Hypertension artérielle (HTA)

Une affection cardiovasculaire fréquente aux conséquences sévères

L’hypertension artérielle (HTA) est la maladie chronique la plus fréquente en France. Liée à une pression anormalement élevée du sang dans les vaisseaux sanguins, elle semble anodine car elle généralement silencieuse. Elle constitue pourtant, lorsqu’elle n’est pas contrôlée, l’une des principales causes de complications cardiovasculaires, cérébrovasculaires ou neurodégénératives (infarctus du myocarde, AVC, maladie d’Alzheimer…). Des mesures hygiéno-diététiques seules, ou le plus souvent associées à un traitement médicamenteux, permettent normaliser la pression artérielle. Néanmoins, jusque 30 % des patients ne répondent pas, ou insuffisamment, aux traitements actuellement disponibles. Pour y remédier, des approches interventionnelles et de nouvelles cibles thérapeutiques liées à la physiopathologie de la maladie sont à l’étude.

Dossier réalisé en collaboration avec Bernard Lévy, unité 970 Inserm/Université Paris Descartes, Paris Centre de recherche cardiovasculaire (PARCC), Hôpital européen George Pompidou, Paris. 

Comprendre l’hypertension artérielle

L’hypertension artérielle (HTA) est une maladie caractérisée par une pression artérielle trop élevée. 

La pression artérielle est la résultante physique de l’éjection du sang par le cœur dans les vaisseaux sanguins. Elle s’exerce sur les parois vasculaires. Elle est caractérisée par deux valeurs extrêmes : 

  • La valeur haute qui est mesurée lors de la contraction du cœur (systole) et qui permet de propulser le sang par l’aorte vers les artères périphériques.
  • La valeur basse mesurée lors de la relaxation du cœur (diastole), qui permet aux ventricules cardiaques de recevoir le sang arrivant dans les oreillettes par les veines caves et les veines pulmonaires.

On parle d’hypertension artérielle lorsque l’une et/ou l’autre de ces valeurs, mesurée au repos, est supérieure aux valeurs normales : 140 mmHg (millimètres de mercure) pour la pression systolique et 90mmHg pour la pression diastolique.

Cœur et vaisseaux – animation pédagogique – 3 min 53 – vidéo extraite de la série Corpus (2014)

La plus fréquente des affections cardiovasculaires 

L’hypertension artérielle est la maladie cardiovasculaire la plus fréquente, et constitue même la première pathologie chronique en France. On estime qu’un adulte sur trois est touché. 

Son incidence augmente avec l’âge : elle concernerait ainsi moins de 10% des 18–34 ans contre plus de 65% après 65 ans.

L’hypertension étant le plus souvent silencieuse (sans symptôme), de nombreuses personnes ignorent qu’elles sont touchées. 

  • Seule une personne hypertendue sur deux aurait connaissance de son hypertension.
  • Parmi elles, une sur deux seulement serait traitée par des médicaments antihypertenseurs.
  • Enfin, une personne traitée sur deux aurait une pression artérielle normalisée.

Ces chiffres permettent de bien comprendre l’ampleur de l’enjeu de santé publique que représente la maladie, son diagnostic et son traitement. 

Source : Bulletin épidémiologique hebdomadaire, 2018


L’âge n’est pas le seul facteur de risque

Dans l’immense majorité des cas, l’hypertension artérielle est dite essentielle, parce qu’aucune cause connue ne peut expliquer son apparition. Le trouble apparaît insidieusement et silencieusement, d’autant plus précocement que le sujet est exposé à certains facteurs de risque : le vieillissement, qui favorise la perte d’élasticité des artères, constitue le premier facteur de risque non modifiable. Mais d’autres facteurs de risques sont déterminés par des habitudes ou une hygiène de vie qu’il est possible de modifier : le surpoids, la sédentarité, une consommation élevée de sel, le tabac ou encore l’alcool.

