Sclérose latérale amyotrophique : une nouvelle souris modèle

Une équipe strasbourgeoise vient de mettre au point un modèle murin original, reproduisant au mieux l’une des formes humaines les plus sévères de sclérose latérale amyotrophique (SLA). Ce modèle ouvre des voies, non seulement pour mieux comprendre la physiopathologie de la SLA, mais aussi pour tester l’efficacité de médicaments. 

Avec plus de 800 nouveaux cas diagnostiqués chaque année en France, la sclérose latérale amyotrophique (SLA, ou maladie de Charcot) se manifeste par une paralysie progressive, affectant les membres, les muscles respiratoires, la déglutition et la parole. Pour l’heure, il n’existe pas de traitement curatif de la maladie et les connaissances relatives à ses mécanismes physiopathologiques sont limitées. Si l’on sait qu’elle est due à la mort progressive des motoneurones, reste à découvrir ce qui la déclenche… Des lueurs d’espoirs se dessinent toutefois. 

En 2016, l’équipe de Luc Dupuis* a franchi un grand pas dans la compréhension de mécanismes à l’origine de la mort des motoneurones en étudiant les formes les plus sévères de la maladie qui entraîne le décès de jeunes adultes en quelques mois (1% des cas) : « Nous avons montré que la mort de ces cellules est liée à l’accumulation dans leur cytoplasme d’une protéine appelée FUS. La protéine est habituellement localisée dans le noyau. Ces formes sévères de SLA sont en effet associées à la présence de mutations dans le gène qui code pour cette protéine », rapporte le chercheur. 

Développement de souris hétérozygotes

« Pour obtenir ce résultat, relate-t-il, nous avions mis au point deux modèles de souris, l’un correspond à des souris totalement déficientes en protéine FUS, l’autre à des souris chez lesquelles la protéine FUS se concentre dans le cytoplasme des motoneurones ». Les souris déficientes sont mortes à la naissance, sans présenter de motoneurones malades, « attestant que FUS est indispensable au fonctionnement de l’organisme » rappelle Luc Dupuis. Les autres sont également mortes à la naissance, mais avec un déficit en motoneurones, « prouvant ainsi que la dégénérescence précoce des motoneurones est liée à la présence de FUS dans le cytoplasme. A la lumière de ces observations, nous avons eu l’idée de développer un modèle, où FUS est présente à la fois dans le noyau et le cytoplasme, c’est à dire un modèle se rapprochant de ce qui se passe véritablement chez le malade possédant une seule copie FUS muté. Nous avons donc développé des souris hétérozygotes, avec un seul allèle FUS muté. Et cette fois-ci, les souris étaient viables, avec une espérance de vie normale, mais présentant des symptômes légers de SLA, proche de la maladie humaine ».

Perspectives d’essais cliniques

L’intérêt de ce modèle murin est double. Premièrement, il constitue un outil précieux pour approfondir la connaissance physiopathologique de la SLA. Ainsi, concernant les différents types de cellules atteints par la maladie, « nous avons déjà constaté que les motoneurones ne sont pas les seuls touchés, les oligodendrocytes le sont aussi » explique le chercheur. L’objectif est maintenant d’identifier ce qui est altéré dans chacun de ces types cellulaires, afin de définir des cibles thérapeutiques. Des études sont déjà en cours. Grâce à ce modèle, il va par ailleurs être possible d’étudier de nouvelles pistes physiopathologiques, notamment l’hypothèse selon laquelle la SLA impliquerait un mécanisme « prion-like », c’est-à-dire la propagation d’une anomalie conformationnelle affectant une protéine. 

Deuxième intérêt : le modèle murin constitue une voie pour évaluer l’efficacité de médicaments. Un progrès majeur car, jusqu’à présent, « il n’existait pas de modèles fiables pour réaliser de telles études, explique Luc Dupuis. Les modèles murins, dont nous disposions n’exprimaient pas la protéine FUS de façon physiologique. Des entreprises nous ont déjà contacté pour tester des thérapeutiques sur des phénotypes moteurs, comme par exemple la perte de la force musculaire »

Note

*unité 1118 Inserm/Université de Strasbourg, Mécanismes centraux et périphériques de la neurodégénérescence, Faculté de médecine, Strasbourg 

Sources

J Scekic‑Zahirovic et coll. Motor Neuron Intrinsic and Extrinsic Mechanisms Contribute to the Pathogenesis of FUS-associated Amyotrophic Lateral Sclerosis. Acta Neuropathol, édition en ligne du 28 février 2017