L’année européenne de l’Inserm

À l’occasion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, plusieurs événements destinés à renforcer la politique européenne de l’Inserm ont marqué l’année 2022. Guillaume Fusai, responsable du pôle Relations européennes au département Partenariats et relations extérieures, et Cécile Heriard, représentante de l’Inserm à Bruxelles, expliquent en quoi la visibilité de l’Institut sur la scène européenne est primordiale.

Un article à retrouver dans le rapport d’activités 2022 de l’Inserm

L’Inserm est un institut national. Pourquoi autant d’attention portée sur l’Europe ?

Guillaume Fusai : Les programmes-cadres de l’Union européenne pour la recherche et l’innovation, tels Horizon 2020 (2014–2020) et Horizon Europe (2021–2027), sont stratégiques pour l’Inserm. Déclinés sous forme d’appels à projets, ils sont dotés de plusieurs milliards d’euros et financent une recherche de très bonne qualité, donnant le plus souvent lieu à des collaborations stimulantes, à des publications dans des revues prestigieuses et à des dépôts de brevets. Remporter un projet européen, c’est bénéficier d’une reconnaissance internationale et acquérir une légitimité dans son domaine. C’est également l’opportunité pour les lauréats de développer leur réseau et de faire un saut dans leur carrière. Ces programmes permettent aussi de mettre sur pied des projets qui ne pourraient pas être menés à l’échelle nationale, par exemple sur les maladies rares, qui touchent chacune un nombre très restreint de personnes, ou encore sur de grandes infrastructures de recherche. Enfin, il y a évidemment l’aspect financier. Les programmes européens représentent un cinquième des ressources externes de l’Institut.

Cécile Heriard : La politique de recherche est en outre une compétence partagée entre l’Union européenne et ses États membres. Les organismes de recherche nationaux doivent intégrer l’échelon européen tant au niveau des laboratoires que dans la définition des programmes. La directive européenne sur la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques, qui fait l’objet de révisions fréquentes, est également primordiale pour nous.

Qu’est-ce que le « plan Europe » élaboré en 2022 ?

G. F. : Ce plan vise à amplifier l’influence de l’Inserm auprès de la Commission européenne, au bénéfice de l’ensemble de la communauté scientifique et médicale nationale, ainsi que notre participation aux appels à projets. C’est une nécessité pour remplir le Contrat d’objectifs, de moyens et de performance signé avec nos deux ministères de tutelle. Il répond aussi à la demande du ministère en charge de la Recherche d’augmenter la visibilité des équipes françaises dans les appels à projets européens. Ce document est structuré autour de trois objectifs : influencer, inciter, accompagner. Influencer, pour que les activités de recherche de l’Institut soient mises en avant lors de la programmation des appels à projets européens. Et nous menons des actions pour inciter nos chercheurs à déposer davantage de projets européens et les accompagner dans le montage et la gestion, parfois complexe, de ces dossiers.

Où en est justement la participation des chercheurs Inserm aux appels à projets européens ?

G. F. : Pour Horizon 2020, l’Inserm était à la première place en nombre de projets coordonnés dans le domaine de la santé. Il nous faut cependant conforter et même consolider cette position dans le programme Horizon Europe. Nous espérons en parallèle que le nombre total de dossiers déposés va augmenter, qu’ils soient lauréats ou non. Enfin, concernant les bourses ERC décernées par le Conseil européen de la recherche, l’Inserm est arrivé en deuxième position en France, avec plus de 80 lauréats entre 2014 et 2020. Ces dotations financent une recherche fondamentale de qualité et des idées remarquables. Récemment, par exemple, une chercheuse Inserm l’a obtenue pour développer un test de dépistage du cancer à partir d’une simple prise de sang. Pour faire connaître davantage le programme Horizon Europe à nos chercheurs et mieux les accompagner, nous avons aussi rédigé en 2022 un guide pratique à leur intention.

C. H. : Il faut aussi rappeler que la Commission européenne recrute sans cesse des experts pour évaluer, moyennant finance, les projets déposés. Nous encourageons les chercheurs Inserm à s’inscrire dans la base de données de la Commission afin de mieux comprendre les rouages de ce processus et de détenir les clés pour remporter un financement européen.

Qu’avez-vous prévu dans le plan Europe pour faire coïncider les appels à projets européens avec les expertises Inserm ?

C. H. : Nous faisons un travail important en amont des appels à projets pour codéfinir avec la Commission européenne ses priorités de recherche en santé. À cette occasion, nous suggérons des thématiques qui nous intéressent. Pour cela, nos meilleurs ambassadeurs sont les chercheurs Inserm qui ont déjà remporté des appels à projets européens ou sont reconnus dans leur domaine et qui font valoir leurs priorités avec leurs pairs européens. La Commission s’entretient aussi régulièrement avec les États membres. Or, nos ministères de tutelle connaissent nos stratégies de recherche et les utilisent pour définir la position des autorités françaises. Représentation permanente de notre Institut, le bureau de l’Inserm à Bruxelles permet quant à lui d’accroître notre visibilité, de développer notre réseau d’interlocuteurs et de réaliser une veille stratégique, institutionnelle et réglementaire. C’est aussi un levier pour valoriser les travaux de nos chercheurs experts en organisant des événements scientifiques pour les décideurs politiques. La présidence française de l’Union européenne nous a servi de tremplin en la matière, avec pas moins de sept manifestations en 2022, sur nos axes prioritaires : santé mentale, maladies rares, environnement et santé, biologie cellulaire, antibiorésistance ou encore cancer... Enfin, nous avons inauguré en 2022 la Maison Joliot-Curie, un espace mutualisé qui regroupe tous les bureaux des organismes de recherche français à Bruxelles, ainsi que France Universités. Nos chercheurs y sont bien entendu les bienvenus !

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