Facteurs de risque modifiables: Trop de sel, Carence en potassium, Alcool, Tabac, Diabète, Hypercholestérolémie, Surpoids/Obésité, Sédentarité, Alimentation déséquilibrée --  Facteurs de risque non (ou peu) modifiables: Stress psychosocial, Naissance prématurée, Petit poids de naissance, Maladie rénale chronique, Antécédents familiaux, Vieillissement, Catégorie socioéconomique défavorisée, Sexe masculin, Apnée du sommeil
Les facteurs de risque modifiables et non (ou peu) modifiables de l’hypertension artérielle © Inserm / Frédérique Koulikoff

Dans 10 % des cas environ, l’hypertension artérielle est secondaire à : 

  • une maladie des glandes surrénales (adénome corticosurrénalien ou syndrome de Conn, tumeur de la médullosurrénale ou phéochromocytome) favorisant notamment la sécrétion de cortisol ou d’adrénaline dotés de propriétés hypertensives,
  • une maladie rénale (insuffisance ou polykystose rénale, sténose de l’artère rénale...),
  • une maladie vasculaire (coarctation de l’aorte),
  • une maladie endocrinienne (maladie d’Addison, acromégalie, dysthyroïdie…),
  • certains traitements (estrogènes, ciclosporine, érythropoïétine…).

Enfin, l’hypertension artérielle peut exceptionnellement avoir une origine génétique (syndrome de Gordon ou hypertension hyperkaliémique familiale). 

Un tueur silencieux aux conséquences majeures

L’hypertension artérielle est souvent diagnostiquée de manière fortuite et tardivement, en raison de l’absence de symptômes révélateurs. Néanmoins, même s’ils sont rares, certains troubles peuvent être évocateurs :

  • maux de tête permanents ou culminant le matin au réveil
  • vertiges
  • troubles de la vue
  • palpitations cardiaques
  • suées
  • saignements de nez

Des poussées hypertensives brutales peuvent aussi entraîner des malaises, de violents maux de tête ou des difficultés à respirer. 

Si elle n’est pas traitée, l’hypertension artérielle peut à terme entraîner des complications graves au niveau cardiovasculaire, cérébrovasculaire ou au niveau de certains organes cibles (rein, rétine…). L’évolution vers ces complications est généralement lente, mais peut être accélérée si d’autres facteurs de risque (hypercholestérolémie, diabète...) coexistent et ne sont pas traités ou contrôlés. 

Les principales complications auxquelles sont exposées les personnes hypertendues sont : 

Elles s’expliquent par l’épaississement et la rigidification progressive des artères, ainsi que par l’aggravation de plaques d’athérome au niveau de certaines artères clés (artère carotide, coronaire, rénale, fémorale…) sous l’impact constant de la trop forte pression sanguine. 

Par ailleurs, la pression artérielle continuellement élevée augmente le travail du cœur afin de maintenir un débit normal. À terme, cette évolution se traduit par un épaississement de la paroi du ventricule gauche, une augmentation de sa masse et une perte de contractilité. Cette hypertrophie ventriculaire gauche peut progressivement mener à l’insuffisance cardiaque. 

Cerveau : Accident vasculaire cérébral (AVC), maladies neurodégénératives (Alzheimer et apparentées) / Yeux : rétinopathie / Cœur : Angine de poitrine, infarctus du myocarde / Reins : Insuffisance rénale chronique / Jambes : artériopathie des membres inférieurs
Les principales complications associées à l’hypertension artérielle

Un diagnostic essentiellement ambulatoire

Au repos et dans des conditions non stressantes, les valeurs de pression artérielle systolique (PAS) et de pression artérielle diastolique (PAD) sont normalement respectivement inférieures à 140 mmHg et 90 mmHg. Mais la pression artérielle varie au cours de la journée : d’une valeur basse au cours du sommeil, elle devient plus élevée pendant la journée, a fortiori en cas d’activité physique, d’exposition au froid, de choc émotionnel, de stress… Une mesure unique de la pression artérielle ne peut donc suffire à poser le diagnostic.

