Le DHA, un oméga‑3 intéressant contre le cancer du côlon ?

L’inflammation fait partie du processus de cancérogenèse, notamment au niveau du côlon. Or l’acide docosahexanoïque (DHA) est un acide gras connu pour ses propriétés anti-inflammatoires et anti-cancéreuses. Des chercheurs de l’Inserm et de l’université de Bourgogne viennent de décrire l’influence de cet oméga‑3 sur un médiateur inflammatoire clé qui régit la croissance tumorale.

Les acides gras apportés par l’alimentation jouent un rôle important dans la prolifération des cellules cancéreuses : selon leur nature, ils peuvent favoriser ou à l’inverse inhiber la croissance tumorale. Ainsi, des données épidémiologiques et cliniques ont montré que le DHA, un acide gras majeur au sein de la famille des omega‑3, peut limiter le risque et l’évolution des cancers colorectaux. Cette régulation repose sur les propriétés anti-inflammatoires de la molécule, dont des chercheurs Inserm ont voulu mieux décrire le fonctionnement. 

Leur travail a confirmé que le DHA agissait en conduisant à l’inhibition dose-dépendante de plusieurs médiateurs inflammatoires et l’augmentation de l’apoptose des cellules tumorales. Conduite sur des cellules de tumeur colorectale en culture, cette étude a en outre mis en lumière un phénomène inattendu : le DHA conduit également à l’augmentation de la production de l’un des médiateurs clés du processus d’inflammation, le TNFα.

Le TNFα, une clé pour la mort des cellules tumorales

L’inflammation est une composante indissociable du cancer : non seulement elle favorise la cancérogenèse dans différents types de tumeurs, mais elle permet aussi le maintien d’un microenvironnement favorable à la croissante tumorale. Dans ce paysage, « le TNFα est un médiateur paradoxal, explique Mickael Rialland qui a dirigé l’étude. Selon l’environnement local, il favorise la croissance des cellules tumorales ou, au contraire, leur mort par apoptose ou nécrose programmée ».

Les chercheurs ont voulu comprendre pourquoi le TNFα était augmenté par le DHA, au contraire des autres messagers de l’inflammation. Pour cela, ils ont étudié le phénomène chez des souris porteuses de tumeurs colorectales humaines, un système permettant de distinguer le TNFα produit par les cellules tumorales de celui produit par les souris. Résultat : « lorsque le DHA est administré à l’animal, le TNFα humain augmente tandis que le TNFα murin diminue. L’oméga‑3 provoque donc une production autocrine de TNFα par les cellules tumorales qui favorise leur propre mort ». La cascade moléculaire dirigeant le phénomène implique notamment des microARN, dont le rôle de régulateur d’expression génique a été récemment décrit. 

Le TNFα est donc un médiateur inflammatoire qui joue un rôle important dans la croissance des tumeurs colorectales et dans le mécanisme anti-inflammatoire du DHA. Cependant, ce phénomène doit désormais être étudié sur des tumeurs de nature différente. Il a en effet été montré que le DHA n’a pas toujours cette propriété : son action varie selon le type de cellules cancéreuses. Ces études pourraient aussi permettre de comprendre les relations structure-activité des oméga‑3, et de déterminer le profil moléculaire des tumeurs sensibles à l’effet anti-cancéreux de ces acides gras.

Note

*unité 866 Inserm/université de Bourgogne/Ecole pratique des hautes études, Faculté de médecine, Dijon 

Source

A Fluckiger et coll. Inhibition of colon cancer growth by docosahexaenoic acid involves autocrine production of TNFα. Oncogene, publié en ligne le 8 février 2016.