Covid-19 : un test rapide de caractérisation de la réponse immune

À Tours, une équipe Inserm développe un test sérologique fondé sur la reconnaissance de petits fragments de protéines virales. Au-delà de la détection des anticorps anti-SARS-CoV‑2, il permettra de cartographier très finement la réponse immune des personnes infectées par le nouveau coronavirus. L’objectif est de permettre l’étude d’éventuelles corrélations entre les caractéristiques de la réponse immune des patients et les formes plus ou moins sévères de la maladie. Ce test pourrait en outre identifier les régions les plus immunogènes du virus, dans la perspective de la mise au point de candidats vaccins.

De nombreux tests sérologiques, permettant de détecter la présence d’anticorps anti-SARS-CoV‑2 dans le sérum des malades, sont en cours de validation. Leur utilisation vise notamment à évaluer le taux d’immunité au sein d’une population, dans l’hypothèse où ces anticorps seraient bien protecteurs vis-à-vis d’une réinfection. Christophe Hourioux* souhaite quant à lui aller plus loin, en développant de nouveaux tests qui permettent d’étudier de façon plus fondamentale la réponse immunitaire dirigée contre le virus. 

Les travaux de ce chercheur portent sur la caractérisation des réponses immunitaires à partir de la reconnaissance de fragments de protéines virales – appelés peptides – et non de protéines entières comme dans les tests diagnostiques classiquement réalisés. La nuance peut paraître subtile, mais elle a toute son importance : grâce à la technique développée par Christophe Hourioux, il est en effet possible d’identifier les cibles de la réponse immunitaire qui mettent en jeu des anticorps (réponse humorale) selon les peptides reconnus, et de caractériser des anticorps fortement neutralisants par rapport à d’autres, moins efficaces. « L’idée n’est pas seulement de détecter la présence d’anticorps anti-SARS-CoV‑2, mais aussi d’évaluer l’efficacité de la réponse immunitaire selon les peptides. Pour cela, nous nous appuyons sur l’expertise de notre unité dans le développement de tests immuno-enzymatiques, à l’aide de peptides de synthèse », expliquent Christophe Hourioux et Sébastien Eymieux, assistant hospitalier et doctorant, co-responsable du projet. 

Près de cinquante peptides issus de deux protéines

Pour développer leur test, ils se sont focalisés sur deux protéines virales de structure : la protéine Spike, une grosse protéine de surface qui donne au virus son aspect en couronne, et la nucléoprotéine qui s’associe à l’ARN viral et l’enroule en spirale. À partir de la structure tridimensionnelle de ces protéines et de programmes informatiques prédictifs, les chercheurs ont identifié des fragments susceptibles d’être immunogènes, c’est-à-dire reconnus par des anticorps. Il s’agit en particulier des régions exposées ou spécifiques de la séquence protéique. À partir de ces données, 48 peptides composés chacun d’environ 20 acides aminés ont été sélectionnés et sont en cours de synthèse chimique. Une fois les peptides synthétisés, ils seront mis en contact avec le sérum des patients pour tester la reconnaissance anticorps-peptides. 

Parallèlement, les chercheurs ont commencé à collecter les échantillons de sérum de patients nécessaires à la mise au point de leur test. Ils évalueront la sensibilité et la spécificité de ce dernier avec des échantillons de sérum de témoins qui n’ont pas été infectés par le SARS-CoV‑2 et d’une vingtaine de patients hospitalisés pour un Covid-19 au CHU de Tours, pour lesquels ils disposent de plusieurs prélèvements sanguins réalisés dans le cadre des soins à différents temps au cours de leur hospitalisation. « Nous vérifierons que leurs anticorps reconnaissent bien nos peptides. Et grâce à la répétition du test sur ces prélèvements itératifs, nous établirons une cartographie dynamique de la réponse immunitaire associée à l’évolution de la pathologie », expliquent les chercheurs. Ils renouvelleront l’exercice avec une autre cohorte, composée de personnels soignants du CHU de Tours ayant contracté l’infection, et qu’ils pourront rappeler ultérieurement afin de les prélever et de renouveler le test. Cela aura pour avantage d’étudier la réponse immunitaire chez des personnes qui présentent des caractéristiques cliniques et biologiques différentes des patients hospitalisés. La durée prévue de l’étude est de 18 mois. 

À terme, les chercheurs espèrent utiliser leur test à l’échelle régionale, dans le but de caractériser la réponse immunitaire chez un plus grand nombre de patients, selon leur âge, leur profil, la sévérité de l’infection, et en fonction des peptides reconnus. Ils pourraient ainsi mettre en évidence les anticorps les plus neutralisants, associés à une guérison rapide, ce qui serait très utile pour la conception et la composition de futurs vaccins. 

Ce projet a obtenu un financement initial du programme Flash-Covid de l’Agence nationale de la recherche et bénéficiera d’un second financement par la région Centre-Val de Loire.

Note :
*unité 1259 Inserm/Université de Tours, Morphogenèse et antigénicité du VIH et des virus des hépatites (MAVIVH)