Le diagnostic est évoqué par le médecin en cas de PAS et/ou de PAD anormalement élevées mesurée au cours de deux consultations différentes, séparées de quelques semaines (supérieure à 140/90 mmHg ou une PAS supérieure ou égale à 150 mmHg chez les plus de 80 ans). Le médecin réalise plusieurs mesures au cours de la même consultation, à plusieurs minutes d’intervalle, à l’aide d’un brassard placé à hauteur du cœur chez le patient couché ou assis, après plusieurs minutes de repos. Ces valeurs sont uniquement indicatrices car, outre la variabilité de la pression artérielle, l’appréhension des patients vis-à-vis de l’examen ou de l’environnement médicalisé peut faire augmenter artificiellement leur tension (effet « blouse blanche »). Aussi, le diagnostic doit toujours être confirmé par une automesure tensionnelle (AMT) ou une mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) :

  • L’AMT repose sur l’utilisation d’un autotensiomètre à domicile. Le patient doit mesurer sa tension artérielle chez lui au calme en reproduisant 3 fois la mesure le matin et 3 fois le soir, durant 3 jours consécutifs (règle des 3). Le diagnostic est posé face à des valeurs de PAS/PAD supérieures à 135/85 mmHg.
  • La MAPA consiste à porter un brassard relié à un appareil électrique porté à la ceinture. Le tensiomètre mesure et enregistre les valeurs de pression artérielle tous les quarts d’heure durant 24 heures. Le diagnostic est posé face à des valeurs de PAS/PAD moyennes supérieures à 130/80 mmHg.

Une stratégie thérapeutique bien encadrée

Le traitement antihypertenseur vise à ramener les chiffres tensionnels sous les valeurs normales afin de réduire au maximum le risque de complication à long terme. 

La première action de prise en charge ne passe pas par la prescription de médicaments, mais par des mesures hygiéno-diététiques :

  • réduction du poids en cas de surcharge pondérale
  • pratique d’une activité physique régulière adaptée à l’état de santé
  • réduction de la consommation en sel (moins de 6 g/jour)
  • réduction de la consommation d’alcool (moins de 3 verres par jour pour les hommes et moins de 2 pour les femmes)
  • alimentation riche en légumes et en fruits et pauvre en graisses d’origine animale
  • arrêt du tabac

Si ces nouvelles habitudes de vie ne permettent pas d’atteindre des valeurs tensionnelles normales après trois mois, la prescription de médicaments antihypertenseurs est envisagée : d’abord prescrits en monothérapie (un seul médicament) ou association (plusieurs antihypertenseurs) à doses faibles, le traitement pourra être adapté en cas de réponse insuffisante ou d’intolérance (changement de monothérapie ou d’association, adaptation de la posologie, ajout d’un nouveau traitement...). 

Il existe cinq classes thérapeutiques qui, grâce à leur mécanisme d’action spécifique, possèdent des propriétés antihypertensives : 

  • les diurétiques thiazidiques, qui favorisent l’élimination de l’eau et du sel par les reins
  • les inhibiteurs calciques, qui favorisent la vasodilatation en bloquant l’entrée de calcium dans les cellules musculaires des artères
  • les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine II (ARA2), qui contrent à différents niveaux le système rénine-angiotensine, une cascade de régulation locale de la pression artérielle et de l’équilibre en eau et en sodium
  • les bêtabloquants, qui diminuent la fréquence cardiaque
  • les antihypertenseurs d’action centrale, qui régulent la tension artérielle au niveau cérébral

Le choix de la/les classes thérapeutiques à prescrire est réalisé en fonction du mécanisme d’action le plus adapté au profil du patient et selon ses antécédents médicaux (patient très âgé, PAS élevée avec PAD normale, insuffisance rénale, angor...). Les bêtabloquants et, a fortiori, les inhibiteurs d’action centrale ne sont pas prescrits en première intention. 

La persistance d’une valeur de PA au-dessus des objectifs tensionnels malgré un traitement associant au moins 3 classes thérapeutiques différentes est considérée comme une HTA résistante. Dix à 30 % des sujets hypertendus seraient concernés. 

