Nouvelle arme contre les prions

Une molécule déjà disponible sur le marché présente une activité antiprion insoupçonnée jusque-là. C’est ce que vient de montrer une équipe de l’Inserm de Brest qui cherche maintenant à décrypter le mécanisme d’action et les cibles de cette molécule pour développer à terme un candidat médicament antiprion.

L’imiquimod, un médicament actuellement sur le marché pour traiter certains cancers de la peau ou encore des infections virales, pourrait bien trouver une seconde vie dans la lutte contre les maladies à prions. En testant des molécules provenant d’une chimiothèque de médicaments sur des prions de levure de boulanger S. cerevisiae, des chercheurs de l’Inserm ont constaté que l’imiquimod réduit la présence des prions dans les cellulesIls l’ont alors testée sur des cellules de mammifères puis in vivo chez la souris. A chaque fois, la molécule a montré une action antiprion. 

La mise en évidence de nouveaux impacts thérapeutiques de médicaments déjà mis sur le marché pour d’autres indications est particulièrement intéressante : ce type de « détournement thérapeutique » permet en effet de s’affranchir des très nombreuses années nécessaires à la mise sur le marché d’un médicament à partir du moment où une molécule d’intérêt thérapeutique est identifiée dans un laboratoire. 

Un mécanisme d’action à clarifier

Les prions sont des protéines cellulaires mal repliées et qui s’agrègent. Elles créent des dysfonctionnements et des lésions cellulaires comme dans le cas de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Certaines maladies comme Parkinson, Alzheimer ou encore Huntington sont également associées à des problèmes de repliement et d’agrégation de protéines et à ce titre toute avancée contre les prions pourrait avoir des répercussions plus larges. « A ce stade, nous ne savons pas encore comment l’imiquimod agit chez l’hôte et comment les prions disparaissent, expliquent Cécile Voisset et Marc Blondel*, coauteurs des travaux. Nous savons juste que le médicament utilise une voie différente de celle prise pour stimuler le système immunitaire dans le cadre des indications existantes (via un récepteur Toll-like 7 – TLR7). Il pourrait inhiber l’activité de repliement des protéines du ribosome** ». Une activité cellulaire dont l’équipe étudie actuellement le rôle dans les mécanismes de propagation des prions. 

Plusieurs dérivés testés

Dans le cadre de ces travaux, une équipe de collaborateurs chimistes a par ailleurs mis au point une nouvelle voie de synthèse de cette molécule qui restait difficile et chère à produire. Cela leur a permis d’étudier les liens entre structure et activité, et de tester différents composés dont la structure est proche de l’imiquimod. « Trois d’entre eux présentent une activité antiprion mais l’imiquimod reste la molécule la plus active, même si cette efficacité est modérée, reconnaissent les chercheurs. Pour l’instant, cette molécule est une très bonne base de travail pour développer des dérivés plus actifs et identifier leurs cibles dans la cellule », concluent-ils. 

Notes

*unité 1078 Inserm / Université de Bretagne occidentale / Etablissement français du sang, Brest 
**Le ribosome est une machine essentielle de la cellule qui assure la synthèse protéique à partir de l’information génétique. 

Source

N. Oumata et coll. The Toll-Like Receptor Agonist Imiquimod Is Active against Prions. PLoS One, août 2013, vol 8, e72112