la circulation automobile ont été modélisés dans plusieurs villes européennes. 

Des nuances dans l’association pollution/sévérité de la rhinite

L’analyse statistique montre une association significative entre pollution à long-terme et sévérité de la rhinite. Mais plusieurs précisions s’imposent. Avec les particules fines PM10 et PM2,5, il existe un « effet dose » : plus la concentration en particules augmente, plus la sévérité de la rhinite augmente. En revanche, aucune association n’a été retrouvée entre trafic automobile et sévérité de la rhinite, alors que celui-ci est fortement émetteur de particules fines. Une contradiction qui pourrait s’expliquer par un problème méthodologique de recueil des données du trafic. Enfin, il existe également une association significative entre concentration de NO2 et sévérité de la rhinite. Cette association n’est pas « dose-dépendante », mais les individus les plus exposés à cette pollution ont en moyenne une rhinite plus sévère que ceux qui le sont moins. 

Autre nuance importante, ces associations sont plus fortes chez les personnes présentant une rhinite non allergique et non asthmatiques et décroissent fortement en cas de rhinite allergique ou d’asthme. « Ces résultats doivent cependant être interprétés avec précaution compte tenu des faibles effectifs dans ces deux dernières catégories. Néanmoins ces différents types de rhinites ont des mécanismes physiopathologiques différents : il n’est donc pas tellement étonnant que les résultats divergent en fonction de la présence d’asthme ou de sensibilité allergique. Les effets de la pollution sur la santé respiratoire pourraient interférer avec un type de rhinite et pas un autre », estime Bénédicte Jacquemin, responsable de ces travaux à l’Institut de recherche en santé, environnement et travail de Rennes. 

Notes :
* unité 1168 Inserm/UVSQ/Université Paris Sud, Vieillissement et Maladies chroniques : approches épidémiologique et de santé publique, Villejuif
** unité 1085 Inserm/Université de Rennes 1/Université d’Angers Institut de recherche en santé, environnement et travail (Irset), équipe Évaluation des expositions et recherche épidémiologique sur l’environnement, la reproduction et le développement, Rennes

Source : E. Burte et coll. Long-term air pollution exposure is associated with increased severity of rhinitis in 2 European cohorts. JACI du 23 janvier 2020, doi : 10.1016/j.jaci.2019.11.040