Améliorer l’efficacité des vaccins thérapeutiques

Pour qu’un vaccin thérapeutique conduise à la destruction de cellules cancéreuses, il est essentiel qu’il provoque une réponse du système immunitaire suffisamment forte et efficace. D’où l’idée de recourir à des adjuvants capables d’induire une meilleure réponse au vaccin. C’est dans ce contexte que Victor Appay et son équipe, en collaboration avec l’équipe de Stéphane Paul, se sont intéressés à une molécule immunostimulante, cGAMP. Ils ont démontré sa capacité à induire une réponse très efficace contre des cellules de mélanome, et les perspectives ouvertes par leurs résultats dépassent celle des vaccins anticancéreux.

Les lymphocytes T cytotoxiques (TCD8) sont capables de détruire spécifiquement des cellules infectées par un virus ou des cellules tumorales. Mais la quantité de lymphocytes TCD8 dirigés contre une cible spécifique n’est pas toujours suffisante pour garantir l’élimination de cette cible. Leur qualité, ou capacité effectrice, est également essentielle, et celle-ci varie en fonction des individus, de leur âge et de leur pathologie. 

L’équipe de Victor Appay* étudie depuis près de vingt ans les facteurs qui font qu’une réponse des lymphocytes TCD8 est efficace ou non. Le jeu en vaut la chandelle puisqu’identifier les conditions d’une réponse optimum permettrait de trouver comment augmenter l’efficacité des stratégies vaccinales appliquées au traitement des cancers ou du sida. Une petite molécule cyclique dérivée de l’ADN de pathogènes, cGAMP, s’est révélée être un immunostimulant puissant, potentiellement utile dans ce type d’approche. Ses modes d’action restent cependant mal connus, limitant son usage. 

Dans un travail publié en avril dans la revue JCI Insight, l’équipe a plus précisément étudié la manière dont cet immunostimulant améliore la réponse immunitaire induite par un antigène tumoral, dans le cas du mélanome. 

Un adjuvant particulièrement puissant

Victor Appay et son équipe ont pour cela développé un modèle d’étude in vitro original, à partir d’échantillons de sang de volontaires en bonne santé. Ce dispositif leur a permis de démontrer que cGAMP est capable d’induire la production de TCD8 humains spécifiques d’un antigène, et de très bonne qualité. « cGAMP interagit avec le récepteur STING des cellules présentatrices d’antigènes et induit la production d’interférons qui vont amplifier la sensibilité des TCD8 à l’antigène et les rendre particulièrement fonctionnels et efficaces », explique Victor Appay. Non seulement cGAMP est un adjuvant puissant, mais il est également plus efficace que d’autres pour induire une réponse de bonne qualité. 

Les chercheurs ont retrouvé cette grande efficacité in vivo, dans des modèles murins (tumoral et d’infection virale), que le mode d’administration de l’antigène soit nasal ou intramusculaire. Ils ont aussi démontré la capacité de cGAMP à stimuler, outre l’immunité cellulaire, les réponses immunitaires humorales et mucosales. 

« cGAMP présente ainsi de grandes potentialités d’application pour amplifier la réponse immunitaire contre d’autres cancers, mais aussi pour booster la réponse immunitaire contre des antigènes de virus, estime Victor Appay. Nous travaillons avec des chercheurs japonais sur l’impact de cGAMP dans la réponse immunitaire induite par un antigène du VIH et nous avons de très bons résultats in vitro. Nous envisageons également d’étudier la capacité de cGAMP à contrebalancer la baisse de réaction immunitaire avec l’âge, par exemple pour obtenir des vaccinations plus efficaces. »

Note :
*unité 1135 Inserm/UPMC, Centre d’immunologie et de maladies infectieuses, équipe Immunophysiopathologie de l’infection VIH et vieillissement immunitaire, hôpital de la Pitié Salpetrière, Paris 

Source : A Gutjarhr et coll. The STING ligand cGAMP potentiates the efficacy of vaccine-induced CD8+ T cells. JCI Insight, 4 avril 2019. DOI :10.1172/jci.insight.125107