Les enjeux de la recherche

L’HTA mal contrôlée expose les patients à un risque majeur de complication. La recherche se focalise donc largement sur le développement de nouveaux traitements, qu’ils soient pharmacologiques ou chirurgicaux. 

Vers de nouveaux médicaments…

Du côté des recherches pharmacologiques, le développement de quelques classes thérapeutiques pourraient prochainement aboutir : 

Une nouvelle voie d’action a récemment été identifiée pour permettre de limiter la pression artérielle : elle cible la néprilysine, une enzyme qui favorise normalement la dégradation des peptides natriurétiques, des peptides essentiellement produits par le cœur qui favorisent habituellement l’élimination urinaire du sodium et la vasodilatation. L’inhibition de la néprilysine permet aux peptides d’agir plus longuement dans l’organisme. Pour l’heure, cette approche thérapeutique est l’une des deux voies d’action de ces molécules (angiotensin receptor neprilysin inhibitor), la deuxième ciblant la voie rénine-angiotensine-aldostérone. Le sacubitril constitue actuellement le seul représentant de cette classe thérapeutique, indiquée dans l’insuffisance cardiaque (dont l’HTA est une des composantes). 

Une autre classe thérapeutique pourrait également être développée : celle des inhibiteurs de l’aminopeptidase A. Ces molécules visent à cibler l’activité du système rénine-angiotensine cérébral qui est anormalement élevée chez les patients hypertendus. Elles permettraient de mieux contrôler la tension artérielle par une action centrale. 

Enfin, des données suggérant que le système immunitaire est impliqué dans la physiopathologie des maladies cardiovasculaires comme l’HTA s’accumulent. En effet, l’inflammation chronique associée à certaines conditions (surpoids, tabagisme…) engendrerait une inflammation vasculaire chronique à bas bruit, dans laquelle certains médiateurs de l’immunité sont surexprimés (cytokines…). Des travaux préliminaires cherchent à cibler les médiateurs de l’immunité réduisant l’inflammation vasculaire, et secondairement la pression artérielle. 

… et d’autres approches thérapeutiques

Parallèlement, les progrès technologiques et la meilleure connaissance de la physiopathologie de l’HTA ont progressivement permis d’envisager des approches interventionnelles pour combattre les formes résistantes. 

Parmi les différentes techniques en cours de développement, la dénervation rénale est la plus avancée : elle consiste à détruire – par radiofréquence ou par ultrasons – les fibres nerveuses sympathiques innervant les artères rénales. Ces dernières sont en effet impliquées dans la neuromodulation de la pression artérielle. Des essais cliniques sont aujourd’hui menés pour déterminer quels sont les patients les plus aptes à répondre à ce traitement, les modalités opératoires optimales garantissant le meilleur résultat et l’efficacité à long terme de la technique. Elle est d’ores et déjà proposée dans certains cas d’HTA sévère et résistante, à risque pour le patient. 

La stimulation électrique des barorécepteurs est une autre approche en développement. Elle se fonde sur la présence de fibres nerveuses sensibles à la pression artérielle au niveau de la carotide et de la crosse de l’aorte. Dans les situations normales, une augmentation de la pression artérielle est suivie par un réflexe de vasodilatation et une baisse de la fréquence cardiaque (bradycardie) qui permettent de rétablir une valeur normale. La plupart du temps, les barorécepteurs des patients hypertendus deviennent progressivement moins sensibles et perdent leur capacité à réguler la pression artérielle. L’implantation d’un stimulateur délivrant un faible courant électrique est aujourd’hui étudiée afin de stimuler les barorécepteurs et de rétablir ainsi cette capacité de régulation de la pression artérielle. Elle fait aujourd’hui l’objet d’études cliniques dans des services spécialisés au cours desquelles la sécurité, l’efficacité à court et long terme et la tolérance de l’approche invasive doivent être mieux étudiées. 

Des études permettront également de déterminer s’il est possible d’obtenir un meilleur contrôle de l’HTA en associant la dénervation rénale et la stimulation électrique des barorécepteurs 

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