Registres Maladies rares et collections de données sur les maladies rares en France – Mars 2022

Rapport rédigé par Jean Donadieu (Service d’Hémato-oncologie pédiatrique, Hôpital Trousseau, Paris – Centre de référence des neutropénies chroniques, Centre de référence des histiocytoses), remis à l’Inserm.

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Les maladies rares, maladies dont la prévalence est inférieure à un cas pour 2 000 habitants, sont une priorité de santé dans les pays développés, car, collectivement, elles constituent une part importante des maladies chroniques et invalidantes. Leur domaine est extrêmement fragmenté, avec quelques maladies connues (mucoviscidose, hémophilie, drépanocytose) et de nombreuses autres moins connues.

La France a mis en place, depuis 2004, trois plans nationaux de santé qui ont structuré l’accès aux soins avec la création de centres de référence maladies rares (CRMR), tandis que la politique du médicament orphelin permet l’accès, le cas échéant, à des médicaments très efficaces, mais très coûteux. Les outils épidémiologiques mis en place depuis 2004 pour suivre ces maladies l’ont été d’abord par les CRMR eux-mêmes. Douze registres (pour 109 CRMR) ont ainsi été qualifiés entre 2004 et 2008 et sont tous aussi des cohortes prospectives nationales, tandis que plusieurs CRMRs ont mis en place des bases de données de patients concernant des maladies particulières. Sur ce socle, depuis 2010, deux projets nationaux ont été développés : la Banque national de données maladies rares (BNDMR) et le projet Rare disease cohorts (RADICO, incluant 13 nouvelles cohortes crées à partir de 2014). Durant l’année 2020, ces dispositifs, ont été examinés dans le cadre de ce rapport.

Les 12 registres maladies rares sont des entités vivantes, avec un nombre total de patients inclus proche de 50 000 et une production scientifique importante. Ils associent production d’indicateurs épidémiologiques, recherche clinique et translationnelle, recherche fondamentale. A la fin de l’année 2020, seul un sur 12 de ces registres bénéficie d’un financement public (FranceCoag) et malgré leur
productivité, ces entités restent très fragiles. La BNDMR, financée au moyen d’une Mission d’intérêt générale par la Direction générale de l’organisation des soins (DGOS), collecte au niveau national un ensemble de données communes à toutes les Maladies Rares. Ces informations permettent d’abord un suivi de l’activité des CRMRs par la DGOS. Le projet RADICO, bénéficie du Programme des investissements d’avenir pour près de 10 millions d’euros en 10 ans, est encore au début de son activité et le nombre d’inclusion est d’environ 5 000 patients. Les bases de données des CRMRs, ne bénéficiant pas d’une évaluation publique et n’ont pas été étudiées ici. Elles sont d’abord des instruments de recherche de chaque CRMR concernée. L’ensemble des systèmes de surveillance épidémiologique (registres, RADICO, BNDMR, Bases de données CRMRs) a un coût annuel estimé à 3 à 4 millions
d’euros, qui est à mettre en perspective au coût des soins, qui est au minimum de 2 milliards d’euros annuel.

Au-delà de l’évaluation des registres existants, ce travail pointe la nécessité de revoir le dispositif épidémiologique maladies rares en France sur 4 aspects :

  1. Evaluation de l’utilité au long cours des soins coûteux : Compte tenu des coûts majeurs des soins et en particulier des médicaments destinés aux maladies rares, la puissance publique doit favoriser la mise en place de registres / cohortes nationales de maladies, indépendants des industriels pour disposer
    d’évaluations de l’impact des soins sur le devenir au long cours des patients en population. Les registres / cohortes, par la précision de leurs informations recueillies, le lien avec des recherches translationnelles et fondamentales sont complémentaires des bases de données institutionnelles, et gardent leur place à l’ère du Big Data.
  2. Coordination des institutions impliquées : Une coordination des acteurs institutionnels impliqués dans la chaîne des décisions pour les Maladies Rares doit être organisée, en associant les parties prenantes : DGOS, DGS, Santé Publique France, ANSM, HAS, Assurance maladie, Inserm, AVIESAN, ANR, Agence de Biomédecine et les CRMRs. La complémentarité des structures existantes doit être encouragée par un pilotage global, unique.
  3. Qualité des cohortes maladies rares et communication : La mise à niveau des différentes registres/ cohortes doit être organisée afin d’homogénéiser les pratiques, de s’inscrire complètement dans la dynamique du RGPD et de donner de la visibilité aux données issues des registres, qui restent trop peu diffusés vers le public à ce jour.
  4. Financement du dispositif épidémiologique : Un financement global de ce système d’information doit être organisé et pourrait s’appuyer sur une contribution des industriels, avec une péréquation des fonds industriels vers l’ensemble des structures animant le suivi épidémiologique ‘maladies rares’.
    Dans leur ensemble ces recommandations résonnent avec la réflexion entamée par le haut conseil de la santé publique (HCSP) concernant les registres à la fois populationnelles (ce que sont les registres MR) et les registres de pratiques et les cohortes.