Vers un diagnostic simplifié de la maladie de Wilson

Atteinte rare liée à une surcharge du foie en cuivre, la maladie de Wilson reste difficile à diagnostiquer. Une équipe interdisciplinaire de chercheurs vient d’apporter la preuve de concept d’une nouvelle technique simple, robuste et sensible : la spectrométrie de fluorescence aux rayons X.

La maladie de Wilson est une maladie génétique rare qui touche une personne sur 7 000 à 30 000 environ, selon les pays. Ses symptômes sont liés à une surcharge en cuivre du foie, provoquée par la mutation du gène codant pour sa protéine de transport (ATP7B). Il peut s’agir d’une cirrhose, d’un cancer du foie, mais aussi de troubles neurologiques ou oculaires liés à la migration du cuivre dans ces tissus. « On rencontre deux difficultés pour diagnostiquer cette maladie, explique François Le Naour*. D’abord une extrême variabilité clinique qui complique le repérage, avec des symptômes plus ou moins sévères et parfois entièrement extra-hépatiques. Ensuite des méthodes diagnostiques insuffisamment spécifiques (par coloration) ou longues, que ce soit par séquençage du génome à la recherche de l’une des 500 mutations pouvant toucher le gène ATP7B ou par dosage du cuivre dans des biopsies de foie, qui nécessitent le recours à des laboratoires extrahospitaliers ». C’est sur ce constat que le scientifique, avec son équipe de chercheurs interdisciplinaire, a souhaité développer une méthode diagnostique plus accessible et fiable. L’idée d’exploiter les propriétés du cuivre présent dans les tissus a émergé. 

Lorsqu’un métal est soumis à des rayons X, ses électrons sont excités. Quand ces derniers retournent au repos, ils émettent un rayonnement de fluorescence dont la longueur d’onde est propre au métal analysé et dont l’intensité est spécifique de la concentration. C’est ce principe simple, traditionnellement exploité pour conduire des analyses physicochimiques, que les chercheurs ont eu l’idée d’utiliser pour mesurer la surcharge en cuivre dans des tissus de patients atteints de maladie de Wilson. 

Plusieurs expériences ont été réalisées pour tester la faisabilité d’un diagnostic par spectrométrie de fluorescence aux rayons X. « Nous avons d’abord montré que la fluorescence émise est spécifique du métal et de sa concentration sur des échantillons de foie issus de modèles animaux. Nous avons aussi évalué la sensibilité de la méthode pour des concentrations de cuivre très faibles ». Dans un deuxième temps, les chercheurs ont confirmé ces données sur des coupes histologiques obtenues à partir d’échantillons de foie humain. « Nous avons vérifié que la spectrométrie permet de différencier la maladie de Wilson d’autres atteintes hépatiques dans lesquelles le cuivre peut être plus modérément augmenté. Enfin, nous avons validé cette méthode sur des tissus directement issus de biopsie ». Ce dernier point est crucial pour envisager une utilisation simple de cette méthode de diagnostic par les équipes hospitalières, en routine. 

Cette première étude a été réalisée de manière rétrospective, en comparant les échantillons de tissus prélevés chez des personnes malades à ceux issus de personnes saines. Pour valider la robustesse de la méthode, l’équipe scientifique envisage désormais de conduire une étude prospective : « il s’agira de comparer les différentes méthodes diagnostiques (telles que l’examen histologique, le séquençage ou le dosage du cuivre) pour  confirmer la fiabilité du diagnostic par spectrométrie de fluorescence X « . Si c’est le cas, la spectrométrie de fluorescence aux rayons X pourrait être utilisée largement : le prix de l’appareillage est modique, la méthode simple à mettre en œuvre et le diagnostic disponible en moins d’une demi-heure. 

Note

* Unité 1193 Inserm/université Paris-Sud, hôpital Paul Brousse, Villejuif 

Source 

S Kascakova et al. Rapid and reliable diagnosis of Wilson disease using X‑ray fluorescence. The Journal of Pathology : Clinical Research, édition en ligne du 6 juin 2016