Covid-19 : le risque de transmission par des porteurs sains se confirme

Les personnes qui ont été exposées au nouveau coronavirus peuvent-elles être infectées et excréter du virus sans développer de symptômes ? Cette hypothèse, largement évoquée, doit être vérifiée selon une méthode scientifique. C’est précisément l’objet d’une étude menée en France depuis fin février, dont les premiers résultats semblent le confirmer, soutenant l’intérêt du confinement.

La question de la transmission du SARS-CoV‑2 par une personne asymptomatique est particulièrement importante actuellement, afin d’adapter au mieux les mesures de prévention et de lutte contre l’épidémie de Covid-19. Les premières données internationales suggèrent en effet l’existence de porteurs du SARS-CoV‑2 qui ne présentent pas ou très peu de symptômes, mais qui excrètent des particules virales au niveau de leur salive et de leurs fosses nasales. Si elles ne sont pas isolées, ces personnes peuvent sans le savoir transmettre le virus à d’autres, susceptibles quant à elles de développer une forme clinique, parfois grave, de la maladie. 

Le professeur Xavier Duval* et son équipe ont souhaité étudier ce risque. Dans ce but, ils ont élaboré un protocole de recherche promu par l’Inserm, et ce dès la fin du mois de janvier. Le virus ne circulait alors pas encore activement sur le territoire français. À l’époque, le mot d’ordre était d’identifier toutes les personnes ayant été en contact proche avec un cas confirmé, afin de les isoler et de limiter la transmission du virus dans la communauté. 

Ce fut notamment le cas aux Contamines-Montjoie, en Haute-Savoie, où fut identifié l’un des premiers regroupements (clusters) de cas français, fin février. C’est là-bas que les chercheurs ont débuté leur étude, au sein de foyers où résidaient des personnes confinées après avoir été en contact avec un cas confirmé de Covid-19. D’autres foyers identifiés en dehors des hôpitaux ont ensuite été suivis, mais l’étude s’est rapidement concentrée sur le suivi de soignants : « Une fois que le virus circulait activement sur le territoire, il devenait difficile d’identifier avec exactitude la première exposition à risque d’une personne. Nous nous sommes donc tournés vers les soignants hospitaliers qui avaient été exposés à un cas de Covid-19 avant que ce dernier ne soit identifié, ou avant qu’il ne développe des symptômes », explique le chercheur. Avec les moyens de protection individuelle, ces cas se raréfient. Mais l’étude a d’ores et déjà pu en recruter plus de 100. 

Des résultats qui confirment bien l’importance du confinement

Sur la base des premiers résultats obtenus, Xavier Duval confirme qu’il existe bien des personnes chez lesquelles une excrétion du virus est mise en évidence par les prélèvements nasopharyngés systématiques, avant qu’elles ne développent des symptômes – voire sans qu’elles n’en développent. « Ces résultats confirment l’importance du confinement pour lutter contre le développement de l’épidémie » conclut-il. 

Cette étude, sélectionnée par le consortium REACTing coordonné par l’Inserm, fait en outre partie du projet européen Recover (pour Rapid European Covid-19 Emergency Response). Sa logistique particulièrement complexe impose pour l’heure aux chercheurs de se concentrer sur un petit nombre d’établissements de santé. 

Les gestes barrières recommandés et les mesures de confinement mises en place reposent sur les données scientifiques disponibles au sujet du virus responsable du Covid-19 et, par analogie, sur les connaissances existantes sur les autres coronavirus et d’autres virus respiratoires. Les données accumulées grâce à des études de terrain, telles que celle conduite par Xavier Duval, en plein cœur de l’épidémie, permettent de mieux comprendre le comportement du virus et d’adapter rapidement les mesures pour s’en protéger. 

Note :
*unité 1137 Inserm/Université Paris 13/Université Paris Diderot et CIC-EC 1425 Hôpital Bichat, AP-HP/Nord-Université de Paris