Collège des relecteurs : Quand le regard des patients facilite la recherche clinique

Depuis plus de 10 ans, l’Inserm forme des membres d’associations de malades à la relecture des protocoles de recherche clinique : bénévolement, ces relecteurs s’assurent de la lisibilité des documents remis aux personnes sollicitées pour participer à une recherche clinique promue par l’Inserm. Leur regard profite à tous : aux patients qui pourront donner un consentement réellement éclairé à leur participation à l’étude, et aux chercheurs qui bénéficieront d’une plus grande adhésion des volontaires et passeront plus rapidement les étapes réglementaires précédant le démarrage de leur étude.

En France, les personnes qui participent à une recherche clinique doivent donner leur « consentement éclairé ». Pour cela, elles reçoivent une information qui se veut claire et complète sur le projet de recherche en question : ses objectifs, sa méthodologie, les bénéfices attendus, les contraintes et les risques prévisibles… Ces informations, cruciales pour choisir de participer ou non à une étude, sont rassemblées dans un document rédigé par les scientifiques qui conduisent l’étude. Et c’est là que les choses se compliquent parfois… Un bon chercheur n’est pas toujours un bon vulgarisateur : texte trop long, trop de mots compliqués, trop d’acronymes peuvent rendre les notices d’information difficiles à lire et à comprendre. Un premier écueil qui constitue parfois un frein à la décision de participer à une recherche. 

Par ailleurs, les chercheurs ne se mettent pas toujours à la place des participants. Sans l’avoir anticipé, ils peuvent proposer des protocoles difficilement acceptables : trop d’examens pratiqués à la suite, trop de consultations de suivi nécessitant un déplacement, des cachets proposés à des patients qui ont du mal à avaler ou d’autres modalités incompatibles avec la maladie des personnes recrutées… 

Pour remédier à ces écueils, l’Inserm a créé un collège de relecteurs : 70 membres d’associations de malades, formés pour relire et améliorer les documents fournis aux patients potentiellement candidats à une recherche clinique promue par l’Institut. l’Inserm l’a en effet compris depuis plus de quinze ans, les associations de malades sont des partenaires de recherche à part entière ! Leurs membres ont une expertise du vécu de la maladie au quotidien qu’il est important de prendre en compte dans la réalisation de projets de recherche. 

Améliorer les documents d’information profite à tous

Concrètement, le protocole, la notice d’information et le formulaire de consentement des projets de recherche clinique portés par l’Inserm sont transmis à trois relecteurs. Ces derniers ont alors 10 jours pour relire ces documents. Ils en évaluent la lisibilité, mais pas uniquement. Le cadre, les objectifs de l’étude et les bénéfices que le patient peut en attendre sont-ils clairement explicités ? Les contraintes et les risques liés au protocole sont-ils bien expliqués et, surtout, sont-ils acceptables ? Les droits des patients sont-ils respectés ? Depuis 2007, plus de 150 protocoles de recherche ont été relus par ce collège, à raison de 20 à 25 par an ces dernières années. 

En fonction de cette évaluation, les relecteurs apportent les modifications nécessaires à la notice d’information et au formulaire de consentement. Ils peuvent en outre faire des propositions visant à améliorer le protocole, au bénéfice de la prise en charge des participants. 

Ce travail profite à tous. Pour les patients, la qualité des documents les rend plus autonomes dans leur décision de participer ou non à une recherche. Mieux informés, ils sont davantage en confiance et peuvent plus facilement discuter avec l’équipe de recherche. Pour les chercheurs, ce gain de confiance va faciliter le recrutement de volontaires et réduire le risque de voir des patients quitter l’étude avant sa fin. Par ailleurs, loin de constituer une perte de temps, cette étape de relecture accélère les étapes réglementaires qui précèdent le démarrage d’une recherche clinique (voir encadré). La relecture est réalisée avant que le document soit transmis à un comité de protection des personnes, et l’expérience montre que le travail des relecteurs réduit le délai d’obtention d’un avis favorable de ce comité. 

La recherche clinique en France, une pratique bien encadrée

Qu’il s’agisse de développer les connaissances sur le fonctionnement de l’organisme humain, de mieux comprendre les mécanismes à l’origine d’une maladie ou encore de tester une nouvelle approche thérapeutique, les progrès médicaux passent presque toujours par la recherche clinique, c’est-à-dire par des études impliquant des personnes, volontaires sains ou malades. 

Comme toutes les activités de recherche, la recherche clinique est bien encadrée en France : la mise en œuvre de telles études nécessite notamment l’obtention d’un avis favorable d’un comité de protection des personnes (CPP) et, dans certains cas, une autorisation de l’Agence nationale sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil).

Les personnes sollicitées pour participer à une recherche doivent en outre recevoir une information complète sur le projet de recherche, afin d’être en mesure de donner (ou non) leur « consentement éclairé » à leur participation. Les volontaires engagés dans une étude peuvent à tout moment revenir sur ce consentement et stopper leur participation. 

En savoir plus sur la recherche clinique et les essais cliniques

Piloté par la Mission Associations, le collège des relecteurs de l’Inserm couvre tous les domaines thématiques de la recherche sur la personne humaine. Toutefois, il collabore avec le Comité de patients pour la recherche clinique de la Ligue contre le cancer pour la relecture des protocoles dans le domaine du cancer. Pour les thématiques sida et hépatites virales, les protocoles de recherche sont directement adressés aux deux collectifs associatifs de l’ANRS. 

Les membres du collège ont été renouvelés aux deux tiers en 2017–2018. Le passage de relai entre les anciens et nouveaux membres aura lieu le 24 janvier, lors d’une grande rencontre organisée à l’Académie de Médecine par la Mission Associations de l’Inserm. Une rencontre qui sera l’occasion de présenter une nouveauté : la participation des relecteurs à la construction des documents visant à présenter les résultats d’une recherche clinique aux volontaires qui y ont participé.